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IRAK

L’homme qui dessinait des jihadistes sur des vieilles chaussures

Il est artiste et a récemment décidé de tapisser un mur de sa maison de vieilles chaussures à l’effigie des jihadistes de l’organisation de l'État islamique. Rencontre avec Akeel Khreef, un artiste qui transforme ses peurs en objets d’art.

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Il est artiste et a récemment décidé de tapisser un mur de sa maison de vieilles chaussures à l’effigie des jihadistes de l’organisation de l'État islamique. Rencontre avec Akeel Khreef, un artiste qui transforme ses peurs en objets d’art.

"J’ai utilisé ces chaussures abîmées pour parler du conflit qui la communauté musulmane"

J’ai baptisé mon travail sur les chaussures ‘les visages de Daech’, parce que ce sont les visages répugnants de la barbarie, des assassins qui sèment la mort et la terreur partout où ils vont.

 

Certains médias ont fait le lien entre ce travail et le journaliste irakien qui a jeté sa chaussure sur George W. Bush en 2008 et ont dit qu’il s’agissait d’un geste insultant courant en Irak et dans le monde arabe. En fait, mon travail n’a rien à voir avec ça. Je n’encourage pas du tout ce genre d’action et je peux vous affirmer que cette pratique n’a rien de courant dans mon pays.

 

Je travaille principalement avec des objets que je récupère dans les poubelles et auxquels j’essaye de donner une seconde vie. J’ai utilisé ces chaussures abîmées, récupérées chez des cordonniers du coin, parce que je voulais surtout en faire une métaphore du conflit qui déchire depuis plus de 1000 ans la communauté musulmane de l’intérieur [allusion au conflit entre les deux branches principales de l’islam, le sunnisme et le chiisme]. Si vous portez une chaussure longtemps, vous finissez par l’user, par déformer la semelle. Eh bien ce conflit fratricide et millénaire a complètement déformé l’islam aujourd’hui. Avec ces chaussures, je suis en train de fabriquer un mur qui sera exposé au mois de juillet dans une galerie à Londres.

 

Akeel Khreef se rend chez un cordonnier pour récupérer de vieilles chaussures.

Pour moi, Daech ne signifie pas uniquement un groupe de jihadistes. Les Daech, se sont en fait les dictateurs arabes, les responsables corrompus, les gens qui incitent à la haine entre les communautés, etc.

Ce travail m’a valu quelques menaces sur mon compte Facebook. J’ignore cependant si ces messages proviennent de membres de Daech ou de sympathisants. En tout cas, je ne pense pas que je sois à plaindre, je suis en fait beaucoup mieux loti que les soldats envoyés sur le front ou ces dizaines de femmes et d’enfants qui se font massacrer par les jihadistes.

"Je trouve mes idées dans les poubelles "

Mon travail sur les chaussures a fait couler beaucoup d’encre dernièrement. Pourtant, ce n’est pas le sujet qui me préoccupe le plus. Ce qui m’intéresse en fait, c’est d’évoquer les travers de la société dans laquelle je vis, parler des tracas quotidiens des Irakiens.

 

Chacune de mes œuvres raconte une histoire.

J’ai par exemple transformé ce vélo que j’ai trouvé dans une poubelle en œuvre d’art dans l’espoir de compenser un peu les frustrations de mon enfance. Quand j’étais petit je n’avais pas les moyens de m’en payer un.

 

Les générateurs électriques se sont largement répandu en Irak ces dernières années, dans les commerces, les maisons, les rues. Ces engins provoquent beaucoup de nuisances sonores. J’ai donc transformé ce vieux générateur en quelque chose de confortable, une chaise.

 

Cette fourchette est un modeste travail que j’ai fait après que l’armée irakienne a repris la ville de Tikrit aux combattants de l’EI il y a quelques semaines. J’ai fait le signe de victoire avec ce couvert pour fêter la libération. 

 

Ce travail est une commande du bureau des Nations unies à Bagdad à l’occasion de la journée de la femme. J’ai fabriqué cette chaussure rouge que j’ai couverte d’un préservatif pour dire que le seul droit dont peut jouir la femme dans le monde arabe est d’avoir des relations sexuelles avec son mari.

 

Je travaille actuellement sur une œuvre géante autour de la thématique de la faim qui fera parti d’une exposition collective entièrement dédiée à l’art contemporain, prévue en juillet prochain. C’est la première manifestation du genre en Irak.

Toutes les photos ont été postées sur la page Facebook de Akeel Khreef.

 

Articel rédigé en collaboration avec Djamel Belayachi (@DjamelBelayachi), journaliste à France 24. 

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