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Jean-Michel Jarre : histoire d’une imposture

Plus mégalo que jamais, il réécrit à la première personne l’épopée des musiques électroniques sur son nouvel album.

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Publié le 21 octobre 2015 à 14h16, modifié le 23 octobre 2015 à 08h36

Temps de Lecture 2 min.

Pochette de l'album de Jean-Michel Jarre,

Difficile de nier la légitimité de pionnier de Jean-Michel Jarre, son habileté médiatique, son efficacité d’entrepreneur, aux spectacles grandioses et aux millions de disques vendus, son intelligence politique aussi – il préside, depuis 2013, la Cisac (Confédération internationale des sociétés d’auteurs et compositeurs). Il n’en va pas de même pour sa crédibilité artistique, longtemps contestée, mais que le créateur d’Oxygène (1976) s’attache aujourd’hui à réhabiliter.

Charité bien ordonnée commençant par soi-même, son nouvel album, Electronica 1 : The Time Machine, le place rien de moins qu’au centre d’une épopée des musiques électroniques, qu’il incarne ici en une série de duos avec plusieurs générations d’artistes « electro », apparaissant comme autant d’adoubements ou de signes d’allégeance.

Cette « machine à remonter le temps » ne réécrirait-elle pas quelque peu l’histoire ? Car loin de figurer comme exemples d’innovations inspirantes, les ritournelles synthétiques du Monsieur ont souvent suscité des moues circonspectes, dans les années 1980 et 1990, devant leur lyrisme pour générique télé, leur mégalomanie et leur futurisme d’images d’Epinal.

Au fil des interviews livrées lors de son marathon promotionnel, Jarre cite à l’envi sa collaboration, de 1968 à 1972, avec le Groupe de recherches musicales de Pierre Schaeffer. Cependant, c’est sa rouerie de producteur, parolier et compositeur de la variété française du début des années 1970 (au sein de laquelle il sut se montrer parfois brillant, avec Christophe ou Patrick Juvet), plus que sa radicalité expérimentale, qui semble avoir dessiné son répertoire robotique.

Une collection de mièvreries

Avant, pendant et après les débuts phonographiques de Jean-Michel Jarre, nombreux ont été ceux à mieux rêver, émouvoir et danser que lui. De l’onirisme spatial de Tangerine Dream (Alpha Centauri, en 1971) au minimalisme ironique de Kraftwerk (opérationnel dès 1974), de la magie de Brian Eno à la verve synth-pop de Depeche Mode, Human League ou New Order, sans oublier les défoulements physiques et charnels des générations house et techno.

Ce décalage est à nouveau perceptible sur les collaborations qui ponctuent Electronica, censées valoriser l’aura du fringant sexagénaire. Les meilleurs morceaux du disque portent la patte des invités plus que de leur hôte, qu’il s’agisse du romantisme exacerbé de M83 (Glory), de l’élégance de Air (Close Your Eyes), voire de la sombre mélancolie de Moby (Suns Have Gone).

Le reste oscille entre pop anodine (If..!, avec Little Boots) et ratage intégral (Travelator avec le guitariste des Who, Pete Townshend – pourtant auteur en 1971 d’une intro synthétique d’anthologie dans Baba O’Riley). En complément, une collection de mièvreries pour manèges d’hier (Automatic Pt. 1 avec Vince Clarke, l’ancien Depeche Mode) et EDM d’aujourd’hui (Stardust avec Armin Van Buuren), capables même de ringardiser Massive Attack (Watching You) ou Laurie Anderson (Rely on Me), ne dissipent pas le sentiment général : l’histoire qui nous est ici contée est moins celle d’un genre musical que d’une imposture.

Electronica, 1 CD Columbia/Sony Music. jeanmicheljarre.com et www.sonymusic.fr

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