Le logo du Front national lors d'un discours de Marine Le Pen à Lyon, le 29 novembre 2014

Le logo du Front national lors d'un discours de Marine Le Pen à Lyon, le 29 novembre 2014

afp.com/Jeff Pachoud

Les sondages se suivent et se ressemblent: aux élections départementales, le FN devrait arriver en tête. Le dernier en date, une enquête Ifop pour Europe 1 et Le Figaro donne 30% au parti de Marine Le Pen, devant l'UMP-UDI 29%, et le PS 19%.

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Pourtant, la direction du FN se montre extrêmement modeste sur ses chances de conquérir un département. Si la présidente du parti ne cache pas son ambition d'augmenter largement le nombre de conseillers généraux - il n'y en a que deux aujourd'hui - elle déclare, avec une modestie qui ne lui est guère familière, que diriger un conseil départemental serait "la cerise sur le gâteau". En privé, Marine Le Pen assure que le Vaucluse est "peut-être" gagnable. "Pas le reste" des départements que les observateurs considèrent pourtant comme pouvant tomber dans l'escarcellede sa formation politique: l'Aisne, l'Oise ou encore le Var.

Evidemment, un discours aussi humble comporte sa part de tactique. Minimiser ses chances permet d'avoir un ton triomphaliste en cas de victoires. C'est ce qui s'est passé lors des dernières sénatoriales où le FN a gagné deux sénateurs après avoir affiché des objectifs plus modestes. Ceci étant, il y a des raisons objectives, dont le FN a conscience, qui font que le nombre d'élus que pourra avoir le FN ne reflète pas sa popularité dans les sondages.

Le poids du mode de scrutin

Les départementales se déroulent selon un mode de scrutin majoritaire, défavorable au FN. Pour l'emporter, il lui faut gagner plus de la moitié des suffrages exprimés, en cas de duels. Or, pour parvenir au second tour, le seuil a été relevé à 12,5%... des inscrits, et non plus des suffrages exprimés. Ce qui, dans un contexte d'abstention probablement élevée, met la barre très haut. "Dans les zones où l'UMP est fort, nous serons face à face avec l'UMP au second tour. Dans les zones où le PS est fort, nous serons face à face avec le PS", anticipe-t-on au FN.

Mais les duels sont défavorables au FN. Malgré son indéniable popularité, le parti a perdu tous les duels auxquels il participait au cours des élections partielles qui se sont tenues depuis 2012. A l'exception notable de la cantonale partielle à Brignoles (Var) où le FN l'a emporté en octobre 2013 face à l'UMP. Les duels seront d'autant plus difficiles que le PS, très impopulaire, pourrait dans de nombreux cas être disqualifié dès le premier tour. Le report de voix de l'électorat de gauche en faveur du FN, s'il n'est pas nul, est plus faible que celui des sympathisants UMP.

Bien sûr, il est probable que le FN emporte malgré tout des cantons. Mais pour pouvoir espérer diriger un conseil départemental, il lui faudrait gagner la majorité des cantons dans un département. Ce qui, au vu du contexte, relève d'un challenge difficile.

Le poids des sortants

Les élections départementales sont avant tout une élection locale. "Les candidats des autres partis sont plus implantés que les nôtres", reconnaît un cadre dirigeant du FN. Parallèlement à la dynamique nationale, favorable au FN, il existe aussi des logiques locales, comme pour les municipales. Un conseiller général bien implanté a davantage de chances d'être élu. Or, le FN n'a que deux élus sortants. Cet handicap sera toutefois moins lourd cette année pour deux raisons: les candidats se présentent désormais en binômes homme-femme. Automatiquement, il y a donc dans chaque formation de nouveaux visages qui se présentent aux électeurs. De plus, les cantons ont été redessinés et sont deux plus moins nombreux qu'avant. Ce qui accentue la déconnexion entre l'élu sortant et l'électeur.

Par ailleurs, le FN a voulu faire une démonstration de force en investissant des candidats dans la quasi-totalité des cantons. Un tour de force qui l'a obligé à ratisser large. Et à être peu regardant sur la "qualité" de certains candidats. C'est ainsi que sur 151 candidats de 75 ans ou plus, 80 sont au FN, soit plus de la moitié. Certains aussi se sont fait repérer par des dérapages racistes ou homophobes.

Le poids des alliances

Beaucoup d'observateurs le pensent: dans les départements où le FN est fort, le risque est de se retrouver avec un conseil départemental divisé en trois blocs - gauche, droite et FN - de taille à peu près égale. Sans majorité absolue. Dans ce cas, le FN ne peut espérer l'emporter sans alliances. Or, l'UMP a assuré à plusieurs reprises qu'il excluait toute alliance avec le FN. Nicolas Sarkozy a aussi précisé qu'il exclurait tout élu qui accepterait une alliance avec le parti de Marine Le Pen. Reste à savoir si certains, localement, pourraient être tentés par une aventure individuelle qui pourrait leur ouvrir la voie d'un exécutif local.

Le poids des vieilles rancunes

C'est dans le Vaucluse que le FN nourrit le plus d'espoir. Mais dans ce département, ces ambitions pourraient être contrariées par la Ligue du Sud, la micro-formation d'extrême droite de Jacques Bompard, le député-maire d'Orange. Très implantés dans le Nord du département, les Bompard (la femme et le fils se présentent à cette départementale) risquent de monnayer au prix fort leur éventuel soutien à une potentielle majorité frontiste.

>>Lire aussi notre reportage dans le Vaucluse sur la rivalité entre le FN et la Ligue du Sud...

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