EMPLOIMais qui travaille vraiment aux 35 heures?

Mais qui travaille vraiment aux 35 heures?

EMPLOILa loi Aubry sur la réduction du temps de travail fête son anniversaire ce lundi...
 Illustration: des employés dans une entreprise en open space
 Illustration: des employés dans une entreprise en open space - MEIGNEUX/SIPA
Nicolas Beunaiche

N.Beu.

Les 35 heures ont quinze ans. Le 15 décembre 1999, était adopté le projet de loi Aubry réduisant le temps de travail légal hebdomadaire. Plus d’une décennie plus tard, la mesure continue de susciter la polémique et d’attiser les tensions politiques. Selon un rapport de la Dares de 2011, la durée habituelle hebdomadaire pour une semaine normale de travail s’établissait pourtant en France à 39,5 heures. Alors qui travaille véritablement 35 heures par semaine? Eclairage.

Des salariés à 35 heures hebdo, mais pas seulement

«Les lois Aubry ne peuvent être résumées à l’appellation de loi des 35 heures», rappelle Eric Heyer, économiste à l’OFCE. Outre les salariés soumis à la durée légale hebdomadaire (environ 40% du total), les lois Aubry s’appliquent en effet à deux autres types de travailleurs: ceux aux 1.600 heures par an, et ceux aux 218 jours par an. A l'origine, l’objectif était de contourner l'impossibilité de comptabiliser le temps de travail de certains cadres dépassant largement les 35 heures par semaine, tout en fixant un plafond au-delà duquel les entreprises devaient leur verser des heures supplémentaires. Si l’on prend sa calculette, 1.600 heures ou 218 jours annuels équivalent bien à 35 heures hebdomadaires, en tenant compte des jours de repos supplémentaires accordés. En théorie en tout cas.

Des salariés de la fonction publique, moins du privé

La limite hebdomadaire de 35 heures est appliquée davantage dans le public que dans le privé. Dans un rapport publié en octobre, l’institut Montaigne (classé à droite) estimait d’ailleurs à 1.573 heures annuelles le temps de travail moyen des fonctionnaires français en 2010, contre 1.697 heures en moyenne dans l’OCDE. L’organisme pointait du doigt les 35 heures. Interrogée par 20 Minutes, l’économiste de Coe-Rexecode Amandine Brun-Schamme expliquait à cette époque que la mesure avait en effet «conduit à une baisse de la durée de travail effective», la fonction publique hospitalière faisant figure d’exception. Pour autant, il ne faut pas cantonner les 35 heures à la fonction publique. Les salariés de nombreuses entreprises ont eux aussi bénéficié de la réduction du temps de travail, tout du moins du forfait annuel, notamment dans l’industrie.

Des salariés de grandes entreprises, moins de TPE

Dès la préparation du projet de loi, explique Eric Heyer, «Martine Aubry avait conscience que plus une entreprise est grande, plus il est facile de se réorganiser et de passer aux 35 heures». De fait, dans les grandes entreprises, des accords ont été passés pour négocier l’application de la loi et l’adoption du forfait annuel. A l’inverse, parmi les petites entreprises, «beaucoup ne sont jamais passées aux 35 heures dans l’attente d’un retour au pouvoir de la droite et d’un assouplissement de la loi», ajoute Eric Heyer. Dans les TPE-PME, beaucoup de salariés sont restés à 39 heures. Quand ils travaillent plus de 35 heures, les entreprises ont régulièrement recours à des heures supplémentaires, dites structurelles, effectuées chaque semaine par des salariés soumis à un horaire collectif supérieur à la durée légale. C’est particulièrement le cas dans les petites entreprises n’ayant pas réduit la durée du travail à 35 heures, rappelait en 2012 le ministère du Travail auprès de L’Express.

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