Orange s'attaque au paiement mobile en Pologne, avant la France

Orange veut sa part du paiement mobile. Alors qu'Apple, Samsung, Google se sont déjà lancés sur ce créneau, l'opérateur télécoms français a choisi la Pologne pour proposer, depuis octobre, un nouveau service baptisé « Orange Finance ». Il s'est associé à mBank, la troisième banque du pays, pour lancer une application mobile permettant, tout à la fois, de payer, de transférer de l'argent ou d'en retirer, et même de souscrire un crédit bon marché en quelques minutes. « La banque a accès aux données clients d'Orange et sait si ceux-ci paient régulièrement leurs factures ou pas », souligne Tomasz Dreslerski, responsable d'Orange Finance. Résultat : 75.000 clients en cinq mois. Une razzia ! « C'est un axe vraiment stratégique car cela développe la valeur autour du service traditionnel que nous offrons, donc cela fidélise les clients », explique Bruno Duthoit, directeur général en charge d'Orange Polska. Objectif : 1 million de clients d'ici trois ans. Orange touche une commission sur chacun d'eux et à chaque fois que ceux-ci souscrivent un nouveau service bancaire.

L'opérateur ira-t-il jusqu'à se transformer en banque ? On n'en est pas là, mais l'hypothèse n'est pas exclue, les accords signés avec mBank prévoyant qu'à terme Orange puisse lui racheter les clients.

Si Orange a choisi la Pologne et ses 38 millions d'habitants, c'est aussi pour la souplesse de sa régulation. Très compétitif et doté d'une clientèle férue de technologie et très réactive aux prix, la Pologne est un excellent marché pilote. Ce n'est pas un hasard si de nombreuses sociétés africaines lancent depuis quelques mois des services de paiement mobile en Europe de l'Est...

Leader du marché

Orange Finance pourrait être développé dans d'autres pays : « On travaille au lancement d'une offre sur le marché français, entre autres, déclare Gervais Pellissier, directeur général délégué d'Orange, en charge des opérations en Europe (hors France). Suivant les marchés, on peut le faire seul ou avec un partenaire avec qui on peut aller jusqu'à envisager un partenariat capitalistique.En France, Orange avait lancé en février 2014 le portefeuille virtuel Orange Cash, basé sur le sans contact, à Caen et à Strasbourg. »

La Pologne est le troisième marché d'Orange, après la France et l'Espagne. Il y a racheté l'opérateur télécoms historique, dont il détient un peu plus de 51 %. Et compte dans le Top 10 des plus importantes entreprises polonaises. Jeudi dernier, Manuel Valls, de passage à Varsovie, a rendu visite aux équipes d'Orange Polska. Le groupe est le leader d'un marché des télécoms à quatre opérateurs, où il fait face à T-Mobile Polska (la filiale de Deutsche Telekom), Polkomtel (CyFrowy Polsat) et Play, le « Free » polonais dont l'arrivé sur le marché avec des tarifs très bas a pesé sur les comptes d'Orange Polska, en recul ces dernières années. Le groupe a supprimé des postes - il totalise 18.000 salariés, contre près de 50.000 au moment de sa privatisation - et a refinancé 700 millions d'euros de dette l'an passé. La concurrence l'a poussé à diversifier ses activités en dehors du téléphone et de l'Internet fixe et mobile. Outre les services bancaires, il offre des solutions informatiques et télécoms aux sociétés depuis quatre ans, et s'est même lancé, comme ses concurrents, dans les services énergétiques ! Profitant de l'ouverture du marché polonais, Orange achète de l'électricité en gros et la revend aux particuliers et aux PME. Déjà, 1.000 clients ont signé et l'objectif est d'en convaincre 10.000 d'ici à la fin de l'année. A terme, l'ensemble de ces activités de diversification a vocation à générer 10 % des revenus, contre 2 % aujourd'hui.