L’Union européenne (UE) retient des migrants, principalement originaires d’Afrique et du Moyen-Orient, dans des conditions déplorables et à l’extérieur de ses frontières, en finançant des camps de rétention en Ukraine. C’est ce que révèle une enquête menée par le magazine allemand Der Spiegel et la première chaîne de télévision publique allemande ARD.

Cette enquête est notamment ponctuée par le récit du Somalien Hasan Hirsi, qui raconte avoir “vécu l’enfer” en Ukraine pendant près de cinq ans avant d’atteindre l’Allemagne. Elle donne un éclairage inédit sur le chemin périlleux, dans l’Est, en Ukraine, et peu connu de l’opinion publique que parcourent les réfugiés pour atteindre l’UE, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont retenus dans ces camps.

Sévices

Hasan Hirsi a d’abord séjourné dans le camp de Pavschino, dans l’ouest du pays. Baptisé “le Guantánamo de l’Est” par les migrants, ce camp a fermé définitivement en 2008 sous la pression des protestations d’organisations humanitaires. Hirsi aurait ensuite été transféré à Oujgorod (dans l’extrême ouest de l’Ukraine), le camp de transit de tous les migrants dans la région, où les conditions de séjour ne semblent pas plus enviables.

Des témoignages de migrants révèlent des carences alimentaires, une absence de soins médicaux et des sévices physiques (coups, électrochocs, etc.) de la part des gardes-frontières. Si le gouvernement ukrainien dit n’être au courant d’aucun de ces sévices, l’ONG Human Rights Watch, au contraire, donne crédit à ces témoignages.

Une politique coûteuse

L’article rapporte que Bruxelles a versé 35 millions d’euros à l’Ukraine entre 2000 et 2006, prélevés sur un fonds européen d’aide aux pays ex-soviétiques. Les trois quarts de cette enveloppe sont revenus à des compagnies privées de sécurité. L’UE a également versé 8 millions à l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) afin d’aider les autorités ukrainiennes à construire des camps de rétention pour les migrants. Mais, s’indigne l’auteur de l’enquête, elle ne se préoccupe pas du sort de ces derniers dans ces camps.

D’après le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (UNHCR) le maintien des migrants dans ces camps de rétention est une infraction à la Convention européenne des droits de l’homme. Peu après la publication de l’enquête du Spiegel, Bruxelles a émis une fin de non-recevoir. “L’UE aide l’Ukraine à gérer la migration clandestine et les demandes d’asile dans le respect des meilleures normes européennes en la matière”, a déclaré l’un de ses porte-parole.