Jacques Attali à Paris le 9 novembre 2014

Jacques Attali à Paris le 9 novembre 2014

afp.com/Lionel Bonaventure

L'intellectuel de 71 ans, tout de noir vêtu, a mené 32 jeunes musiciens venant du monde entier lors d'un concert de 45 minutes au centre culturel JW3.

Publicité

Ils ont interprété successivement "Rossini, l'ouverture du Barbier de Séville", la sérénade n°13 de Mozart, "Bloch Prière" Viola solo par Joseph Fisher et la symphonie n°25 de Mozart.

Celui qui a voulu être chef d'orchestre depuis ses 16 ans a expliqué à l'AFP avoir réalisé son rêve depuis "une dizaine d'années", grâce à la question d'un animateur de télévision. "Un jour, Michel Drucker m'a demandé dans une émission ce que j'aurais aimé faire (..), j'ai répondu que j'aurais rêvé être chef d'orchestre. Plusieurs chefs m'ont téléphoné en me disant +venez essayer+".

"J'ai dit non, c'est un métier mais l'un d'entre eux a insisté". Après avoir suivi "deux ans de cours avec le chef François-Xavier Roth", Attali, pianiste depuis l'enfance, a commencé par diriger "des choses simples" à l'orchestre de Grenoble.

"Et depuis je dirige partout où l'on m'invite". De Shanghaï à Jérusalem, de Marseille à Orléans en passant par Paris.

-'Coline' de Barbara-

"C'est la chose la plus difficile que j'ai jamais eue à faire. Ce soir je dirige 100 partitions. Il faut les connaître toutes pour tous les instruments, les faire entrer, déconnecter ses yeux de ses mains, c'est tout le défi", a confié le septuagénaire.

Outre la direction d'orchestre, Jacques Attali s'est essayé à l'écriture avec les paroles de "Coline", une chanson de Barbara. "C'est elle qui m'avait demandé. Elle a tellement insisté que je me suis dit +why not+ et un jour, dans un avion j'ai entendu une merveilleuse mélodie de Schubert et j'ai écrit une chanson pour elle". Heureux de cette expérience unique, il se dit prêt à la renouveler, "si on me demande".

Attaché à l'éducation, il préside également l'organisation "la Fabrique Opéra" avec Patrick Souillot à Grenoble. "Nous faisons des opéras de haut niveau artistique dans lesquels l'ensemble de l'activité technique, décors, costumes, électricité, menuiserie, maquillage sont faits par les gamins des lycées techniques, ce qui les fait s'intéresser à l'art lyrique".

"La musique a toujours été en avance pour expliquer les évolutions de la société", a-t-il également expliqué en anglais à l'issue du concert. "Le début du partage du travail s'est fait au sein d'un orchestre à la fin du 18e siècle, la première chose produite sur une chaîne de montage a été un disque, la première chose partagée sur internet en peer-to-peer a été la musique, elle était au début de l'économie collaborative il y a 30 ans", a-t-il détaillé.

"La musique dit exactement ce que nous vivons aujourd'hui, le fait que les gens ne sont plus prêts à payer pour un album mais qu'ils sont prêts à payer pour assister à un concert, parce qu'aujourd'hui la seule chose qui a une valeur réelle c'est le temps" y compris celui passé avec les autres.

"Et on voit que cela gagne l'ensemble de l'économie" qui cherche à "libérer du temps", a-t-il dit citant l'exemple de la voiture Google sans chauffeur, qui permettra de vaquer à d'autres occupations pendant les trajets.

"Quand je vais dans un pays, je m'intéresse à sa nourriture, sa démographie et sa musique et cela me donne beaucoup d'espoirs pour l'avenir de l'Inde et de l'Afrique mais beaucoup moins pour la Chine", a-t-il ajouté, sceptique devant la musique chinoise.

"Pour l'Europe, si vous regardez la nourriture, la musique et la démographie (..) je ne vois pas de meilleur avenir que celui de la France parce que nous avons les trois. L'Italie à la nourriture et la musique. L'Allemagne a....la musique. Il est évident que nous avons beaucoup de problèmes en Europe mais c'est le meilleur endroit où vivre", a-t-il tenu à rappeler.

Publicité