Le 8 janvier, Mark Zuckerberg, PDG de Facebook, postait sur sa page un message conclu par le hashtag #JeSuisCharlie, où il rappelait l’importance de la liberté d’expression et s’engageait “à construire un réseau où l’on peut parler librement sans craindre la violence”. Facebook a néanmoins accepté de se conformer à une ordonnance d’un tribunal d’Ankara l’obligeant à bloquer un nombre indéterminé de pages jugées “offensantes envers Mahomet”, relève The Washington Post, citant la BBC.

Si cette décision correspond à la politique suivie de longue date par Facebook, qui se plie aux lois et ordonnances de chacun des pays où il opère – comme Mark Zuckerberg l’avait rappelé dans son post –, elle apporte de l’eau au moulin de ceux qui avaient accueilli avec réserve la déclaration du jeune PDG. Des voix critiques qui soulignaient que “l’histoire récente de Facebook ne concorde pas totalement” avec les promesses de Mark Zuckerberg, rappelle le quotidien américain. Facebook a été notamment critiqué pour avoir censuré la page d’un des plus féroces critiques de Vladimir Poutine, Alexeï Navalny, ou encore pour avoir supprimé plusieurs publications d’un écrivain et activiste tibétain sur l’immolation d’un moine bouddhiste.

Censure

Cette situation “illustre à quel point les questions de liberté d’expression sur le web sont compliquées et nuancées”, souligne le Washington Post. D’après le quotidien américain, la Turquie “représente un public potentiel énorme pour les entreprises technologiques américaines”, avec sa population croissante de jeunes habitants tournés vers le numérique. Mais, selon un rapport ouvertement rendu disponible par Facebook, elle a demandé à Facebook de censurer 1 893 contenus au cours des six premiers mois de 2014. Seule l’Inde fait “pire”, avec près de 5 000 demandes.

“Dans le passé, les réseaux sociaux qui ont refusé de se soumettre aux
exigences de la justice turque – notamment Twitter et YouTube – ont été
entièrement bloqués dans le pays”, note aussi le journal.

Comme le reconnaît le Washington Post, “Facebook est une société internationale et doit obéir aux lois de chaque pays dans lequel elle opère”. Mais “le faire et se poser en même temps comme le saint patron de la parole politique” paraît un peu malhonnête, juge le quotidien. Qui propose d’ajouter un astérisque à l’engagement de Mark Zuckerberg : “Un réseau où l’on peut parler librement sans craindre la violence”… “tant que ce que vous dites respecte les lois du pays sur la censure et tant que le pays ne nous demande pas de l’enlever”.