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Les 32 heures, la meilleure arme contre le chômage

La pensée dominante impose l’idée que le chômage de masse est la conséquence inéluctable de gains de productivité effrénés. Et qu’il ne resterait donc plus qu’à se partager des petits boulots précaires. Et si on réfléchissait plutôt à la baisse du temps de travail ?

Le chômage de masse s’incruste et la timide reprise ne suffira pas à le faire reculer significativement. Selon l’OFCE, le taux de chômage ne commencerait à baisser qu’en 2016, pour « descendre » à 9,4 % fin 2017. Sans les politiques d’austérité, on aurait pu éviter de casser la reprise qui s’amorçait en 2011 et recommencer plus tôt à créer des emplois. Mais cela aurait été de toute manière hors de propor tion avec un « stock » de chômeurs de plus de 5 millions de personnes. La croissance aide, mais à la marge. C’est pourquoi il faut remettre sur le tapis l’idée de réduction de la durée du travail, comme le fait la CGT en avançant la perspective des 32 heures. Certes, cela ne s’est pas très bien passé la dernière fois, avec l’intensification et l’annualisation du travail, mais le passage aux 35 heures a quand même entraîné la plus grande création d’emplois depuis le début du XXe siècle. Et quand on voit à quel point les 35 heures ont provoqué la fureur de la droite et du patronat (sans même parler de Macron), on se dit qu’après tout, ce n’était pas une si mauvaise idée.

FAIRE CROIRE QUE LE PLEIN EMPLOI EST ILLUSOIRE

Plus sérieusement, il faut se demander quelles sont les causes profondes du chômage et commencer par balayer cette idée simple, présentée comme une évidence : les gains de productivité seraient tellement énormes que la perspective d’un retour au plein-emploi serait une illusion. Dès lors, il ne resterait plus qu’à « faire avec ». Dans la version néolibérale, la conclusion est claire : mieux vaut un petit boulot, précaire et mal payé, que pas d’emploi du tout. Donc soyez employables (rentables) et on vous donnera les emplois que vous méritez. Dans l’autre camp, les adieux au plein-emploi conduisent à dire : puisqu’il n’y aura plus d’emplois, exigeons un revenu, universel, garanti, citoyen, etc. Et pourtant cette idée selon laquelle le chômage est causé par les gains de productivité est fausse. Il suffit de regarder le graphique cidessous : depuis 60 ans, les gains de productivité ralentissent, alors que le taux de chômage monte presque tout le temps.

Il y a aujourd’hui plus de chômage que pendant les Trente Glorieuses (avant 1975) et beaucoup moins de gains de productivité. Il faut donc remplacer cette idée fausse par une autre, qui peut paraître iconoclaste : seule la baisse du temps de travail permet vraiment de créer des emplois. Démonstration : de 1950 à aujourd’hui, le nombre total d’heures de travail dans l’ensemble de l’économie a évolué dans une plage étroite, de plus ou moins 5 %. Bref ce « volume de travail » est à peu près constant. Dans le même temps, les effectifs employés ont augmenté de 40 %, et la durée du travail a baissé de 27 %.
Autrement dit, l’emploi dépend de la manière dont le volume global de travail se répartit entre créations d’emplois et baisse de la durée du travail. À volume de travail à peu près constant, une réduction insuffisante de la durée du travail conduit à des créations d’emplois insuffisantes et donc au chômage. L’envers du décor de la montée du chômage, c’est la répartition des revenus. On peut démontrer rigoureusement que chômage et dividendes sont les deux faces d’une triste médaille. Pour résumer : ce que les patrons économisent en ne créant pas suffisamment d’emplois, ils le reversent aux actionnaires plutôt que d’investir. La création d’emplois par la baisse de la durée du travail implique donc une autre baisse : celle des dividendes. Même si on est convaincu par cette démonstration (trop) rapide, on peut considérer que le rapport de forces n’est pas favorable pour un tel projet, mais une chose est sûre : pour dépasser l’horizon du chômage, il faut renouer avec un projet de réduction générale du temps de travail.


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