Banque : plus dure sera la seconde vague
L'automatisation a jusqu'ici porté sur des tâches sans valeur ajoutée, mais le développement de l'intelligence artificielle pourrait menacer le conseil.
Par Ninon Renaud
Jusqu'ici, c'est un moindre mal. Comme l'évoque la note d'analyse de France Stratégie, l'automatisation qui a commencé dans les années 1970 dans le secteur bancaire, avec l'introduction des distributeurs de billets automatiques, a moins supprimé des emplois qu'elle n'a profondément transformé les métiers du secteur. D'autant que la banque a profité d'une pyramide des âges favorable qui lui a permis de s'adapter dans le temps sans casse sociale : ses effectifs s'érodent petit à petit depuis 2008.
Les guichetiers qui distribuaient il y a quarante ans les espèces ont certes disparu, mais, au fil de la digitalisation de leurs processus, les acteurs bancaires ont musclé leur offre de services à valeur ajoutée. Alors que la part dans les embauches des chargés d'accueil a chuté de 19,5 % à 14,9 % entre 2013 et 2015, celle des conseillers en patrimoine, des chargés de clientèle entreprises et professionnels, est ainsi passée de 9,3 % à 12,7 %, selon les chiffres de la Fédération bancaire française (FBF). Plus globalement, France Stratégie indique que « 61 % des employés du secteur déclarent occuper un emploi nécessitant une réponse immédiate à une demande extérieure et ne devant pas toujours appliquer des consignes, contre 35 % en 2005 ».
Mais le recul des embauches risque de s'accélérer sous l'effet d'une nouvelle vague de robotisation en cours liée au développement de l'intelligence artificielle. « Cette intelligence vient soutenir les personnes dans leurs actions et projets financiers, son objectif ultime étant de décupler la vitesse de prise de décisions financières, précise Eric Delannoy, président-fondateur du cabinet Tenzing, spécialiste de l'innovation bancaire. Or les banques n'ont d'autre choix, dans le contexte actuel, que de mettre de l'innovation dans la relation client à la fois pour l'enrichir et éviter que d'autres acteurs le fassent. » D'abord poussés par les établissements à traiter eux-mêmes les tâches les plus simples, les clients sont désormais prêts à faire plus. Une étude de MyPrivateBanking Research parue en 2015 estimait que le montant d'actifs gérés par les « robo-advisors » dans le monde devrait passer de 20 milliards de dollars fin 2015 à 420 milliards en 2020 : de quoi donner des sueurs froides aux conseillers patrimoniaux.
Ninon Renaud