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I-Télé : Morandini à l’antenne, malgré la grève

Les journalistes de la chaîne ont voté la grève, lundi, à une large majorité. Le directeur adjoint de la rédaction, Alexandre Ifi, a annoncé son départ.

Par  et

Publié le 17 octobre 2016 à 10h17, modifié le 18 octobre 2016 à 06h38

Temps de Lecture 4 min.

A 18 heures pile lundi 17 octobre, comme annoncé, Jean-Marc Morandini a fait son apparition sur l’antenne d’i-Télé. Comme si de rien n’était, l’animateur a lancé les sujets de sa tranche d’information quotidienne, dédiée aux médias : la série américaine qui s’inspire des « frasques de Donald Trump », le succès de l’animateur Stéphane Plaza, le débat de la primaire de la droite à la télévision...

Rien sur la grève qui a forcé i-Télé à ne passer que des rediffusions tout au long de la journée. Rien à fortiori sur l’opposition que sa propre arrivée suscite parmi les journalistes de la chaîne, révoltés par le recrutement d’un animateur mis en examen pour corruption de mineurs aggravée.

Départ du rédacteur en chef

Les journalistes s’étaient réunis en assemblée générale, le matin même, et avaient voté la grève, à une large majorité. Celle-ci a commencé à midi, lundi, pour 24 heures et sera éventuellement reconduite par vote mardi.

Malgré cela, l’émission de Jean-Marc Morandini a été lancée, après qu’un premier pilote a été tourné vendredi. Des pigistes avaient été recrutés pour préparer l’émission, lundi après-midi.

Signe de la très forte tension suscitée en interne par l’arrivée de Jean-Marc Morandini, Alexandre Ifi, directeur adjoint de la rédaction, a annoncé son départ pendant l’assemblée générale, déclenchant des applaudissements et des pleurs.

Depuis un an, le journaliste dirigeait dans les faits la rédaction de la chaîne, après le limogeage de Céline Pigalle, en septembre 2015. Celle-ci avait été remplacée par Guillaume Zeller, dont l’arrivée avait généré des inquiétudes ; mais celui-ci est déjà reparti. Alexandre Ifi était un pilier d’i-Télé, où il a travaillé depuis la naissance de la chaîne, en 1999, comme journaliste, correspondant à Berlin, présentateur, chef d’édition…

#JeSoutiensITele

L’affrontement entre la rédaction et la direction s’était poursuivi durant le week-end précédant les débuts de Jean-Marc Morandini, après une semaine marquée par le vote d’une motion de défiance à 92 %, et la publication dans Le Monde d’une tribune dans laquelle la Société des journalistes (SDJ) de i-Télé estimait que l’image de l’animateur, mis en examen en septembre pour « corruption de mineurs » et « corruption de mineurs aggravée », « ne pouvait pas être associée » à celle de la chaîne. « Il est préférable que vous renonciez à votre venue », lui écrivaient les journalistes.

Samedi, le hashtag #JeSoutiensITele a été lancé sur Twitter, devenant rapidement l’un des sujets les plus partagés sur le réseau social, grâce aux messages de nombreux journalistes. En réaction, le groupe Canal+ a lancé un hashtag concurrent, #JeSoutiensLaPrésomptiondInnocence, notamment retweeté par M. Morandini. Celui-ci avait répondu, jeudi, à la tribune de ses « confrères », en leur demandant « de respecter [ses] droits et de [le] laisser travailler. »

« Fermez-la ou barrez-vous »

L’atmosphère s’était envenimée, vendredi, quand le président de Canal+, Jean-Christophe Thiery, avait confirmé aux salariés l’arrivée de M. Morandini, en invoquant « le respect de la parole donnée », « la solidarité avec les collaborateurs du groupe » et « le principe de la présomption d’innocence ».

« Nous sommes prêts à vous laisser la possibilité, en dehors du cadre légal strict, d’exercer, en tant que journaliste, le droit de rupture de votre contrat de travail au titre de l’activation de la clause de conscience », avait aussi annoncé M. Thiery dans un courrier aux journalistes.

Une invitation comprise en interne comme un « fermez-la ou barrez-vous », selon un journaliste. Oralement, quelques jours plus tôt, le directeur de la chaîne, Serge Nedjar, avait déjà lancé aux salariés : « Si vous n’êtes pas contents, vous n’avez qu’à partir… » Autant de propos durement ressentis par une rédaction qui a le sentiment que son point de vue est ignoré, voire méprisé.

Certains annonceurs auraient manifesté leurs réticences

De nombreux journalistes de la chaîne voient l’arrivée de M. Morandini comme une étape supplémentaire dans la prise de contrôle de la chaîne par Vincent Bolloré. De source interne, c’est l’actionnaire principal de Vivendi (maison mère de Canal+) lui-même qui a imposé cette venue et maintient une ligne qualifiée de « jusqu’au-boutiste », au point de susciter de l’incompréhension, chez les journalistes mais aussi au-delà. De plus, certains annonceurs de la chaîne auraient manifesté leurs réticences.

M. Bolloré semble privilégier la fidélité. Il entretient des relations de longue date avec M. Morandini, avec lequel il a collaboré dans sa chaîne Direct 8, dans son quotidien gratuit Direct Matin et au sein du site Jeanmarcmorandini.com, dont le groupe de l’industriel breton a été actionnaire majoritaire. A i-Télé, certains voient en M. Morandini un obligé de M. Bolloré.

Or, le patron de Vivendi n’a jamais caché son intention de faire de la chaîne un média qui puisse valoriser les autres activités du groupe. Son journal Direct Matin fait déjà la part belle aux activités du groupe Bolloré (voitures électriques, batteries, logistique, etc.), sous la houlette de son directeur général, Serge Nedjar, nommé en mai à i-Télé.

Le déménagement de Direct Matin aux côtés des équipes d’i-Télé a d’ailleurs été annoncé. Tout comme le changement de nom d’i-Télé, prévu le 24 octobre, pour donner naissance à CNews. Et marquer le début d’une nouvelle ère.

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