Corée du Sud : les confidences d’un suicidé font tomber le Premier ministre
Soupçonné d’avoir reçu des enveloppes d’un homme d’affaires qui s’est pendu le 9 avril, le chef du gouvernement, Lee Wan-koo, vient de proposer sa démission à la présidente Park Geun-hye.
Par Yann Rousseau
Après avoir tenté de se défendre des accusations de corruption faites il y a quelques jours par un homme d’affaires qui était sur le point de se suicider, le Premier ministre sud-coréen, Lee Wan-koo, a finalement présenté, ce mardi, sa démission à la présidente Park Geun-hye. Actuellement en tournée diplomatique en Amérique Latine, la chef de l’Etat devrait accepter formellement ce départ lundi prochain, lorsqu’elle rentrera à Séoul pour chercher un nouveau chef de gouvernement susceptible de redorer l’image de son exécutif malmené depuis deux ans par une série de graves crises politiques.
La suspicion pesant sur le pouvoir risque toutefois de ne pas s’éteindre avec ce changement de leader tant le scandale de corruption, révélé il y a une dizaine de jours, éclabousse des personnalités au coeur du pouvoir. Avant de se pendre le 9 avril dans une forêt proche de Séoul, Sung Wan-jong, un ancien parlementaire devenu hommes d’affaires, avait laissé des notes et la cassette d’une interview réalisée par téléphone avec un journal local, dans lesquelles il expliquait avoir remis, ces dernières années, d’importantes sommes en liquide à au moins huit cadres de la majorité conservatrice actuellement au pouvoir.
Le défunt, qui s’apprêtait à être entendu par la justice pour une affaire de détournement de fonds publics, a notamment assuré qu’il avait illégalement donné, en 2013, 30 millions de wons à Lee Wan-koo qui était, à l’époque, en campagne électorale. S’offusquant de ces révélations, le Premier ministre avait d’abord assuré qu’il connaissait mal l’homme d’affaires, mais sa défense s’est craquelée, ces dernières heures, lorsque les médias sud-coréens ont révélé plusieurs documents prouvant leurs rencontres régulières. Les deux hommes s’étaient notamment téléphoné à 217 reprises sur les douze derniers mois.
D’autres personnalités sous pression
Après sa chute, la pression risque de monter sur les autres personnalités apparaissant dans les listes de Sung Wan-jong. Un ancien directeur de cabinet de la présidente, le gouverneur d’une grande province et des dirigeants du parti au pouvoir, le Saenuri, devraient prochainement être entendus par les enquêteurs qui viennent d’organiser des raids au siège de l’entreprise de l’homme d’affaires disparu ainsi que chez ses principaux collaborateurs.
Cette nouvelle affaire va compliquer la stratégie de reconquête de l’opinion publique tentée par la majorité et Park Geun-hye désormais au plus bas dans les sondages. La population reprochait déjà au pouvoir d’avoir très mal géré le naufrage, il y a un an, du ferry «Sewol», dans lequel 304 personnes – essentiellement des enfants – ont perdu la vie. L’étendue de cette défiance vis-à-vis du Saenuri pourrait être mesurée dès le 29 avril dans le cadre de quatre législatives partielles organisées dans le pays.