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Le Parlement turc approuve la levée de l’immunité des députés

Le parlement turc a voté un projet de révision constitutionnelle supprimant l’immunité pour les élus visés par des procédures judiciaires. Un préalable à un renforcement des pouvoirs présidentiels.

Par  (avec Marie Jégo)

Publié le 20 mai 2016 à 14h47, modifié le 20 mai 2016 à 20h20

Temps de Lecture 3 min.

Le Parlement turc a engagé, vendredi, l’examen d’un projet de révision constitutionnelle dont le but est de permettre la levée de l’immunité des députés visés par des procédures judiciaires.

Le Parlement turc a largement approuvé vendredi 20 mai un projet de réforme controversé dont le but officiellement affiché est de permettre la levée de l’immunité des députés visés par des procédures judiciaires, mais dont l’objectif sous-jacent est de contribuer à installer un régime présidentiel fort, ainsi que le souhaite l’actuel président turc, Recep Tayyip Erdogan.

Le texte a recueilli 376 voix favorables lors d’un vote à bulletin secret, a annoncé le président du Parlement Ismail Kahraman, soit plus que les deux tiers (367) requis pour une adoption directe. Ce vote ouvre la voie à des poursuites contre 138 députés, dont 50 du Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde).

  • Sur quoi porte la réforme constitutionnelle soumise au Parlement ?

Le projet de révision constitutionnelle, porté par le Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur), au pouvoir, est destiné à lever plus facilement l’immunité des parlementaires dans le collimateur de la justice : il suspend par une clause provisoire l’article 83 de la Constitution qui garantit cette immunité.

La mesure vise 138 parlementaires au total, pour la plupart des élus du Parti de la démocratie des peuples (HDP, gauche prokurde), accusés de collusion avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, interdit en Turquie), en guerre contre Ankara depuis juillet 2015.

Le HDP dénonce une manœuvre de l’AKP qui cherche à l’évincer. L’AKP répond que 27 de ses membres sont concernés par cette mesure.

Avec cette réforme, 50 députés du HDP (sur 59), dont les deux coprésidents du parti, Selahattin Demirtas et Figen Yuksekdag, risquent des poursuites judiciaires.

Discutée depuis des mois, cette levée de l’immunité des députés, soupçonnés de propagande en faveur du « terrorisme » (du PKK), a donné lieu à des pugilats lors de son examen en commission.

  • Quel est le lien entre ce texte sur l’immunité et le souhait de M. Erdogan d’une présidence plus forte ?

Le texte ayant récolté au moins 330 voix en sa faveur, un référendum pourra être convoqué par le président Erdogan. Et ce référendum ne portera pas sur l’immunité seulement. Il pourrait inclure un renforcement des prérogatives présidentielles.

Car M. Erdogan n’a plus qu’une idée en tête : modifier la Constitution pour se tailler un costume présidentiel à sa mesure. Pour y parvenir, il y a deux manières de le faire : soit par un vote du Parlement à une majorité des deux tiers, soit par référendum.

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Or les islamo-conservateurs contrôlent 317 sièges sur 550 : la barre des deux tiers est à 367 ; en revanche, seules 330 voix sont nécessaires au Parlement pour convoquer un référendum constitutionnel.

  • Comment M. Erdogan renforce-t-il ses pouvoirs ?

Depuis son élection au suffrage universel direct en août 2014 (avec près de 52 % des voix), une première en Turquie où le président était jusqu’ici élu par le Parlement, l’homme fort du pays brûle de modifier la Constitution issue du coup d’Etat militaire de 1980.

Il s’agit pour lui de revêtir coûte que coûte l’habit d’un président fort, sans contre-pouvoirs. Et comme la fonction présidentielle telle qu’elle est décrite dans la loi fondamentale en vigueur n’est qu’honorifique, M. Erdogan se sent à l’étroit dans ce rôle.

Rien ne semble pouvoir lui barrer la route. Même la sémantique joue en sa faveur depuis que la presse progouvernementale et les réseaux sociaux le désignent désormais comme « le chef » (reis).

La démission forcée, le 5 mai, du premier ministre Ahmet Davutoglu, qui était aussi le chef de l’AKP, peut être vue comme l’acte I de la marche de M. Erdogan vers le pouvoir absolu. Il est chef de l’exécutif, chef des armées et chef de facto de l’AKP.

Dimanche 22 mai, les délégués de l’AKP se réuniront en congrès pour désigner un nouveau dirigeant. Pour éviter les divisions, ils voteront pour un candidat unique : Binali Yildirim, 61 ans, ministre des transports depuis 2002 et membre du cercle rapproché du président.

Cette candidature unique a été annoncée jeudi 19 mai par un responsable de l’AKP. M. Yildirim devrait se voir confier dans la foulée, par M. Erdogan, la mission de former un nouveau gouvernement, lorsque Ahmet Davutoglu remettra officiellement sa démission.

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