El Niño plonge 60 millions de personnes dans l’insécurité alimentaire

Haile Gerbrselassie, le plus grand coureur de marathon, a averti que le monde risquait de « fermer les yeux sur la détresse » de l’Éthiopie et d’autres pays africains, luttant pour répondre aux conséquences du phénomène El Niño, le plus fort depuis cinquante ans.

L’épisode en lui-même a été résorbé, mais des dizaines de millions de personnes se trouvent en situation d’insécurité alimentaire, le bétail meurt et les enfants sont obligés de quitter leur foyer ou l’école pour mendier suite aux records de sécheresses et aux inondations en Afrique subsaharienne, en Amérique centrale et en Asie.

Haile Gebrselassie a pris la parole en tant qu’ambassadeur d’ActionAid avant la conférence du 19 juillet qui a réuni près de soixante gouvernements pour examiner le versement de fonds après El Niño. Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon était également présent.

« Le monde semble oublier ce qu’il se passe »

Le coureur éthiopien, qui a battu vingt-sept records mondiaux au cours de sa carrière, a déclaré que « l’état de détresse en Éthiopie est important et le monde semble oublier ce qu’il se passe. Des millions de personnes souffrent de la famine après la pire sécheresse depuis cinquante ans.

« Les familles ont désespérément besoin de nourriture. Car les cultures ont été détruites, le bétail a été tué et la qualité de vie de la population a changé de façon dramatique. »

Le sportif a également prévenu que la réaction actuelle du monde serait un indicateur de la façon dont elle gérerait l’avenir, alors que les catastrophes climatiques deviennent de plus en plus courantes.

« Mon pays a fait d’énormes progrès ces dernières années, surtout dans l’accès aux soins médicaux dans les communautés rurales. Mais les populations ont souffert pendant plusieurs mois, surtout les enfants et les femmes enceintes. Si nous ne parvenons pas à fournir davantage d’aides, la souffrance sera bientôt encore plus grande », a-t-il ajouté.

Des conséquences humaines encore en augmentation

Dans l’ensemble, environ 60 millions de personnes souffriraient de la pénurie ou de l’insécurité alimentaire après El Niño. En Éthiopie, il s’agit de la sécheresse la plus dure depuis 50 ans. À présent, 10 millions de personnes dépendent des aides alimentaires et 435 000 enfants ont besoin de traitements immédiats pour malnutrition aiguë.

>> Lire : En Éthiopie, une catastrophe humanitaire au ralenti

Les fonds prévus pour la crise représentent seulement un tiers de ce qui est requis, selon l’ONU. La pénurie alimentaire devrait se poursuivre jusqu’en 2017 en Afrique australe, alors que les populations tentent de restaurer les cultures et le bétail. Ainsi, les conséquences humaines devraient encore se multiplier. La République du Somaliland, le Zimbabwe et le Malawi ont été particulièrement affectés.

Des actes sexuels en échange de nourriture

Parallèlement, un rapport de l’UNICEF et de l’ONG humanitaire World Vision a étudié en détail les effets dévastateurs qu’a eu El Niño sur les enfants dans neuf pays subsahariens.

Avec la malnutrition et l’insécurité alimentaire, le besoin de se nourrir a poussé de nombreux enfants à émigrer, délaissant leur famille et l’école, ou obligé les parents de laisser leurs enfants seuls si longtemps qu’ils deviennent particulièrement vulnérables aux abus.

Les auteurs du rapport ont interrogé des pédiatres et ont analysé des données provenant d’Afrique du Sud, du Lesotho, du Swaziland, d’Angola, du Mozambique, du Malawi, du Zimbabwe, de Zambie et de la République démocratique du Congo.

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La famine représente la plus grande menace pour les enfants, mais l’exploitation et la violence sexuelles viennent en deuxième.

Le rapport a révélé que moins de 50 % des interrogés pensent que la violence ou l’exploitation sexuelles a augmenté depuis août 2015 et le début de l’actuel El Niño.

Près de 80 % d’entre eux sont d’avis que des jeunes filles de moins de 14 ans exécutaient des actes sexuels en échange de nourriture.

Près de 80 % des interrogés ont affirmé que le nombre d’enfants ayant abandonné l’école avait augmenté avec El Niño. Dans une province du Zimbabwe seulement, 6 000 enfants ont arrêté de suivre les cours à cause de la famine ou pour aider leur famille avec le travail domestique ou dans les champs.

Un peu moins de la moitié des interrogés ont déclaré qu’il était à présent d’usage que les parents chassent leurs enfants, âgés de 5 à 14 ans, en raison du manque de nourriture.

 

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