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Libération
Récit

Relogés dans le XIIIe, les migrants renouent avec la dignité

Migrants, réfugiés... face à l'exodedossier
Vivement critiquées après l'évacuation violente de la Halle Pajol, les autorités tentent de répondre à la problématique d'hébergement des demandeurs d'asile. Depuis peu, le centre du Loiret dans le XIIIe arrondissement de Paris les accueille dans des conditions décentes.
par Hélène Sergent
publié le 20 juin 2015 à 9h57

Accolé aux immeubles en construction du nouveau quartier du XIIIe arrondissement de Paris, le centre d'hébergement de la rue du Loiret a des allures de tour de contrôle. La structure, haute d'une vingtaine d'étages, accueille depuis quinze jours les migrants évacués du campement du métro La Chapelle. Ce vendredi midi, après la venue remarquée de Pascal Brice, le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatride (Ofpra), au jardin d'Eole (XVIIIe), 34 réfugiés ont été redirigés vers ce lieu. Ouvert en décembre 2014 à l'initiative de l'association Aurore, «le Loiret», propose des solutions d'hébergement aux couples, familles et personnes isolés. «A l'origine, il n'y avait que 30 personnes mais avec la période hivernale, nous avons augmenté nos capacités d'accueil», détaille Caliskan Bahattin, le directeur du centre. Aujourd'hui, 222 personnes vivent ici. Parmi elles, 76 ont fuit le Soudan, l'Erythrée, la Centrafrique, le Tchad ou encore l'Ethiopie. Quelques «Chibanis» expulsés d'un hôtel insalubre du XIe arrondissement ont également trouvé refuge au centre.

«Tous dans la même galère»

Idriss, la vingtaine, en bras de chemise, est Soudanais. Resté quelques semaines au campement du métro La Chapelle, il ne cache pas son soulagement : «Nous avons un toit, des repas chauds tous les jours, tout ce qu'il faut. Ici on est bien.» Le hall d'accueil de l'immeuble ressemble davantage à un hall de résidence qu'à un centre d'hébergement d'urgence. Installés à trois ou quatre dans des studettes d'une trentaine de mètres carrés, les migrants disposent d'un badge électronique pour leur permettre de sécuriser l'accès aux chambres. Au premier étage, une salle de jeu pour les enfants (le centre en compte 33), une salle télé et une laverie sont à disposition des résidents. «Certains réfugiés n'avaient pas lavé leurs vêtements depuis leur départ de leur pays d'origine», se désole Myriam, assistante sociale du «Loiret». La diversité des profils des habitants ne nuit en rien à la cohabitation : «Depuis qu'ils sont là, nous n'avons eu aucun problème. De toute façon, ils sont tous dans la galère», analyse Nadir, l'un des agents d'accueil. Chargé des repas, de l'aménagement des chambres, le jeune homme sert régulièrement de traducteur pour faire le lien entre l'équipe dirigeante et les migrants.

Durée indeterminée

Les consignes transmises à Caliskan Bahattin sont claires : tant que les situations et demandes d'asile des 76 migrants hébergés dans son centre ne sont pas examinées, aucun ne devrait retourner à la rue. «Nous essayons de travailler en collaboration avec les autorités de l'Ofii [Office français de l'immigration et de l'intégration, ndlr] pour accélérer les choses. Parmi les premiers arrivés chez nous, 27 ont déjà été reçus par l'Ofii et 26 ont obtenu une domiciliation avec l'aide de l'association France Terre d'asile», détaille le directeur du Loiret. Les nouveaux venus, expulsés des Jardins d'Eole, devraient bénéficier des mêmes dispositions dès la semaine prochaine. Pour assurer l'accueil et l'accompagnement de ses 222 résidents, Caliskan Bahattin a dû faire appel à deux employés supplémentaires et envisage d'embaucher une personne supplémentaire pour épauler les trois travailleurs sociaux déjà présents. A l'évocation du campement, non démantelé, de la gare d'Austerlitz, le directeur, ancien de la Croix-Rouge française, se montre pragmatique : «On peut monter jusqu'à 235 places. Si on nous appelle et que la fuite d'eau qui endommage certaines de mes chambres libres est réparée, on devrait pouvoir tenir.»

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