Neuf Égyptiens, accusés d’être impliqués dans l’un des naufrages de migrants les plus meurtriers en Méditerranée, qui a fait 80 morts et quelque 600 disparus, ont été acquittés par la justice grecque, mardi 21 mai, au premier jour de leur procès.

La Cour « déclare que les neuf accusés sont acquittés » et toutes les charges ont été abandonnées, a annoncé la juge du tribunal de Kalamata (sud de la Grèce), qui s’est déclaré incompétent dans cette affaire.

Une déclaration qui va dans le sens des arguments des avocats de la défense, qui contestaient la compétence du tribunal grec pour juger cette affaire puisque le naufrage est survenu dans les eaux internationales.

Les défenseurs des accusés avaient dénoncé de graves vices de procédure dans l’enquête : leurs clients ont été arrêtés à peine 24 heures après avoir survécu au drame, sur la foi de neuf témoignages seulement.

Certains rescapés ont affirmé « avoir dû désigner, sous la pression de la police grecque, des coupables à partir de photos pas très nettes », a expliqué l’une des avocates, Effie Doussi, quelques jours avant le début des audiences.

82 corps retrouvés

Devant le tribunal de Kalamata, avant l’ouverture des audiences, une trentaine de personnes se sont réunies dans une ambiance tendue, des militants antiracistes et de gauche ont scandé : « Ce crime ne va pas être oublié ! »

Le naufrage de l’Andrianna, un chalutier vétuste et surchargé, dans la nuit du 13 au 14 juin 2023 au large de la Grèce, avait soulevé de nombreuses questions sur les opérations de secours menées par les autorités portuaires grecques. 104 migrants ont survécu à l’accident qui s’est produit dans les eaux internationales, à 47 milles marins (87 km) au large de Pylos (sud-ouest).

L’embarcation avait appareillé en Libye et mettait le cap sur l’Italie. Seuls 82 corps ont été retrouvés alors que, selon l’ONU, plus de 750 personnes se trouvaient à bord, dont près de 350 Pakistanais, selon Islamabad.

Responsabilité des gardes-côtes

Des associations d’aide aux migrants et plusieurs médias internationaux ont pointé la responsabilité des gardes-côtes, qui ont beaucoup tardé à intervenir.

L’ONG Alarm Phone et l’agence de surveillance européenne aux frontières Frontex avaient signalé la présence du bateau aux autorités grecques alors qu’il se trouvait dans la zone de recherche et de secours grecque.

Les autorités grecques, sur la défensive après ce drame, ont soutenu que les migrants avaient refusé toute aide. De leur côté, des survivants ont affirmé que les gardes-côtes ont voulu remorquer le chalutier surchargé, ce qui aurait provoqué son chavirement.

Le premier ministre Kyriakos Mitsotakis, dont le pays est accusé de pratiquer des refoulements illégaux à sa frontière avec la Turquie, avait jugé « très injuste » la mise en cause des autorités portuaires.

Une enquête, menée par un tribunal naval, sur les responsabilités éventuelles des gardes-côtes, est en cours mais les demandes d’accès au dossier ont toutes été refusées, selon les avocats des accusés.