Escroquerie en ligne. Les gendarmes rennais en pointe

Par Dimitri Rouchon-Borie

Annonces en ligne, réseaux sociaux, objets connectés : le quotidien a pris le pli de nouvelles habitudes numériques. Elles profitent à une criminalité spécialisée, qui peut être très organisée ou simplement maligne. Les victimes sont les particuliers, mais les escroqueries touchent de plus en plus les entreprises. En face, la réponse judiciaire se prépare. Exemple avec le groupe cybercriminalité de la section de recherches (SR) de Rennes, en pointe au niveau national.

En 2014, les gendarmes de la SR de Rennes ont interpellé deux « brouteurs » en Côte d'Ivoire. L'enquête, pour des faux ordres de virement, est toujours en cours.
En 2014, les gendarmes de la SR de Rennes ont interpellé deux « brouteurs » en Côte d'Ivoire. L'enquête, pour des faux ordres de virement, est toujours en cours. (Photo D.Rouchon-Borie)

Dans le bureau du groupe cybercriminalité, section de recherches de Rennes, une immense carte du monde embrasse un mur, dans un camaïeu de couleurs passées. La mention « URSS », à l'est de l'Europe, suffit à enraciner l'objet dans une tout autre époque. Quand l'objet même du travail des cyberenquêteurs bretons n'existait pas. Un clin d'oeil de l'Histoire à ces gendarmes qui traquent aujourd'hui des bandits dans un univers mettant sans cesse en abime la question de la frontière.

Escroquerie en ligne. Les gendarmes rennais en pointe



La cybercriminalité prospère sur des territoires sans nom. Elle excelle dans la technique distante. Mais elle a quand même besoin des hommes pour faire tourner sa boutique. Et ces hommes habitent dans des pays qui ont chacun leur droit. Le délit n'a pas de règle, mais l'enquête a les siennes.

Filoches à l'étranger


Alors, les enquêteurs partagent leur temps entre le vaste web et le monde des hommes. « Ce qui fait qu'il est inutile d'expertiser un disque dur si l'auteur du délit a laissé ses empreintes digitales sur le clavier... », sourit l'adjudant Romain de Beausse, enquêteur en nouvelles technologies. Avec son collègue, l'adjudant Sébastien Chamaillard, ils sont à la manoeuvre au sein d'une unité régionale qui a défriché, avant beaucoup d'autres, les méandres des enquêtes internationales. Leur expertise est précieuse. Aller interpeller des suspects à l'étranger ? Ça ne se fait pas comme ça. Pas plus que suivre un courrier à travers l'Europe. Ou aller filocher des types louches très très loin de Rennes. Il faut qu'un magistrat délivre une commission rogatoire internationale. Elle est envoyée au pays concerné. Lequel peut mettre « entre trois mois et quatre ans à l'exécuter ». « Il y a parfois des conflits de droit. Les Anglo-Saxons, eux, fonctionnent très différemment. Au Canada, la moindre réquisition, bancaire ou téléphonique, doit être validée par un juge. Il faut lui constituer un dossier à part entière. Il faut aussi s'assurer que le délit, chez nous, existe bien dans le pays que l'on sollicite. »

Loger des mules


Les enquêteurs suivent des pistes en Amérique du Nord. Ils sillonnent aussi les pays Baltes, pour y loger des « mules ». La nature numérique du délit peut leur compliquer la tâche sur place. « Aujourd'hui, nous avons de plus en plus affaire à des individus qui ne se connaissent pas physiquement. On montre une planche photos à un suspect ? Il ne reconnaît personne. Les contacts n'existaient qu'entre des pseudos ». Le nerf de leur guerre : « C'est l'argent ». Les cybercriminels ont d'ailleurs compris depuis longtemps comment tirer profit de notre système. En multipliant le vol de petites sommes plutôt qu'en risquant gros à en convoiter une seule ; si coquette soit-elle. « En prélevant moins de 1.500 euros, la banque prend souvent le problème en charge et il n'y a pas d'enquête judiciaire. Quel magistrat voudrait ouvrir une commission rogatoire internationale pour 100 euros disparus en Côte d'Ivoire ? »
 

Les gendarmes rennais ont trois grandes familles de cybercriminels constamment dans leur viseur. Les escrocs financiers de haut vol, les fraudes à la TVA et les faux ordres de virement, sont souvent le fait d'une « délinquance franco-israélienne spécialisée ». Il y a aussi les arnaques dites « à l'africaine », qui trouvent leur source au Bénin ou en Côte d'Ivoire. Escroquerie à la carte bancaire, « brouteurs », escroquerie à la webcam ou à la petite annonce amoureuse... Et puis, il y a la délinquance mobilisant des équipes d'Europe de l'Est ou même de Russie. Techniques hyper chevronnées pour le piratage, le chiffrage de données, mise au point de virus, logiciels malveillants...

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