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Denis Mukwege : « Si ma vie a été sauvegardée, c’est pour une cause »

Je ne serais pas arrivé là si… Nous republions l’entretien réalisé en 2016 avec le gynécologue congolais, prix Nobel de la paix 2018, qui a fait de la lutte contre les violences sexuelles le combat de sa vie.

Propos recueillis par 

Publié le 06 novembre 2016 à 07h38, modifié le 07 octobre 2018 à 06h27

Temps de Lecture 10 min.

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Le gynécologue congolais Denis Mukwege à Paris le 24 octobre.

Dans son hôpital de Bukavu, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), plus de 50 000 femmes violées ont été soignées depuis 1999. Toujours menacé dans son pays, le docteur Denis Mukwege a reçu de multiples récompenses – prix Olof Palme et prix des Droits de l’homme des Nations unies (ONU) en 2008, prix Sakharov en 2014. Vendredi 5 octobre 2018, il s’est vu décerner le prix Nobel de la paix. Pour l’occasion, nous republions cet entretien, réalisé en 2016.

Je ne serais pas arrivé là si…

Si je n’étais pas gynécologue-obstétricien et n’avais donc un accès privilégié aux femmes qui me parlent en confiance et peuvent me montrer leurs blessures. C’est à ce titre que j’ai vu et entendu des choses qui dépassent l’entendement. Des souffrances inouïes causées par des viols massifs et organisés, des lésions corporelles souvent irréparables, des traumatismes profonds transmis aux enfants, toutes sortes d’abjections.

Et moi, médecin dans le Kivu, en RDC, je suis donc devenu militant. Impossible de me taire et de me contenter de soigner ces femmes le mieux que je peux. Impossible de ne pas sortir de mon hôpital pour interpeller le monde, saisir toutes les tribunes possibles pour dénoncer ce qui est une arme de guerre au même titre que les autres.

Tout faire pour convaincre les leaders d’éradiquer le viol avec la même détermination que celle mise pour les armes biologiques, chimiques et nucléaires. Parce que le viol détruit tout autant, même s’il laisse les personnes en vie. Parce que c’est un déni d’humanité, un recul des acquis de la civilisation. Et parce qu’il faut tracer une ligne rouge absolue.

N’aviez-vous pas rêvé d’être pédiatre ?

Oh si ! Je me souviens même de ce dimanche de 1963 – j’avais 8 ans – où j’ai accompagné mon père, pasteur, en visite dans une famille dont le petit garçon était gravement malade. Il s’est incliné au-dessus de l’enfant et a déposé quelques gouttes d’huile sur son front tout en récitant une prière. Le petit gémissait et je souffrais avec lui.

Comment imaginer que la seule prière le guérirait ? Pourquoi ne pas lui donner des médicaments comme on m’en administrait quand j’étais mal ? « Je fais ce que je sais faire, m’a dit mon père. Ce sont les médecins qui donnent les médicaments. C’est un métier. » Alors, je serai médecin, ai-je décidé très sérieusement. Et je n’ai jamais dévié de cette résolution.

Mon père continuera de prier, me disais-je, et moi, je donnerai des médicaments. On sera complémentaires. J’ai fait ma médecine générale et une thèse en pédiatrie. J’avais toujours en tête le premier petit malade de mes 8 ans.

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