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Chasse à l'homme

Allemagne : la police pense avoir arrêté un personnage important de l'Etat islamique

Après deux jours de chasse à l'homme, les forces de l'ordre ont retrouvé le fugitif syrien suspecté d'avoir préparé un attentat. Plusieurs indices leur laissent penser que son rôle pourrait être majeur dans l'organisation terroriste.
par Nathalie Versieux, correspondante à Berlin
publié le 10 octobre 2016 à 11h48

La police allemande a arrêté dans la nuit de dimanche à lundi un Syrien de 22 ans, soupçonné d'appartenir à l'organisation de l'Etat islamique et d'avoir voulu commettre un attentat dans un aéroport du pays. Les enquêteurs sont convaincus d'avoir arrêté un gros poisson, à l'issue d'une chasse à l'homme qui aura duré tout le week-end, en Saxe (ex-RDA). Jaber Albakr avait pu échapper samedi vers 7 heures aux forces de l'ordre qui s'apprêtaient à perquisitionner son logement dans une banlieue résidentielle de Chemnitz. Les forces spéciales, qui ont tiré au moins à une reprise sur le fugitif sans le toucher, ont retrouvé à son domicile «quelques centaines de gramme d'une substance hautement explosive», du TATP selon la presse allemande, une substance utilisée par l'EI notamment lors des attentats de Paris et de Bruxelles.

La cavale de Jaber Albakr s'est terminée à Leipzig. Cherchant un abri, il a abordé un inconnu syrien rencontré à la gare de la capitale économique de la Saxe. Son hôte a finalement appelé la police après avoir découvert qu'il cachait sans le vouloir l'homme le plus recherché d'Allemagne. Les forces spéciales venues l'arrêter ont trouvé le jeune Syrien ligoté selon le magazine Der Spiegel. Il doit être désormais transféré à Karlsruhe, siège du parquet fédéral allemand, compétent pour les affaires de terrorisme. Il devrait s'y voir notifier son inculpation et être écroué. Albakr était sous observation depuis des semaines, à la suite d'un renseignement fourni par un service ami.

Aéroport

Jaber Albakr, 22 ans arrive illégalement de Syrie début 2015. Il se fait enregistrer comme demandeur d'asile à Rosenheim, en Bavière, et se voit attribuer une place dans un foyer d'accueil d'urgence à Leipzig, mais il finit par s'installer chez un compatriote à Chemnitz. L'homme, lui aussi arrêté au cours du week-end, sera également inculpé. «Nous pensons, qu'il s'agit là d'un professionnel», expliquait ce week-end un enquêteur au sujet d'Albakr. La route empruntée par le jeune homme pour arriver en Allemagne serait un indice supplémentaire de son importance au sein de l'EI : Albakr n'a pas emprunté le chemin habituel des réfugiés, via Lesbos ou Leros. «S'il avait emprunté la route des Balkans, nous le saurions», assure un expert sécurité anonyme cité par le quotidien Tagesspiegel.

Selon la presse allemande, le Syrien a été envoyé en Allemagne par Abou Mahammad al-Adnani (le porte-parole de l’EI décédé dans un bombardement, chargé de la propagande et des services de renseignements de l’organisation terroriste) pour y commettre un attentat, sans doute sur un aéroport allemand. L’Allemagne dispose d’informations selon lesquelles l’EI viserait le trafic aérien entre la Turquie et les villes allemandes de Francfort et Düsseldorf.

Pression

Cette suspicion de projet d'attentat relance dans le pays le débat autour d'un contrôle renforcé de l'identité des 890 000 réfugiés arrivés en 2015. Nombre d'entre eux – mais personne ne sait combien exactement – n'ont pas été contrôlés à leur arrivée dans le pays. «Il faut que les services secrets aient accès aux dossiers des demandeurs d'asile», exige le vice-président du groupe parlementaire CDU, Michael Kretschmer. Le directeur de l'administration chargée des réfugiés, BAfM, refuse de livrer ces informations aux enquêteurs, comme l'y autorise la loi.

Mais la pression monte sur le gouvernement allemand, en faveur d'une nouvelle réforme, plus restrictive, du droit d'asile. «Les services de renseignements intérieurs et extérieurs doivent être davantage impliqués dans les interrogatoires et la vérification de l'identité des migrants», exige la CSU, la branche ultraconservatrice et bavaroise du parti d'Angela Merkel.

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