Tampons hygiéniques : Orianne, 30 ans, miraculée du choc toxique

Santé. Orianne, 30 ans, a frôlé la mort après une septicémie liée aux tampons. Ces syndromes sont en recrudescence selon des scientifiques, même s'ils restent rares. Une étude inédite est en cours.

Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), lundi. Orianne a passé plusieurs jours entre la vie et la mort après un choc toxique.
Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), lundi. Orianne a passé plusieurs jours entre la vie et la mort après un choc toxique. LP/OLIVIER CORSAN

    Elle en parle avec distance et douceur. Sans aucune colère, juste avec l'envie d'aider les femmes. « C'est dans mon tempérament », souffle Orianne, attablée au Comptoir, un restaurant de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), à quelques rues de chez elle. Cette chef de projet culturel de 30 ans commence le récit de son calvaire : d'une simple poussée de fièvre au service de réanimation, entourée par une horde de médecins dépassés. Personne ne comprend alors que cette jeune mère d'une petite fille de 2 ans souffre du syndrome de choc toxique lié aux tampons hygiéniques. Comme elle, de plus en plus de femmes en parfaite santé se retrouvent hospitalisées entre la vie et la mort, parfois amputées en moins de quarante-huit heures.

    L'équipe du professeur Gérard Lina, responsable du centre national de référence des staphylocoques des Hospices civils de Lyon, inquiète par cette recrudescence mystérieuse, a lancé une enquête inédite dont nous publions les premiers résultats.

    « Il n'y avait plus de cas de chocs toxiques dans les années 1990 », rappelle Gérard Lina. De 5 en 2004, on est passé à plus de 20 en 2014 et 19 en 2016. Et déjà 2 à la mi-janvier... Le professeur veut éviter d'autres cas comme celui d'Orianne. Ses douleurs ont commencé un jeudi d'octobre 2014, ses règles venaient alors de se terminer. Dans son lit, Orianne est victime d'hallucinations. Elle a 39,6 °C de fièvre. « Prenez du Doliprane, c'est un symptôme grippal », conclut un médecin. Son compagnon est rassuré. Mais, la nuit suivante, la jeune femme vomit sans cesse, sa gorge brûle, ses forces s'épuisent. Elle rappelle SOS Médecins. « Elle est à 6 de tension », conclut le généraliste, blême.

    Il faut appeler le Samu. Le temps est compté. Son brancard fonce à travers le service des urgences. « J'avais au moins six médecins, infirmières, aides-soignantes autour de moi. Je voyais qu'ils paniquaient », se souvient-elle. Tous regardent, impuissants, son torse devenir rouge vermillon. « Est-ce que je vais mourir ? » demande-t-elle au chef des urgences. « Si vous étiez arrivée deux heures plus tard, vous seriez décédée », répond-il. Avant de partir, sa sœur jumelle a eu le temps de glisser aux urgentistes qu'Orianne venait d'avoir ses règles. Parmi la batterie de tests, ils réalisent un prélèvement vaginal à l'hôpital. Plus une minute à perdre, elle est envoyée en réanimation à Garches (Val-d'Oise). Elle y passera cinq jours, branchée à des machines avec 40 °C de fièvre.

    Orianne reste néanmoins consciente, se rappelle des examens tous les quarts d'heure, des cathéters dans sa gorge pour lui injecter un puissant antibiotique. « Je savais que j'étais proche de la mort. » Elle ne souffre pas, ressent presque une sensation de « bien-être ». Enfin, la fièvre baisse, son pronostic vital n'est plus engagé. Entre-temps, son prélèvement vaginal est envoyé au centre de référence des Hospices civils de Lyon. Le diagnostic tombe : il s'agit d'un choc toxique. Transférée quinze jours au service infectiologie de Garches, Orianne se renseigne sur cette maladie dont elle n'a jamais entendu parler. Ne trouve presque aucune information sur Internet. « On m'a dit qu'un des facteurs du choc toxique était le port prolongé d'un tampon, mais je ne le gardais jamais plus de quatre heures », lance-t-elle.

    Depuis cet épisode, elle n'en a jamais remis. Heureusement, elle n'a pas gardé de séquelles, sauf une inflammation du pancréas, conséquence du puissant cocktail d'antibiotiques qu'on lui a administré. Elle a dû voir un psychologue. « Après huit séances, j'allais mieux. » En mars dernier, elle a même eu un deuxième enfant. « Aujourd'hui, j'ai envie que les femmes sachent ce qu'est un choc toxique. Mettre un tampon n'est pas un geste si anodin. »

    Qu'est ce que le choc toxique ?
    600 tampons en cours d'analyses