Un avion de la Lufthansa à l'aéroport de Munich Franz-Josef-Strauss le 19 mars 2015

Un A-320 de la compagnie low cost GermanWings, filiale de Lufthansa, s'est s'écrasé avec 148 personnes à bord le 24 mars 2015.

afp.com/Christof Stache

Quelle est la part de la défaillance humaine dans les accidents d'avion?

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Lors d'un crash, c'est le couplage homme-machine qui ne fonctionne pas. Il y a en général une panne technique majeure qui place l'équipage en situation de stress. A partir de là, le cockpit n'aide pas nécessairement le pilote à prendre la bonne décision. La panne est donc mal gérée et le crash se produit. Mais il ne faut pas dramatiser, nous n'avons qu'un accident tous les 4 millions de vols, malgré des drames spectaculaires, le voyage aérien n'a jamais été aussi sûr.

Comment aider les pilotes à prendre les bonnes décisions?

Il faut étudier le processus de prise de décision. Notre démarche est très innovante. Nous travaillons en IRM, en laboratoire, en simulateur, mais aussi dans des conditions réelles dans l'avion. Et nous prenons des mesures variées de l'activité du cerveau, des mouvements des yeux, etc.

Nos résultats démontrent que notre cerveau n'est pas le même quand nous sommes stressés. Une personne saine peut avoir des zones cérébrales entières qui s'éteignent, et adopter un comportement pathologique avec une incapacité décisionnelle, une boucle motrice ou encore une incapacité à désengager son attention d'un signal. Nous appelons cela le stress débilitant.

Mais les pilotes ne sont-ils pas habitués à gérer ce genre de situation?

L'atterrissage représente 50% des risques d'accident. Pourtant, il ne constitue qu'un temps infime d'un vol. Au moment de l'atterrissage, le pilote est soumis à plusieurs contraintes. S'il amorce sa descente, remettre les gaz n'est pas une décision facile à prendre. Cela va retarder les passagers, avoir un coût pour la compagnie en termes de carburant et être ressenti comme un échec. Il y a un coût "cognitif" à interrompre un atterrissage. Dans un tel contexte, les personnes qui prennent les meilleures décisions sont celles qui activent l'aire cérébrale de la prise de décision rationnelle. La disposition émotionnelle du pilote compte donc dans sa capacité à prendre la bonne décision.

Quelles sont vos pistes pour améliorer le couplage homme-machine?

Dans certains cas de figure, les pilotes ne perçoivent pas un signal vital. Cela se produit quand la situation est particulièrement tendue et que le pilote se concentre sur une tâche ou sur un problème. C'est le principe d'attention sélective. Dans ce cas, il ne faut pas amplifier le son de l'alarme, qui ne ferait qu'augmenter le niveau de stress. Il faut savoir diminuer le nombre de signaux. Parfois, retirer de l'information permet de mieux gérer les urgences une à une.

Dans d'autres cas de figure, le pilote ne comprend pas immédiatement comment réagir à un signal. Parfois, le temps de réaction est de quelques secondes et un léger retard peut être fatal. Dans ce cas, il vaut mieux montrer sur un écran l'action à faire. Par mimétisme, le pilote va réagir beaucoup plus vite que s'il doit entendre le signal, l'analyser puis décider du geste à faire.

Vos idées vont-elles se développer rapidement?

Nous sommes en contact avec les industriels évidemment. Nous avons déposé des brevets et nous sommes en cours de développement. Mais ce sujet de prise de décision rapide en situation de stress pourrait s'appliquer dans d'autres contextes comme l'armée, les centrales nucléaires ou même en politique ou en économie!

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