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Paris-Roubaix : bienvenue dans l’enfer du Nord!

Avant l’édition 2015 de la classique des pavés, ASO organisait hier, pour la cinquième fois, le « Paris-Roubaix Challenge », une course amateur reprenant une partie du parcours de sa grande sœur. Thomas de Saint Leger a tenté l’immersion… Son récit…

Les amateurs de pavés en action.
Les amateurs de pavés en action. Paris-Roubaix Challenge / Thomas de Sterck
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« Tu fonces au milieu du pavé, les mains sur le guidon en espérant que ça tienne, et voilà, c’est plié en quatre / cinq heures… » A quelques minutes du départ, et devant madame, Aurélien, solide gaillard de Valenciennes, la trentaine, fanfaronne encore… Il est 8 h 30 au Vélodrome de Roubaix, point de départ de la boucle de 140 km qui nous verra emprunter les secteurs les plus emblématiques de Paris – Roubaix. 4 500 fous sont venus mater la « reine des classiques ». Ils viennent majoritairement du Royaume-Uni (1/3 des participants), des Pays-Bas, de Belgique. On retrouve même 3 Afghans, un Letton, un Zimbabwéen. A domicile, les Français sont peu nombreux, autour de 450. Bref, il faudra parler Anglais ou Flamand pour espérer se faire comprendre…

Mais la communication s’avère peu utile une fois la monture enfourchée. A l’exception d’une conversation assez brève avec John, un étudiant Américain vivant à Copenhague et venu pour « se faire plaisir », « right » et « left » seront quasiment les seuls mots entendus pendant la première partie de la course, disputée sous un crachin typique du Nord. Aux maisons de briques rouges de la périphérie roubaisienne succèdent d’interminables champs dégageant une odeur de purin assez peu recommandée au réveil. J’en tombe du vélo sur un rond-point mal négocié. La sanction est légère, quelques égratignures, et ne m’empêche pas de reprendre ma place dans la longue file de coureurs qui se tortille sur les petites routes menant aux premiers pavés.

Le pierrier d’Arenberg

Comme pour un chemin de croix, les secteurs pavés de Paris-Roubaix sont numérotés, de 18 à 2 pour notre périple. Ils sont classés selon la difficulté : 2 étoiles pour les plus simples, jusqu’à 5 pour les plus difficiles. Après 50 bornes, à la faveur d’un virage à droite en forêt, nous faisons connaissance avec les premiers d’entre eux, ceux de la mythique trouée d’Arenberg (5 étoiles). Le terme de « pavé » semble d’ailleurs exagéré pour ces 2 km de traversée puisque nous empruntons en réalité un pierrier humide, sans aucune régularité, franchement dangereux. Une mare de pavés, magique et terrifiante à la fois. A l’arrière, un malheureux vient de prendre une belle « boîte », dans l’indifférence quasi-générale. Les efforts coordonnés des kilomètres dévalés sur le goudron n’ont plus vraiment d’importance ici. Les pavés, c’est l’homme et sa machine contre la route, la notion d’entraide s’estompe. « Paris-Roubaix est une connerie » avait dit Bernard Hinault. Pendant cet interminable rodéo avec les cailloux d’Arenberg, on le rejoint tout de go. En revanche, à la sortie du secteur, devant les camping-cars déjà installés en prévision de la « vraie » course, drapeaux du Lion des Flandres flottant au vent, la sensation est fantastique. Mais il reste encore 90 km, et 17 autres sections pavées, en tout près de 30 km de caillasse.

Pavé saignant

Après Arenberg, les portions 4 étoiles sont presque du billard. On se prend à apprécier le décor : beffrois imposant, terrils et bunkers nous plongent dans l’histoire de la région. La songerie s’interrompt brutalement à la sortie du secteur 13 (Beuvry à Orchies). Le diagnostic est sans appel, crevaison de la roue arrière. C’est le risque quand on préfère emprunter le bas du pavé, moins difficile. Malgré tous les efforts d’un sympathique Mexicain battant pavillon suisse (son maillot est barré d’une croix helvétique), rien à faire, le pneu est touché. Heureusement, la ville d’Orchies est équipée d’un magasin de cycle, situé à 2 km, dans lequel je peux changer l’élément, martyrisé, comme mes doigts, pas vraiment acclimatés au contact du pavé. 45 minutes de perdues dans l’affaire, la lutte pour la 1228e place semble compromise, mais peu importe, c’est aussi ça, Paris-Roubaix.

La petite musique des galériens va d’ailleurs rythmer la fin de parcours. Certains quittent prématurément la course - l’un d’eux s’allume d’ailleurs une cigarette pour fêter ça – d’autres tentent de remettre leur machine sur pied. Au dernier ravitaillement, à 34 km du but, plusieurs courageux portent des stigmates de chute. Tous, ou presque, rallieront finalement le Vélodrome de Roubaix. Après 6 heures sur le vélo, une bonne heure de réparation, et malgré un chat noir croisé juste avant le difficile secteur du Carrefour de l’Arbre, je m’offre aussi le tour d’honneur devant une foule en liesse d’une centaine de personnes. Ils seront, c’est sûr, beaucoup plus nombreux pour l’arrivée de celui qui brandira aujourd’hui le trophée en forme de pavé du Paris-Roubaix 2015. Pour nous, ce sera seulement une – jolie – médaille et un décrassage bien mérité dans les mythiques douches du Vélodrome, toutes au nom d’un ancien vainqueur. J’ai choisi celle de Frédéric Guesdon, dernier Français titré, pour donner un coup de pouce à Arnaud Démare. Il en aura besoin.

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