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El Niño revient chambouler les perspectives de récoltes agricoles

•Le risque météo, potentiellement ravageur, pourrait faire son retour pour la première fois depuis 2010.•Du Brésil à l'Australie, les grands pays producteurs de la planète sont en alerte.

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Par Muryel Jacque

Publié le 3 juin 2015 à 01:01

Beaucoup l'avaient prédit pour 2014, mais il ne s'est jamais concrétisé. El Niño, le phénomène climatique à même d'inonder une partie du globe tandis qu'il assèche l'autre, revient sur le devant de la scène. Et avec lui, la spéculation autour des risques encourus pour les récoltes à travers le monde. Et leur impact sur les prix des matières premières.

L'Australie, l'un des premiers pays concernés par l'événement, a donné l'alerte fin mai, emboîtant le pas aux Etats-Unis et au Japon. Ses services météorologiques ont annoncé que les conditions du retour d'El Niño - le premier depuis cinq ans - étaient présentes. Cette anomalie causée par le réchauffement des eaux du Pacifique peut modifier radicalement le temps dans de nombreuses régions. Et, selon ses experts, il y a environ 90 % de chances que ces conditions se maintiennent cet été dans l'hémisphère Nord et 80 % qu'elles s'installent jusqu'à la fin de l'année.

Plus destructeur qu'utile

« Dans certains cas comme en Californie, qui pourrait recevoir des pluies tant attendues, les températures élevées de l'océan sont bienvenues. Toutefois, la constance avec laquelle les températures augmentent ne suffit pas pour modifier les périodes de végétation, le phénomène est donc généralement plutôt destructeur qu'utile pour les cultures. Et il pourrait perturber le marché alimentaire mondial », commente Jodie Gunzberg, la responsable monde matières premières chez S & P Dow Jones Indices. Les prix des matières premières ont en effet historiquement tendance à monter dans l'année qui suit le phénomène. C'est la conclusion d'un document de travail publié récemment par le Fonds monétaire international (FMI), qui a étudié l'impact sur 21 pays ou régions du globe entre 1979 et 2013. Des pressions inflationnistes à court terme qui devraient être prises en compte dans l'élaboration des politiques macroéconomiques, suggèrent les économistes.

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Les premiers impacts d'El Niño sont attendus dans les semaines qui viennent. Le temps pourrait être plus sec aussi en Australie, cinquième producteur de blé de la planète, et en Inde, où la production de canne à sucre pourrait souffrir. Les analystes prévoient déjà que la récolte de café sera moins importante au Vietnam. La prochaine période de floraison, stade critique pour le développement de la plante, a lieu cet été chez le premier producteur mondial d'arabica, à l'exact moment où El Niño pourrait apporter un temps nettement plus sec. Le café indonésien sera certainement touché, tout autant que les plantations d'huile de palme.

L'intensité et la durée d'El Niño s'avèrent cependant difficiles à évaluer, tout comme les véritables effets sur l'agriculture car tout dépend du moment où il apparaît. Pour l'heure, le Brésil estime que l'événement sera modéré et se produira d'ici à la fin de l'année. Les pluies seront certainement plus abondantes qu'à l'accoutumée sur le centre-ouest du pays, principale région productrice de soja. Un plus pour la récolte.

Des milliers de morts, des milliards de dégâts

Les deux derniers épisodes, les plus spectaculaires jamais observés, en 1982-1983 et en 1997-1998, ont fait des milliers de morts et causé des milliards de dollars de dégâts économiques. Cette fois-ci, El Niño pourrait avoir des conséquences dramatiques au Sahel, où la sécheresse sévit déjà. Interrogé par « The Guardian », un expert du Met Office Hadley Centre, l'un des grands centres de recherche sur le climat dans le monde, affirme que les conditions dans la région sont semblables à celles de 1972, lorsque l'absence prolongée de pluies avait entraîné une famine tuant 1 million de personnes.

L'agriculture n'est pas le seul secteur à être potentiellement affecté. El Niño peut aussi perturber l'activité minière. « En particulier, les mines de zinc et de cuivre au Pérou et au Chili sont sous la menace des inondations ou des problèmes de transport, ce qui entraîne souvent des hausses de prix », souligne Caroline Bain, économiste chez Capital Economics. Au vu des stocks mondiaux déjà restreints de zinc, toute rupture d'approvisionnement s'avérerait critique pour le marché.

Muryel Jacque

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