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Fin d’année préoccupante pour l’état de l’Europe

Crise de la dette, crise des réfugiés, menace terroriste… L’Europe, et plus particulièrement la France, fait face à une série de défis plus graves les uns que les autres.

Publié le 29 novembre 2015 à 01h36, modifié le 29 novembre 2015 à 17h38 Temps de Lecture 4 min.

Le premier ministre, Manuel Valls, parle au président de la République, François Hollande, le 18 novembre pendant un meeting avec les maires de France.

Si les attentats du 11-Septembre, aux Etats-Unis, sont arrivés comme un coup de tonnerre dans un ciel bleu, ceux du 13 novembre à Paris, en revanche, interviennent dans un paysage déjà très assombri par de multiples crises. En quinze ans, non seulement les tensions géopolitiques se sont exacerbées, mais l’Europe, et particulièrement la France, sont maintenant confrontées à une série de défis plus graves les uns que les autres. En cette fin d’année 2015, tous les voyants sont au rouge.

  • L’abîme de la dette

Depuis cinq ans, les pays de la zone euro de l’Union européenne (UE) se débattent dans la crise de la dette souveraine, conséquence de la crise financière. L’échec ultime, qu’aurait constitué l’éclatement de la zone euro, a pu être évité, mais la gestion du drame grec a cruellement révélé les faiblesses structurelles de l’UE, ainsi que le déséquilibre entre la France et l’Allemagne. Ces faiblesses sont loin d’être surmontées.

  • Une crise des réfugiés insoluble

C’est dans cette Union, fragilisée par l’euroscepticisme, qu’éclate la crise des réfugiés. Ce problème, en réalité, enfle depuis deux ans, mais dans la plupart des capitales européennes, on a fait mine de l’ignorer. Car il résulte de la guerre en Syrie et de l’anarchie en Libye, pour lesquelles personne n’a de solution. Lorsque les réfugiés se noient par milliers en Méditerranée en essayant d’atteindre l’Europe cette année, il est déjà trop tard pour s’organiser rationnellement. En octobre 2014, 23 000 personnes ont traversé la Méditerranée clandestinement ; en octobre 2015, ce chiffre a été presque multiplié par dix : 220 000. L’UE n’est pas équipée institutionnellement, n’a ni politique d’immigration commune, ni droit d’asile commun. L’Allemagne, courageusement mais sans consulter ses partenaires, leur ouvre ses portes, tout en demandant une solidarité européenne, et c’est le chaos.

Ce chaos nourrit deux dynamiques négatives : la montée des mouvements populistes anti-immigration et la formation d’un front du refus en Europe centrale que le changement de majorité en Pologne, dirigée par la droite nationaliste depuis la mi-novembre, contribue à fédérer. Un vrai fossé sur les valeurs commence à apparaître. Parallèlement, la chancelière Merkel s’inquiète de la déstabilisation possible des Balkans. Elle a raison de tirer le signal d’alarme ; pour cette région ultra-sensible, la pression migratoire est encore plus difficile à gérer.

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  • Une menace terroriste au paroxysme

Avec les attaques terroristes djihadistes du 13 novembre contre la France, pour la deuxième fois en dix mois, les deux crises les plus graves, migratoire et terroriste, se rejoignent, lorsqu’il est établi que deux des auteurs présumés des attentats ont emprunté la route des réfugiés. Cette fois, le lien est fait. A son tour, la France invoque la solidarité européenne, en s’appuyant sur l’article 42.7 du Traité de Lisbonne, pour obtenir de l’aide dans la lutte contre l’organisation Etat islamique (EI). Son appel rencontre à peu près autant de succès que celui de l’Allemagne pour l’accueil des réfugiés.

Là aussi, les failles de l’UE sont béantes : une politique étrangère et de défense commune inconsistante, pas de moyens de renseignement communs, pas de protection commune des frontières extérieures de l’Union. Tous ces domaines relèvent de la prérogative des Etats membres. Pour se protéger, qui des migrants, qui des terroristes, les pays européens rétablissent leurs frontières intra-européennes les uns après les autres. Schengen se meurt. La vertueuse Suède, le pays d’Europe qui a accueilli le plus de réfugiés par rapport à sa population, ferme la porte.

Sollicitée, attaquée, divisée, mal outillée, l’Europe peut-elle compter sur l’allié américain ? En théorie et en rhétorique, oui. Mais aux Etats-Unis, la campagne électorale est lancée et les candidats républicains à la présidentielle de 2016 touchent les bas-fonds de la démagogie et du populisme. Donald Trump, qui ne devait être qu’un feu de paille, s’est installé dans le débat. Les gouverneurs de plus de la moitié des Etats américains prennent prétexte des attentats de Paris pour refuser tout accueil de réfugiés syriens.

Le Président de la République François Hollande à l'Elysée le 14 novembre 2015.
  • Un jeu diplomatique complexe en Syrie

Les Américains, certes, dirigent la coalition qui mène des frappes aériennes contre l’EI en Syrie et en Irak. Après les attentats du 13 novembre, François Hollande tente de convaincre le président Obama d’élargir la coalition à la Russie. Peine perdue : la méfiance entre Washington et Moscou est trop forte. Vladimir Poutine a fait spectaculairement rentrer la Russie dans le jeu diplomatico-militaire au Moyen-Orient, mais il reste Vladimir Poutine. L’habileté avec laquelle il a rompu son isolement international n’a pas effacé les effets désastreux de la crise ukrainienne.

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Avec la Russie, le nombre de puissances étrangères ou régionales militairement engagées en Syrie et en Irak – chacune défendant des intérêts différents –, commence à provoquer de sérieux encombrements. Le 24 novembre, la Turquie abat un avion de chasse russe et fait monter la tension d’un cran. Au centre du jeu aussi bien dans la crise des réfugiés que dans la crise syrienne, le président Erdogan est un interlocuteur difficile pour les Européens – au moins autant que le président Poutine.

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Quant à la France, elle n’est pas non plus au mieux de sa forme, en état d’urgence, avec un taux de chômage quasi-invincible, une classe politique impopulaire, un Front national florissant, un phénomène de radicalisation meurtrier dans une frange de la population musulmane et, maintenant, un système antiterroriste dont l’efficacité laisse sérieusement à désirer.

Au total, cela donne un tableau de bord qui clignote de tous ses feux. La gravité de la situation ne doit pas empêcher l’Europe de tenter de reprendre le contrôle, au contraire. Mais elle n’a plus une minute à perdre.

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