Menu
Libération
A chaud

Affaire de Tarnac : la justice écarte définitivement la qualification terroriste

Depuis 2008, Julien Coupat est soupçonné d'être l’un des auteurs d’un sabotage contre des lignes SNCF. Retour sur neuf ans de feuilleton judiciaire.
par LIBERATION
publié le 10 janvier 2017 à 14h21
(mis à jour le 10 janvier 2017 à 14h35)

A partir de dégradations de lignes SNCF et d'une enquête sur un groupe anarchiste installé en Corrèze, l'affaire de Tarnac révèle depuis près de neuf ans les errements de la justice et de la police. Baudruche qui «se dégonfle chaque jour un peu plus» pour Libération, fruit d'une «enquête erratique, confuse et lacunaire» selon le Monde, elle est devenue pour son principal protagoniste, Julien Coupat, «l'un des plus grands fiascos de l'antiterrorisme». Ce mardi, la Cour de cassation a définitivement écarté la qualification terroriste pour les poursuites contre Julien Coupat et les autres membres du groupe de Tarnac.

Avril 2008. Une enquête préliminaire est déclenchée sur «les activités clandestines» d'une petite communauté de jeunes gens installés sur le plateau de Millevaches, à Tarnac, en Corrèze : certains d'entre eux gèrent l'épicerie du village, d'autres travaillent à la ferme. Ils sont soupçonnés de faire partie d'un «groupe anarcho-autonome constitué autour de Julien Coupat» selon la note d'un rapport de police.

7 au 8 novembre 2008. Les caténaires d'une ligne de TGV sont sabotées à Dhuisy (Seine-et-Marne), provoquant les retards d'environ 150 trains.

11 novembre 2008. Vingt personnes sont arrêtées à Tarnac, Rouen et Paris.

15 novembre 2008. Le juge Thierry Fragnoli met en examen neuf personnes pour «destructions ou dégradations, et association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme», dont Julien Coupat, diplômé d'école de commerce, et sa compagne Yildune Lévy, étudiante en archéologie. Pour les enquêteurs, le jeune homme, «leader anarcho-autonome», est l'auteur de L'insurrection qui vient, un ouvrage qui fait l'apologie de modes de sabotage propres à «finaliser la chute de l'Etat» et signé du «collectif invisible». Tous deux sont incarcérés.

16 janvier 2009. Remise en liberté sous contrôle judiciaire de Yildune Lévy.

Mai 2009. Remise en liberté sous contrôle judiciaire de Julien Coupat.

Décembre 2009. Tous les contrôles judiciaires sont allégés.

24 mars 2010. Découverte dans la Marne de tubes en PVC ayant pu servir de perches aux saboteurs supposés.

Février 2011. Plainte des avocats du groupe de Tarnac contre des officiers de la sous-direction antiterroriste pour «faux en écritures publiques» pour avoir nié la pose d'une balise sous la voiture de Julien Coupat.

Mars 2011. On découvre que l'épicerie du village avait été placée sur écoute huit mois avant la mise en cause des militants dans les sabotages des lignes TGV, et avant même l'ouverture de l'enquête préliminaire en 2008. Me William Bourdon dépose plainte pour «interception de correspondances» et «atteinte à l'intimité de la vie privée».

Mars 2012. Le juge Thierry Fragnoli est ciblé par une requête en récusation des avocats de Julien Coupat, qui mettent en doute son impartialité en s'appuyant sur ses «émotions» exprimées au journaliste David Dufresne, qui a enquêté sur l'affaire.

4 avril 2012. A sa demande, le juge antiterroriste Thierry Fragnoli est dessaisi de ce dossier, à cause de la «campagne de presse relayant des attaques personnelles» contre lui.

24 octobre 2012. Le Canard enchaîné révèle que la carte bancaire de Yildune Lévy aurait été utilisée à Paris au moment des sabotages de la voie TGV. Pour l'un de ses avocats, «cet élément anéantit la version policière».

14 novembre 2012. Les avocats du groupe de Tarnac font état de nouveaux documents prouvant que la police a falsifié des éléments de l'enquête.

7 mai 2015. Le parquet de Paris requiert le renvoi en correctionnelle de la bande de Tarnac pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste».

Août 2015. Les juges d'instruction renvoient devant le tribunal correctionnel huit personnes, dont quatre pour association de malfaiteurs, mais sans qualification terroriste. Le parquet de Paris fait appel.

28 juin 2016. La cour d'appel confirme l'ordonnance des juges. Le parquet de Paris se pourvoit en cassation.

10 janvier 2017. La Cour de cassation écarte définitivement la qualification terroriste

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique