Ces métiers qui redoutent la concurrence de La Poste
L’entreprise publique diversifie ses activités pour faire face à la baisse du courrier. Des initiatives que les acteurs en place ne voient pas d’un bon œil.
Par Lionel Steinmann
La stratégie de diversification des activités menée par La Poste ne lui vaut pas que des amis. Confrontée à une baisse régulière du volume de courrier (– 5,8 % l’an dernier), l’entreprise publique s’efforce depuis plusieurs années de développer des « nouveaux services », dont la plupart ont vocation à être assurés par les facteurs dans le cadre de leur tournée, et qui doivent générer de nouveaux revenus. Objectif : générer 200 millions d’euros de chiffre d’affaires à l’horizon 2020. Visite à domicile des personnes jugées fragiles, livraison des courses alimentaires, portage de médicaments... La Poste lance ses filets tous azimuts. Et doit faire face, sur certaines de ces initiatives, à l’opposition plus ou moins virulente des acteurs déjà en place, qui voient d’un très mauvais œil un mastodonte du service public lorgner leurs plates-bandes.
Posture compréhensive
La perspective de voir des facteurs réaliser des « prédiagnostics » thermiques financés par des collectivités locales pour préparer le terrain à des travaux de rénovation thermique, par exemple, ne plaît pas du tout aux architectes.
La Fédération des entreprises du recyclage (Federec) a, de son côté, saisi l’Autorité de la concurrence face à l’activité de collecte de papier lancé par La Poste. Même réaction crispée du côté des experts en assurance, face à ses velléités de faire intervenir des facteurs sur certains constats de sinistres.
Face à cela, l’entreprise publique affiche une posture compréhensive. « La Poste est une grande entreprise publique. Il n’est pas anormal qu’elle suscite des inquiétudes ou des interrogations chez certains acteurs lorsqu’elle se lance dans un secteur où elle n’est pas attendue, explique Marc-André Feffer, directeur général adjoint chargé de la stratégie de développement. C’est à nous d’apaiser ces craintes, en expliquant que nous sommes dans une perspective de développement du marché, en nous positionnant comme acteur complémentaire et non comme un concurrent. »
Anticipation
Le dirigeant explique également que le groupe ne se servira pas de sa taille pour faire du dumping : « Tous ces projets sont conçus en interne dans le cadre d’une concurrence normale, loyale. »
Autre stratégie pour désamorcer les critiques, l’anticipation. « Dans certains cas, nous proposons très en amont aux acteurs en place de travailler avec eux, avance Marc-André Feffer. C’est ce que nous avons fait avec le secteur de l’économie sociale et solidaire, en signant en octobre 2014 un accord pour trouver une façon de collaborer selon les filières. » La Poste prépare en effet un certain nombre de services à destination des seniors, un secteur auquel croît beaucoup Philippe Wahl, le PDG, mais où sont déjà présentes de nombreuses associations. Venir leur faire de l’ombre ne serait pas une bonne publicité pour l’entreprise publique.
A noter :
Plusieurs syndicats appellent ce mardi à la grève dans les services financiers de la Poste pour protester contre les réorganisations.
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