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Cannabis : les bénéfices objectifs de la légalisation

Une étude du think tank Terra Nova, dont « Le Monde» publie les conclusions en exclusivité, relève qu’un cadre moins répressif pourrait limiter la consommation et rapporter près de 2 milliards d’euros par an à l’Etat.

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Publié le 19 décembre 2014 à 12h30, modifié le 19 août 2019 à 13h58

Temps de Lecture 3 min.

Alors que le débat est bloqué en France sur la question du cannabis, une étude du think tank Terra Nova, dont Le Monde publie les conclusions en exclusivité, relève qu’un cadre moins répressif pourrait avoir un résultat plus satisfaisant pour limiter la consommation. Il modélise les scénarios sanitaires et financiers de la dépénalisation ou la légalisation du cannabis, qui pourraient rapporter près de 2 milliards d’euros par an à l’Etat.

Lire aussi l’éditorial du Monde : Pour la légalisation du cannabis

D’abord, le constat. « La politique de répression est en échec en France », relèvent les trois économistes auteurs de l’étude. Malgré l’arsenal répressif, la consommation de cannabis en France est l’une des plus élevées d’Europe. Surtout, cette politique publique coûte cher. Elle capte une part considérable des ressources allouées au maintien de l’ordre public et à la justice. Au total, 568 millions d’euros sont consacrés chaque année au cannabis, les seules interpellations comptant pour quelque 300 millions. S’y ajoute le coût social indirect : la déstabilisation de quartiers par le trafic, la consommation de produits frelatés…

 

Le système n’atteignant pas ses objectifs, les auteurs ont étudié trois alternatives susceptibles d’obtenir de meilleurs résultats.

Lire sur Les Décodeurs : Cannabis : comment Etats-Unis et Europe ont évolué

Scénario 1 : dépénalisation de l’usage. Elle consiste à supprimer les sanctions en cas de détention de cannabis à des fins personnelles, comme au Portugal ou en Espagne. Un tel scénario permettrait de réduire de 55 % le coût (policier, judiciaire et carcéral) de la répression, soit une économie de 311 millions par an, mais pas d’enregistrer de nouvelles recettes fiscales. En outre, elle ne permettrait pas de contrôler le prix, déterminant essentiel de la demande, et n’offrirait donc pas d’outil pour influer sur la consommation. Le prix resterait inchangé puisque les vendeurs supporteraient le même risque. La hausse du trafic serait de 16 %. Il y aurait 6 000 consommateurs quotidiens de plus (12 %), et 309 000 consommateurs occasionnels supplémentaires.

Scénario 2 : légalisation de la production, de la vente et de l’usage dans le cadre d’un monopole public. Le cannabis deviendrait un bien marchand comme le tabac. C’est la voie choisie par l’Uruguay : cette option permet à l’Etat de jouer sur le prix pour garantir une relative stabilité de la consommation. Ce qui peut être le cas avec une majoration de 40 % du prix actuel, 6 euros le gramme, à 8,40 euros - l’idée est d’intégrer dans le prix de vente sur le marché légal l’équivalent monétaire des risques (interpellation…) encourus actuellement sur le marché noir.

A 8,40 euros le gramme, avec une taxation au même niveau que le tabac (80 %), cela permettrait d’enregistrer des « recettes fiscales significatives » (1,3 milliard par an) et une réduction drastique des dépenses publiques de 523 millions (- 92 %) grâce à la disparition des frais de justice et de police, ainsi que d’éviter des dépenses de santé supplémentaires. L’impact budgétaire total serait de 1,8 milliard d’euros.

A prix inchangé, le nombre d’usagers quotidiens augmenterait de plus de 47 %, à 812 000, et les recettes s’élèveraient à 1,6 milliard, car le marché noir disparaîtrait. L’impact global serait de 2,1 milliards.

Les auteurs estiment que 13 000 emplois seraient créés, hors ceux liés à la production.

Scénario 3 : légalisation dans un cadre concurrentiel. Cette fois, le prix serait défini par le jeu du marché, et devrait baisser. C’est l’option retenue au Colorado. C’est de loin la plus avantageuse financièrement, mais elle comporte un inconvénient majeur : une forte augmentation de la prévalence, du fait de la baisse du prix. Les auteurs estiment que la hausse de volume serait alors de près de 270 tonnes, soit un quasi-doublement, et celle du nombre d’usagers quotidiens de 71 % (+ 393 000). Il avoisinerait alors le million.

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Vu l’essor du nombre de consommateurs, malgré la baisse du prix, l’impact pour les finances publiques serait encore plus fort : 1,7 milliard d’euros. La réduction des dépenses publiques serait moindre (- 86 %), car celles de santé augmenteraient. Le gain total s’élèverait à 2,2 milliards d’euros.

L’enjeu étant sanitaire, et non financier, les économistes estiment que le scénario n° 2 « présente les meilleures garanties en termes de contrôle de la prévalence et de protection des populations les plus vulnérables ». Estimant que le maché noir pourrait subsister, ils proposent d’agir en deux temps pour le marginaliser : légaliser à un tarif proche de l’actuel, puis l’augmenter peu à peu.

Les chercheurs rappellent que c’est cette approche, fondée sur la prévention et une majoration des prix, qui a permis de réduire le tabagisme.

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