Apple ne peut décemment pas laisser ses grands concurrents Google, Tesla et General Motors prendre une longueur d'avance dans la voiture connectée. Après avoir échoué à racheter Tesla, le groupe de Cupertino n'a pas d'autres choix que de se lancer lui-même dans la bataille.

Et peu importe si la voiture n'entre pas, a priori, dans son champ de compétences. Apple veut être aux premières loges de tous les changements de mode de vie induits par les nouvelles technologies. Pas question qu'un nouvel usage se généralise sans que la marque à la pomme n'en soit à l'origine ou n'en profite. L'iPod, l'iPhone et l'iPad ont déjà révolutionné la société. La montre connectée Apple Watch, aux résultats mitigés à la fois en termes de ventes et de retours utilisateurs, n'a pas pris un bon départ mais compte se rattraper dès septembre, avec la sortie de la deuxième version.

La voiture connectée, électrique et sans conducteur, porte elle aussi la promesse d'une révolution. Celle des modes de déplacements et des objets connectés. Condamné à innover pour satisfaire l'appétit des marchés et rassurer ses investisseurs, Apple se met en ordre de bataille depuis quelques mois.

Si bien que ses initiatives passent de moins inaperçues. Voici quelques indices.

De plus en plus de recrutements dans l'automobile et la robotique

D'après l'agence Bloomberg, Apple a prévu de sortir sa première voiture en 2020. Mais travaille sur le sujet depuis au moins l'an dernier. Le groupe disposerait déjà d'une équipe de plusieurs centaines de personnes, dont certains cadors de l'industrie des batteries électriques et de la robotique.

Ces nouvelles recrues travaillent au sein du projet dit "Titan", le nom de code pour l'Apple Car ou iCar. Selon le Financial Times, il consisterait en la mise au point d'un véhicule électrique et autonome ressemblant à un monospace. Parmi eux : des employés de Tesla, qui nourrit de grandes ambitions dans le domaine, mais aussi le responsable de la recherche-développement de Mercedes-Benz dans la Silicon Valley, ou encore des chercheurs européens et américains.

Cette semaine, le géant de la tech a débauché une nouvelle pointure : Doug Betts. L'ancien directeur de la qualité chez Fiat Chrysler entre 2007 et 2014, également passé chez Nissan et Toyota, n'a pas précisé la nature de son poste, seulement qu'il rejoint Apple pour des "opérations"... Mais ce mystère prend de plus en plus l'allure d'un secret de polichinelle.

Une usine géante à Cork en Irlande ?

Mi-mai, le site Business Insider relevait l'expansion rapide d'Apple en Irlande, pays qui accueille le siège européen de nombreuses entreprises high tech américaines. Et de pointer du doigt les nombreux recrutements, qui ont tous un point commun : une expérience dans l'industrie de l'automobile, la robotique et/ou l'aéronautique.

La stratégie semble avoir été pensée de longue date. Car Apple a aussi investi 300 millions d'euros en 2013 dans son usine de Cork, et prévoirait d'accroître encore sa capacité, selon The Irish Independant. L'objectif : construire une nouvelle usine géante à côté de l'usine existante. Apple n'a pas confirmé, mais jamais infirmé non plus...

CarPlay, le début des interactions mobile/voiture

"Un projet d'Apple dans l'automobile aurait du sens étant donné que la voiture devient une extension naturelle de la maison connectée et de l'écosystème mobile". Quoi qu'il en soit, Apple se positionne. La société de Tim Cook a dévoilé l'an dernier un nouveau logiciel, baptisé CarPlay. "Un moyen plus intelligent, plus sûr et plus ludique d'utiliser l'iPhone en voiture », indique la marque.

Le système permet de récupérer le contenu et les services de l'iPhone (à partir du modèle 5) sur l'écran de l'autoradio. Ce qui facilite l'action du conducteur pour répondre à ses appels, dicter des textos, accéder à ses cartes de navigation et consulter ses playlists de chansons. Grâce à un microphone externe, la commande vocale Siri permet de piloter le "divertissement embarqué" avec la voix.

Un conflit avec A123 Systems, fabriquant de batteries

Fin mai, le site Venture Beat rapportait qu'Apple s'apprêterait à transiger à l'amiable avec l'entreprise A123 Systems, spécialisée dans les batteries électriques pour les transports.

Le contentieux porte le recrutement supposé déloyal d'ingénieurs d'A123 Systems par Apple aux alentours de juin 2014. L'entreprise reproche au géant californien d'avoir mené une "campagne de recrutement agressive" portant sur plusieurs employés.

Parmi eux, Apple a surtout débauché Mujeeb Ijaz, le directeur technique d'A123 Systems, pourtant payé 294.000 dollars par mois. Il développait des batteries électriques pour la Formule 1.  "Tous avaient accès à des informations propriétaires et confidentielles d'A123, et Apple a l'intention de devenir un concurrent d'A123", affirmait le groupe dans sa plainte.

Sous la pression des marchés

Aujourd'hui, la firme de Cupertino, malgré des excellents résultats financiers, inquiète quelque peu ses investisseurs. Sa trop grande dépendance à l'iPhone, qui représente 67% de son chiffre d'affaires, ne passe pas inaperçue. L'absence de chiffres sur les ventes de l'Apple Watch, annoncée comme la prochaine grande disruption, laisse penser que la firme tente de gagner du temps et mise sur une explosion tardive des ventes, notamment au moment des fêtes de fin d'année.

Si Apple arrivait à créer puis à imposer sa voiture connectée comme il a su le faire avec l'iPhone, cela représenterait une véritable mine d'or, et un relais certain de croissance. Mais l'automobile requiert des expériences et des savoir-faire très divers. Et les marges y sont bien moins importantes que dans l'informatique.

Si bien que les experts de la Bank of America estiment "très improbable" qu'Apple construise lui-même sa voiture connectée de A à Z, alors que le groupe a pris l'habitude de sous-traiter la fabrication de ses produits. Certains analystes américains prévoient donc un rapprochement à venir entre Apple et un constructeur automobile établi, pourquoi pas en Chine. Un nouvel indice à guetter...

Sylvain Rolland

23 Juill 2015, 7:00

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