L’industrie alimentaire toujours championne de la malbouffe auprès des enfants

En Allemagne, 15% des enfants sont en surpoids, et 6% sont obèses. [Cory Doctorow/Flickr]

L’engagement volontaire pris par l’industrie alimentaire européenne en 2007 à ne plus promouvoir les aliments trop gras ou trop sucrés auprès des enfants n’a pas été respecté, selon un rapport de Foodwatch. Un article d’EURACTIV Allemagne.

Huit ans après leurs promesses de faire le ménage dans les publicités alimentaires destinées aux plus jeunes, les  grandes entreprises alimentaires européennes sont loin d’avoir rempli le contrat, conclut une étude réalisée par l’ONG Foodwatch.

En 2007, ces entreprises s’étaient pourtant engagées, dans une « EU Pledge » [promesse de l’UE] à « changer leur publicité destinée aux enfants », notamment en ne faisant la promotion des produits alimentaires auprès d’enfants de moins de 12 ans que si ces produits remplissaient des critères nutritionnels spécifiques.

Pourtant, à ce jour, les producteurs continuent à faire de publicité pour des produits alimentaires malsains. Foodwatch a analysé 281 produits fabriqués par des industriels allemands ayant signé la « promesse européenne », dont Kellogg’s, Ferrero, Danone, Nestlé et Coca-Cola. L’étude affirme que seuls 29 de ces produits devraient être promus auprès des enfants selon les critères de l’OMS pour un régime nutritionnel équilibré.

« Belles paroles »

« Avec ses belles paroles, l’industrie alimentaire s’est placée en première ligne de la lutte contre l’obésité et la malnutrition, alors que parallèlement elle continue à promouvoir des tonnes de bonbons et de nourriture malsaine, surtout auprès des enfants. C’est une triste stratégie de relations publiques », a commenté Oliver Huizinga, analyste chez Foodwatch.

Parmi les entreprises examinées, McDonald’s et Nestlé s’en sortent relativement bien. Près d’un tiers des produits que la chaine de fast-food promeut auprès des enfants respectent les critères nutritionnels de l’OMS. Dans le cas de Nestlé, 11 des 42 produits testés remplissent ces critères. Coca-Cola et PepsiCo sont de moins bons élèves. Aucune de ces deux sociétés ne commercialise de produits pouvant être qualifiés de sains selon le classement de l’OMS. 

Une promesse non tenue

L’étude montre que l’industrie alimentaire n’est pas efficace, affirment l’association allemande contre le diabète (DDG) et Deutsche Diabetes-Hilfe, une organisation allemande de soutien aux diabétiques. Les limites nutritionnelles que se sont auto-imposés ces entreprises étaient trop laxistes. Les céréales pour les enfants, par exemple, peuvent contenir jusqu’à 30 % de sucre, alors que l’OMS recommande une quantité maximum de sucre de 15 %. Alors que même les chips remplissent les critères de la promesse européenne, commentent les experts.

>> Lire : Le diabète gagne du terrain au Royaume-Uni

L’engagement volontaire de la part des industriels promettait bel et bien l’arrêt de la publicité traditionnelle adressée aux enfants, mais l’utilisation de personnages de bandes dessinées sur les paquets est toujours autorisée.

Selon les experts médicaux, la limite d’âge fixée à 12 ans par les industriels est par ailleurs trop basse. Ils recommandent de l’élever à 16 ans. De grandes sociétés comme Dr. Oetker, Haribo, Bahlsen, Ehrmann et Hipp n’ont même pas signé la promesse. « La stratégie d’autolimitation volontaire, d’information et d’éducation a échoué », a estimé Dietrich Garlichs, directeur général de la DDG.

Une interdiction totale est l’unique solution

En Europe, les enfants vivent dans un environnement qui encourage les gens à manger peu sain et à ne pas faire trop d’exercice, un environnement saturé de fast-food et de sodas, selon Dietrich Garlichs. Un régime équilibré est la clé d’une vie saine. Des études montrent en effet que la plupart des enfants en surpoids le restent lorsqu’ils deviennent adultes.

>> Lire : L’Europe confrontée à une épidémie d’obésité d’ici 2030

L’obésité est l’une des principales causes de maladies non contagieuses, ce qui inclut les maladies cardiovasculaires, les cancers, et le diabète. En Allemagne, plus de six millions de personnes souffrent de diabète. Depuis 1998, ce nombre a augmenté de 38 %.

Les spécialistes de la santé et Foodwatch appellent à une interdiction totale de faire de la publicité pour des produits considérés comme malsains selon les nouveaux critères de l’OMS. Parmi ces produits se trouvent le chocolat, les barres énergétiques, les viennoiseries, les jus de fruits, les boissons énergétiques et la glace.

Au printemps 2015, l’OMS/Europe a publié un modèle permettant aux gouvernements de classer les aliments dans la catégorie des produits sains ou malsains selon des critères unifiés et de mettre en place une interdiction de la publicité selon les résultats obtenus.

Pour Stefanie Gerlach, de Deutschen Diabetes-Hilfe, c’est une opportunité pour toute l’Europe. « Dans l’UE, seuls quatre pays, dont l’Irlande et le Royaume-Uni, ont à ce jour introduit des mesures spécifiques qui respectent les nouvelles normes de l’OMS », a déclaré Stefanie Gerlach.

En Allemagne, 15 % des enfants sont en surpoids et 6 % obèses. Ces enfants ont de plus grandes chances que les autres d'avoir du diabète, des problèmes d'articulation, une pression sanguine trop élevée et des accidents ou maladies cardiovasculaires. La proportion d'enfants en surpoids a doublé depuis les années 1980. Au niveau européen, un enfant sur trois est en surpoids.

En juillet 2013, les ministres de la Santé de l'UE ont adopté la déclaration de Vienne sur la nutrition et les maladies non contagieuses dans le cadre de l'initiative Santé 2020 de l'OMS. Cette déclaration encourage notamment la réduction de la publicité d'aliments non sains destinés aux enfants. Les ministres de la Santé ont donné à l'OMS la mission de créer un modèle de profilage des nutriments. Ce modèle est un outil efficace pour les gouvernements afin d’établir des mesures juridiques liées au marketing destiné aux enfants.

Le modèle de l’OMS part du principe que les produits qui contiennent plus d’un gramme d’acide gras trans pour cent grammes ne doivent pas faire l’objet de publicité. Par ailleurs, les produits qui tirent 5 % de leur valeur énergétique totale de l’alcool, les produits de base de catégorie 1 (chocolat et confiserie, barres énergétiques, nappages et desserts), de catégorie 2 (gâteaux, bonbons et viennoiseries), de catégorie 4 (jus de fruits, boissons énergétiques) et de catégorie 5 (glaces) ne doivent pas être promus.

En général, les produits de la catégorie 13 (viande fraiche ou surgelée, volaille, poisson, œufs) et de la catégorie 15 (fruits et légumes frais et surgelés et légumineux) devraient toujours faire l’objet de publicités. Les aliments des catégories restantes peuvent seulement être promus si la quantité maximale de nutriments essentiels ou d’énergie nutritionnelle pour 100 grammes n’est pas dépassée.

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