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Bizet nuit gravement à la santé des Australiens

L'opéra de perth vient de supprimer "Carmen" de sa programmation. Motif : l'oeuvre ferait l'apologie du tabac.

Par Caroline Taïxpar

Publié le 17 octobre 2014 à 12h39, modifié le 17 octobre 2014 à 12h39

Temps de Lecture 2 min.

Déprogrammé. "Censuré", osent certains. Carmen de Bizet, le plus célèbre des opéras français, ne sera pas joué à l'Opéra de Perth, en Australie-Occidentale. Les anticorrida auraient-ils réussi à faire entendre leur voix ? A moins que ce ne soit le meurtre de Carmen par son amant jaloux qui choque les bien-pensants ? Non, rien de tout cela. Georges Bizet a fait démarrer l'oeuvre près d'une manufacture de tabac. Ses personnages fument. Et pire : ils font l'éloge du tabac. « Dans l'air, nous suivons des yeux la fumée qui vers les cieux monte, monte parfumée », chantent les femmes de la manufacture. Il n'en fallait pas plus pour juger l'opéra « unhealthy », mauvais pour la santé, voire malsain. Carmen, qui fêtera en 2015 ses 140 ans, est accusé de rendre la cigarette glamour.

Carolyn Chard, la directrice du West Australian Opera, a renoncé à présenter Carmen après avoir décroché un nouveau sponsor : la fondation publique Healthway, qui lutte contre le tabac, l'alcool, l'obésité. « Nous devons accepter et comprendre les valeurs de nos sponsors », a expliqué la directrice au quotidien The Australian. L'accord avec Healthway est prévu pour deux ans.  « Nous ferons très attention à être en phase avec eux », a averti Carolyn Chard, avançant les difficultés à trouver des financements.

AUTOCENSURE

Healthway soutient de plus en plus de compagnies, comme le West Australian Ballet et le West Australian Symphony Orchestra. Avec toujours le même objectif : faire la promotion de messages sains, augmenter la participation à des activités bonnes pour la santé. Mais la présidente de la fondation, Rosanna Capolingua, assure n'être pour rien dans la déprogrammation de l'opéra. « Ils sont venus nous voir et nous ont dit qu'ils ne feraient pas Carmen. [...] Nous avons répondu OK. » Elle reconnaît toutefois que  « c'est un bon moyen de s'assurer le soutien de Healthway pour plusieurs années ». La fondation s'est engagée à donner 400 000 dollars australiens (280 000 euros) en deux ans, ce qui représente à peine 4 % du budget de l'opéra.

L'Australie a fait de la lutte contre le tabac une de ses priorités. Ce pays, où il faut compter une quinzaine d'euros pour acheter des cigarettes, a été le premier à instaurer le paquet neutre. Mais déprogrammer Carmen au nom de la lutte antitabac, c'était aller trop loin. Le premier ministre conservateur Tony Abbott a dénoncé « la folie du politiquement correct ». « On ne déprogramme pas Macbeth parce que cette pièce promeut le meurtre des rois ! », a-t-il pris en exemple. The Australian quant à lui a titré :  « Qu'est-ce qu'ils peuvent bien fumer en Australie-Occidentale ? » Pour un lecteur du quotidien, le West Australian Opera aura du mal à trouver des oeuvres au goût de son sponsor. « Les opéras devront juste être réécrits. Dans Carmen, il faudra se mettre au patch. Don Giovanni portera des préservatifs. Dans La Traviata, on ne boira plus que de l'eau minérale. Dans La Bohème, Mimi, malade de la tuberculose, sera placée dans un sanatorium. Dans Giulio Cesare de Haendel, Cléopâtre prendra des douches et non plus des bains. Et le public restera chez lui. » « Nous sommes ravis que tant de gens se passionnent pour l'opéra », a tweeté le West Australian Opera face à l'avalanche de critiques. « Carmen est un chef-d'oeuvre. Il n'a pas été banni de notre scène », se défend la direction de l'opéra. Carolyn Chard assure que Carmen pourra revenir dans deux ans, à la fin du partenariat avec Healthway.

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