Une nouvelle fois, je constate que, pour un grand nombre de nos concitoyens et plusieurs élus, y compris dans mon propre « camp », le nom d’Argenteuil, commune dont je suis le premier magistrat depuis les élections municipales de 2014, évoque la « France qui tombe », le mal-être des quartiers et l’insécurité. De là à en faire le « Molenbeek français », comme je l’ai entendu répéter ces derniers jours… Non ! Je m’insurge contre ces comparaisons déplacées et injustes.
Argenteuil, la troisième ville d’Ile-de-France, n’est ni un désert économique, ni un repaire du grand banditisme et du terrorisme. C’est une ville de banlieue, où vivent et travaillent des populations, certes en grande partie immigrées, mais nullement concernées par la lutte que mène un islam intégriste.
Je ne veux pas nier la réalité sociale de ma ville – chômage, délinquance, pratiques religieuses parfois radicales – mais des actions sont menées pour faire respecter l’esprit de la République comme celui du service public.
Que nous disent les faits ? Je constate que lors des dernières élections régionales, l’Ile-de-France a été relativement épargnée par la vague Front National. Et cela a un sens : les grandes aires urbaines ont continué à créer de l’emploi au cours des dix dernières années, alors que la France dans son ensemble en détruisait. La banlieue bénéficie de la dynamique des grandes métropoles, la proximité du cœur de réacteur de la production de richesse constitue un atout pour ses habitants.
La banlieue ne peut être considérée comme un ghetto. C’est un territoire de passage où, je peux en témoigner, la capacité à intégrer le monde du travail, comme celui de la formation, existe, où l’accès au savoir est possible. L’ascenseur social peut fonctionner et il n’est pas rare d’y observer un embourgeoisement des populations immigrées.
Le vrai danger est d’enfermer ses habitants dans des politiques communautaristes, comme ce fut souvent le cas, y compris à Argenteuil. Je m’emploie autant qu’il est possible à en effacer les traces, notamment avec la création d’un conseil de la citoyenneté qui, au-delà des représentants des cultes et de l’Etat, est ouvert aux principales administrations et associations de la ville d’Argenteuil.
Repenser l’action à l’égard des territoires
La population de nos villes est souvent plus mobile géographiquement et socialement que ne le sont les habitants de certaines zones rurales. Le déclassement est souvent plus grave dans ce qu’il est convenu d’appeler le rural profond, trop éloigné des zones de production de richesse, que dans nos communes d’Ile-de-France.
Nos territoires de la périphérie parisienne présentent certes des poches de pauvreté, mais il ne faut pas les considérer comme des terres sans espoir, des culs-de-sac de la promotion sociale. Cette vision stigmatisante est la source de graves erreurs dans la conception même des politiques publiques.
L’Etat doit donc repenser son action à l’égard des territoires dans sa globalité. La politique de la Ville conçue avant tout comme une politique de la banlieue a vécu. Elle ne correspond plus à la réalité de notre quotidien. Nous avons besoin, nous, communes pauvres de banlieue, d’un arrimage solide aux territoires en croissance. Notre destin et celui de nos populations sont davantage liés aux potentialités que ces territoires nous offrent sur le plan économique, culturel et éducatif, qu’à un énième plan d’assistance. C’est pour cette raison que j’ai fait le choix qu’Argenteuil intègre, le 1er janvier 2016, la métropole du Grand Paris, qui lui permettra de jouer un rôle majeur dans les années à venir.
Georges Mothron est le maire (Les Républicains) d’Argenteuil (Val-d’Oise)
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