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Les géants japonais de l'électronique se reconvertissent dans la santé

Malmenés sur leurs métiers traditionnels, les groupes nippons cherchent à se réinventer dans le médical.

Par Yann Rousseau

Publié le 11 juin 2015 à 01:01

Dans le quartier de Roppongi, au pied du siège de Fujifilm, une boutique retrace l'histoire du groupe japonais qui s'est imposé, dès les années 1970, en géant mondial de la pellicule couleur, avant d'inventer en 1986 l'appareil photo jetable et de développer, dix ans plus tard, l'un des premiers appareils numériques. Mais, très vite, passé les vitrines présentant de vieux Caméscope, le visiteur se retrouve dans un magasin de produits de beauté, vantant les vertus régénérantes des crèmes de la marque Astalift, développées par le groupe et commercialisées en Asie.

« S'adapter ou mourir »

« C'est le même métier, souffle Kana Matsumoto, une cadre de la société. Pendant des décennies nous avons développé des solutions contre l'oxydation des films photo qui efface les couleurs. C'est ce même travail de contrôle de l'oxydation que nous faisons avec la peau humaine », explique-t-elle, avant de rappeler que Fujifilm s'est construit dès l'origine sur une compétence de chimiste qui lui permet aujourd'hui de se rêver en acteur mondial de la pharmacie. C'est l'un des médicaments de sa filiale Toyama Chemical, l'Avigan, qui a été utilisé, cette année, sur les malades du virus Ebola.

Chez Fujifilm, l'accélération du redéploiement dans les métiers de la santé et des soins est une priorité de la direction, qui a vu caler dans les années 2000, comme nombre de ses homologues nippons, ses moteurs de croissance traditionnels. Les ventes de pellicules représentaient encore 19 % des revenus de Fujifilm en 2001... mais moins de 1 % sur l'exercice fiscal qui s'est achevé en mars dernier. « Il s'agit de s'adapter ou de mourir », estime aujourd'hui dans un livre Shigetaka Komori, le PDG du groupe qui rappelle que Kodak, son concurrent historique, est mort de son immobilité en 2012.

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Pour les géants de l'électronique grand public Sony, Panasonic ou encore Toshiba, c'est l'apparition du numérique puis des smartphones et l'arrivée de producteurs coréens et chinois d'écrans plats ou de lecteurs DVD bon marché qui a contraint les états-majors à trouver des créneaux plus porteurs. « En 2012, à son arrivée à la tête du groupe, Kazuo Hirai a décidé que Sony devait considérablement accélérer son expansion dans le secteur du médical où nous étions déjà un peu présents », se souvient Shinji Obana, l'un des porte-parole du groupe.

La société, qui promet de quadrupler ses ventes sur le segment du médical pour atteindre 200 milliards de yens (1,5 milliard d'euros) à l'horizon 2020, mise sur sa maîtrise de l'image pour conforter sa présence dans les hôpitaux. Déjà numéro un mondial sur le marché des imprimantes médicales, elle compte parmi les leaders dans les moniteurs de salles d'opération ou les périphériques pour les systèmes d'échographie. Sony doit présenter cette année un endoscope ultra-performant développé avec Olympus, leader mondial de ce marché, dans le cadre d'une coentreprise fondée en 2013. Dans son grand showroom de Tokyo, le groupe expose ses dernières solutions d'imagerie 4K pour les blocs opératoires. « Quand on ouvre un corps, il n'y a que du rose, du rouge et du blanc. Il faut des images extrêmement précises permettant au médecin de distinguer les différentes teintes », explique Shinji Obana.

Migration des chercheurs

Pariant sur cette même reconversion, Toshiba a déplacé ses chercheurs spécialisés dans les téléviseurs vers sa division santé, où 3.800 ingénieurs développent moniteurs, scanners et IRM. Le groupe vise 1.000 milliards de yens (7,3 milliards d'euros) de ventes sur le segment du médical à l'horizon 2017. Ce serait le double de sa performance sur le dernier exercice fiscal. Pour grandir plus vite, Toshiba ne s'interdit pas des acquisitions.

Depuis 2006, Fujifilm s'est, lui, déjà offert une douzaine d'entreprises, notamment aux Etats-Unis et en Allemagne, dans la pharmacie et les appareils médicaux. Anticipant la commercialisation rapide de nouveaux médicaments, il espère que la santé lui rapportera 1.000 milliards de yens sur l'année fiscale 2018, contre 394 milliards l'an dernier.

Correspondant à Tokyo Yann Rousseau

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