Pour exister, il fallait jouer des coudes, le 29 janvier dernier, dans la grande salle de réception de Bercy. Ce soir-là, Emmanuel Macron, le ministre de l’Economie, et Axelle Lemaire, la secrétaire d’Etat au Numérique, avaient convié les représentants de la French Tech pour une cérémonie des vœux pleine de ferveur et de complicité.
Quelques semaines plus tôt, tout ce petit monde déboulait au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas pour y exposer ses dernières inventions high-tech, occultant fréquemment les annonces des géants américains et asiatiques présents. Avec une pointe de fierté, Axelle Lemaire évoque la récente une du grand quotidien populaire américain USA Today, consacrée à l’innovation française. Et elle a sûrement dû se pincer en voyant The Economist, habituellement adepte du French bashing, se faire l’apôtre de cette French Tech – avec ses entrepreneurs, investisseurs ou chercheurs – qui rafraîchit sérieusement l’image de la France numérique.
A la même époque, l’an dernier, les champions français du high-tech venaient tout juste d’être portés sur les fonts baptismaux de ce même CES. Avec Fleur Pellerin pour marraine. Aujourd’hui, Nicolas Dufourcq, le directeur général de Bpifrance, grand argentier de cette France numérique, n’hésite pas à parler de "Silicon Valley à la française". La consécration américaine est intervenue quelques semaines après la labellisation par le gouvernement de neuf métropoles French Tech, en novembre dernier, souhaitant que partout s’infuse l’"esprit digital". "La richesse de la France, ce sont ses territoires", proclame Axelle Lemaire, qui pousse l’idée d’une "République numérique".
Des financements adaptés
De Lille à Montpellier, la mutation est rapide et profonde. L’éco-système est en train de changer de taille, et les mentalités évoluent : « Il y a quatre ou cinq ans, les entrepreneurs rêvaient de monter une boîte à 50 ou 100 millions d’euros. -Aujourd’hui, ils ont la culture du milliard », observe Paul-François Fournier, directeur en charge de l’innovation à Bpifrance. Il reste que l’accès au financement doit à -présent se démocratiser partout dans l’Hexagone.
Le 26 janvier dernier, la banque des start-up a présenté son plan de transformation, Nova, destiné à simplifier les processus et à accompagner les entrepreneurs dans leur parcours. Et pour mieux servir les disciples de la French Tech, elle met en place une gamme de financements supposée servir tous les besoins des entrepreneurs aux différents stades de leur développement. De la bourse de 30.000 euros au prêt innovation, en passant par le prêt d’amorçage ou le système d’avance, tous les détails des offres figurent dans un petit livre jaune, spécialement édité pour l’occasion, qui décrit la nouvelle philosophie de la banque : remettre l’innovation au centre.
Initiée par Fleur Pellerin, déployée par Axelle Lemaire, l’initiative French Tech aura indéniablement permis de mettre de l’huile dans les rouages d’une mécanique souffreteuse. Pour Philippe Collombel, le cofondateur du fonds Partech Ventures, c’est aussi une formidable opération de communication : "La French Tech est le meilleur remède contre le French bashing". A charge pour les neuf métropoles nouvellement labellisées de transformer l’essai.