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La chute de François Hollande « est inédite dans son ampleur et d'une précocité jamais vue »

Thomas Wieder, chef du service politique du « Monde » détaille les facteurs qui ont entraîné la chute de l'éxécutif dans l'opinion et les perspectives du quinquennat de François Hollande.

Par  et

Publié le 05 septembre 2014 à 15h03, modifié le 06 septembre 2014 à 22h16

Temps de Lecture 4 min.

Passant en septembre à 13 % d'opinions favorables dans le baromètre TNS Sofres-« Le Figaro Magazine », François Hollande détient désormais ce record d'impopularité pour tous les instituts de sondage.

Instabilité ministérielle, déballage de la vie privée, sondages calamiteux font souffler un vent de panique sur le président de la République et le gouvernement Valls 2 et ce, seulement neuf jours après la formation de sa nouvelle équipe. Thomas Wieder, chef du service politique au « Monde », a répondu aux questions des lecteurs du Monde.fr.

Gordon : Quels sont les erreurs commises par François Hollande pour être descendu aussi bas dans les sondages ?

Thomas Wieder : D'abord, François Hollande n'est pas parti de très haut. Sa cote de popularité au lendemain de son élection, en mai 2012, n'atteignait pas des sommets. La droite a, dès le départ, été massivement contre lui. En 2007, la situation était très différente pour Nicolas Sarkozy qui, dans les premiers mois de son mandat, bénéficiait, sinon du soutien, du moins de la bienveillance d'une partie de la gauche.

Ensuite, les deux premières années du quinquennat Hollande ont été marquées par la déception croissante de son propre électorat. La politique menée par Jean-Marc Ayrault puis Manuel Valls, non seulement ne produit pas de résultat, mais apparaît aux yeux d'un nombre croissant d'électeurs ayant voté en 2012 pour François Hollande, comme une politique contraire aux engagements pris à l'époque par le candidat socialiste. Le président de la République paie donc, à la fois son impuissance et sa trahison.

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Enfin, le troisième facteur expliquant la dégringolade de Hollande dans les sondages est lié à la succession d'affaires mettant en lumière son manque d'autorité. Les épisodes de ces derniers jours, de l'affront de Montebourg et Duflot au règlement de comptes de Trierweiler, en sont l'illustration.

Sébi : Comment se fait-il que le PS (et EELV) était si peu prêts à gouverner ?

Dix ans d'opposition semblent en effet n'avoir servi à pas grand-chose. Au Parti socialiste, très peu de travail a été fait pendant cette période pour penser le monde en général, la société française en particulier, avec un logiciel rénové. Ce n'est pas le début de réflexion entamée sous Martine Aubry avant la présidentielle de 2012 qui a rattrapé ce temps perdu.

Adolphe Thiers : François Hollande a-t-il des chances d'être réélu en 2017 ?

L'enjeu pour François Hollande aujourd'hui n'est pas d'être élu en 2017, c'est d'être en situation d'être candidat. Jamais depuis le début de la Ve République, la question de la capacité d'un président sortant à être candidat à sa propre succession ne n'est posée de cette façon.

Sarkozy était, certes, très impopulaire quoique moins que Hollande aujourd'hui. Jacques Chirac était tombé à 16 % d'opinion favorable mais c'était en 2005, deux ans avant la fin de son second mandat, et de plus nul n'imaginait alors qu'il serait candidat à un troisième. Là, la chute est inédite dans son ampleur et d'une précocité jamais vue.

Le fait que le PS ait habitué ses électeurs en 2006 puis en 2011 à dorénavant choisir ses candidats à la présidentielle par le biais d'une primaire, rend la chose très compliquée pour François Hollande. Compte tenu de sa très faible légitimité, le fait qu'il refuse de passer par la case primaire serait vu comme une dérobade, mais, à l'inverse, s'il participe aujourd'hui à une primaire, il n'est absolument pas dit qu'il l'emporterait.

Quel intérêt François Hollande aurait-il à dissoudre, ou même à démissionner ?

La question de la dissolution ne devrait pas être posée tant qu'il n'y a pas, objectivement, un blocage de la majorité à l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, cette majorité existe, chaque fois, elle a été au rendez-vous, malgré le bruit fait par les frondeurs.

Mais ce qui est vrai institutionnellement ne l'est pas forcément politiquement. On le voit bien aujourd'hui : la gravité de la crise est telle que le soutien d'une majorité parlementaire fragile est un rempart bien faible pour le chef de l'Etat. On peut le déplorer, mais nous sommes aujourd'hui dans une démocratie d'opinion où la légitimité d'un pouvoir se mesure aussi à l'aune des sondages. Ceux-ci sont aujourd'hui tellement calamiteux que, oui, la question se pose d'une nécessaire opération de relégitimation démocratique d'un pouvoir qui semble n'être plus que l'ombre de lui-même.

Greg : Les électeurs socialistes verraient-ils la dissolution d'un bon œil ?

Les électeurs socialistes, je ne sais pas. Les parlementaires socialistes, en revanche, sont très embêtés par cette affaire. Ils sentent bien d'un côté qu'en soutenant bec et ongles le gouvernement, ils se coupent de leur base. Mais, de l'autre côté, ils savent que s'ils vont trop loin dans la « fronde », que s'ils ne votent pas la confiance à Manuel Valls, le 16 septembre, donc que s'ils prennent le risque de priver le gouvernement de majorité, François Hollande pourra alors être tenté de dissoudre. Or, vu les résultats des municipales et des européennes, et vu les sondages aujourd'hui, des élections législatives anticipées auraient toutes les chances de conduire à une Berezina électorale.

Les socialistes sont encore traumatisés par les législatives du printemps 1993, dont seulement 58 d'entre eux avaient réchappé. Ils savent que la dissolution est pour beaucoup d'entre eux synonyme d'une fin de carrière parlementaire anticipée. Et ils n'en veulent pas.

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