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Brésil : la procédure de destitution pousse un peu plus Dilma Rousseff vers la sortie

La présidente brésilienne, soupçonnée d’avoir maquillé les comptes publics deux années de suite, est sur la sellette.

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La présidente brésilienne pourrait être destituée prochainement.

Par Thierry Ogier

Publié le 2 déc. 2015 à 23:05

« Impeachment ». Le mot d’ordre exprimé par les manifestants, qui sont descendus dans la rue à plusieurs reprises pour exiger la destitution de la présidente brésilienne, est désormais officiellement sur la table du Parlement. Une demande déposée par trois juristes, dont un ancien membre fondateur du parti des travailleurs (PT) de Dilma Rousseff, a été validée par le président de la Chambre des députés, Eduardo Cunha. Motif: la présidente aurait maquillé les comptes publics en 2014 et 2015 dans le but de minimiser l’ampleur de la crise économique. La procédure de destitution, complexe et en plusieurs étapes, rappelle celle qui a visé en 1992 Fernando Collor de Mello. Elle ouvre un nouveau chapitre dans la crise politique qui secoue le pays depuis des mois. Une crise aggravée par des scandales de corruption et une profonde récession. Et dont l’issue est incertaine.

Euphorie des marchés financiers

Dans l’immédiat, pourtant, les marchés financiers ont réagi avec euphorie à la perspective d’un éventuel changement à la tête de l’Etat. La bourse de São Paulo rebondissait de plus de 4% à mi-séance, et le dollar cédait plus de 1% par rapport au real brésilien. « Les règles du marché ne sont pas très cartésiennes », estime Jaques Wagner, le bras droit de Dilma Rousseff à la présidence.

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Sur le front politique, la riposte contre cette procédure de destitution n’a pas tardé. Flanquée d’une dizaine de ministres au palais du Planalto, Dilma Rousseff a réagi « avec indignation » à l’initiative d’Eduardo Cunha, lui-même soupçonné de corruption dans l’affaire Petrobras (la compagnie pétrolière publique au centre du scandale). En outre, la procédure n’est pas certaine d’aboutir. « L’opposition n’aura pas assez de voix [ deux tiers de la Chambre basse, puis du Sénat NDLR] pour mener la procédure à son terme », estime Luiz Felipe de Alencastro, politologue, qui mise sur une résolution rapide de la crise.

Le poids de l’opinion

Toujours est-il que la cote de popularité de Dilma Rousseff n’est que de 10% (!), et que la pression de la rue pourrait s’accentuer (certains rassemblements pro- « impeachment » improvisés ont déjà eu lieu mercredi soir). Le grand débat sur la corruption, qui a connu de nouveaux développements avec l’incarcération récente du sénateur du PT Delcidio de Amaral, risque en outre d’éclabousser le pouvoir. « Delcidio », lâché par le PT, pourrait à son tour décider de « se mettre à table » en échange d’une remise de peine, et faire de nouvelles révélations embarrassantes.

Autre hypothèse, évoquée par le politologue David Fleischer à Brasilia : le PT pourrait pousser « Dilma » à la démission, pour le bien du parti, « un peu comme Nixon en août 1974 », explique-t-il. Toutefois, les proches de la présidente soulignent qu’elle n’est pas du genre à démissionner. En cas de crise prolongée, en tout cas, la paralysie législative et le coup d’arrêt prévisible aux investissements devraient encore nuire à une économie déjà plongée dans une récession durable. Et pour couronner le tout, la crise de l’ « impeachment » se déroule sous les yeux des experts de Standard & Poor’s, actuellement en visite à Brasilia ...

Une crise sans précédent. Le président de la Chambre des députés du Brésil, Eduardo Cunha, a lancé mercredi une procédure de destitution contre la présidente de gauche Dilma Rousseff basée sur des accusations de maquillage des comptes de l'Etat en 2014 et 2015. Cette décision va plonger le Brésil dans une gravissime crise politique susceptible de paralyser de longs mois le géant d'Amérique latine, déjà embourbé dans une profonde récession économique et ébranlé par le gigantesque scandale de corruption autour du groupe pétrolier étatique Petrobras.

Eduardo Cunha, farouche adversaire de la présidente Rousseff a annoncé sa décision en conférence de presse après plusieurs mois de suspense, alors qu'il est lui-même accusé de corruption dans l'affaire Petrobras et menacé de perdre son poste. "Cela veut dire autoriser l'ouverture (de la procédure), non pas en juger du bien-fondé, ce qui reviendra à la commission spéciale (de la chambre basse) qui pourra l'accepter ou le rejeter", a-t-il déclaré.

Une commission spéciale sera constituée

Une Commission spéciale de députés représentative des forces en présence à la chambre basse du parlement va devoir à présent être constituée. Elle aura ensuite un délai de 15 sessions parlementaires pour voter un rapport préconisant la destitution ou non de la présidente.

Ce rapport sera ensuite inscrit à l'ordre du jour de l'assemblée plénière des députés qui devront voter l'éventuelle mise en accusation de la présidente. Deux tiers des voix des députés, soit 342 sur 513, seraient nécessaires pour que le processus se poursuive. En cas de mise en accusation, Dilma Rousseff serait écartée provisoirement de ses fonctions pendant un maximum de 180 jours. C'est au Sénat qu'il reviendra de la juger en session plénière dirigée par le président du Tribunal suprême.

Un "geste délicat"

Deux tiers des voix des Sénateurs (54 sur 81) seraient requis pour destituer immédiatement la présidente, faute de quoi elle réassumerait immédiatement ses fonctions. "Je ne fais pas ça de gaieté de coeur, je sais que c'est un geste délicat à un moment où le pays traverse une situation difficile", a ajouté Eduardo Cunha.

Ce député évangélique ultra-conservateur est membre du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB, centre), principal allié parlementaire du Parti des travailleurs (PT, gauche) de la président Rousseff au sein de la coalition au pouvoir. Mais il a pris depuis des mois ses distances à titre personnel vis à vis de la présidente, dont il s'est érigé en principal adversaire.

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Dilma Rousseff a été difficilement réélue en 2014 pour un second mandat. Elle a vu sa popularité s'effondrer à un plancher historique de moins de 10% face à la triple crise politique, économique et morale que traverse le grand pays émergent d'Amérique du sud.

Source AFP

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