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Présidentielle 2017

Pourquoi un PenelopeGate et pas de MarineGate?

Le PenelopeGate, la chute de Fillon, la percée de Hamon, l'indifférence médiatique à ses affaires au Parlement européen, la semaine politique est favorable à Marine Le Pen. De quoi nourrir toutes les inquiétudes en vue de la Présidentielle.

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Marine Le Pen rit

Marine Le Pen

AFP

L’image est épouvantable. Un journaliste du magazine Quotidien, l’émission de Yann Barthès, y est empoigné par des molosses au moment où il s’apprête à poser une question à Marine Le Pen sur l’affaire des emplois fictifs du FN au parlement européen. La violence est palpable. Et insupportable. Le journaliste Paul Laroutourou est écarté de la présidente du Front national, empêché de faire son métier par deux brutes épaisses, puis injurié, menacé, brutalisé.

L’image est accablante pour le Front national et sa candidate, Marine Le Pen. Elle tourne en boucle sur les réseaux sociaux. Et pourtant, il ne se passe rien. Et il ne se passera rien. L’image se perdra dans le bruit médiatique généré par l’affaire Fillon, qui engloutit tout sur son passage, et les célébrations de la montée en puissance de la popularité de Benoît Hamon dans les sondages, l’effet mode du moment.

En ce début de campagne présidentielle, rien ne paraît atteindre Marine Le Pen. Rien.  Ni l’image diffusée et viralisée du journaliste Quotidien. Ni l’affaire des emplois fictifs du Parlement européen, pourtant de nature à générer un tohu-bohu qui devrait être d'importance. La présidente et candidate du FN devait rembourser 300.000 euros, le 31 janvier au soir, dernier délai, à l’institution européenne, accusée qu’elle est d’avoir salarié avec des fonds européens en tant qu’assistante parlementaire une certaine Catherine Griset, entre 2010 et 2016, alors que celle-ci travaillait principalement pour le FN. Ajoutons à ce dossier qu’il est aussi réclamé à la présidente du FN la restitution de 40.000 euros, somme correspondant à l’emploi de son garde du corps comme assistant parlementaire durant quelques mois. Les deux dossiers sont pesants. Mais ils n'émergent pas dans le bruit médiatique.

Question : pourquoi un PenelopeGate et pas de MarineGate? Pourquoi le candidat LR se retrouve-t-il pris dans une tempête qui va jusqu’à menacer sa candidature elle-même, tandis que Marine Le Pen échappe à toute mise en cause politique et médiatique?

Tout se passe comme si les acteurs et observateurs de la vie politico-médiatique avaient pris acte de la mithridatisation de l’électorat du Front national face aux affaires. Et personne ne parait saisir combien le phénomène est préoccupant.  

Des électeurs insensibles aux polémiques

De Jean-Marie à Marine, l’histoire politico-médiatique du Front démontre que ses électeurs sont insensibles aux polémiques touchant leurs champions successifs. Une fois qu’un électeur a basculé dans le vote FN, il devient comme inaccessible à la raison commune. Le tout sous les applaudissements des néo-conservateurs, psalmodiant partout qu’il ne faut pas aller contre le peuple qui va au FN, parce qu’il a de bonnes raisons d’y aller, et qu’il n’y serait jamais allé si les partis de gouvernement, surtout ceux de gauche, ne l’avaient pas abandonné au nom de la ligne sociétale imposée par Terra nova.

Il est donc comma ça, l’électeur de base du Front national. D’un côté, il est scandalisé par le PenelopeGate. Et de l’autre, il demeure sourd aux accusations émanant du Parlement européen, et portant sur des faits susceptibles de faire écho à celles qui accablent aujourd’hui François Fillon. Et il trouve même dans le PenelopeGate matière à juger que décidément, "Tous pourris et compagnie, il n’y a que Marine qui soit honnête". C’est absurde? Oui. Mais c’est ainsi. Le "point de détail" de 1987 n’a pas empêché Jean-Marie Le Pen de recueillir plus de 14% des voix à la Présidentielle de 1988. Et tout le reste à l’avenant…

Etrange spectacle. Tous les médias se précipitent au portillon du PenelopeGate affectant François Fillon afin d’apporter chacun sa petite pierre à l’édifice, et pas un ne paraît songer à se préoccuper de ce que pourrait occasionner un traitement d’ampleur du MarineGate au Parlement européen.  

Dès qu’il s’agit de Fillon, chacun y va de sa révélation, un emploi louche ici, une vidéo antique là, le contrat de travail ici, le témoignage d’un voisin là… Mais s’agissant de Marine Le Pen au Parlement européen, ce qu’elle doit, ce qu’elle a fait, c’est le grand silence blanc…[Challenges.fr a publié en exclusivité l’intégralité des décisions du Parlement européen concernant Marine Le Pen le 26 janvier dernier] Et quand un journaliste de Quotidien se fait malmener par deux imbéciles qui se croient tout permis (ce qui pose un problème démocratique lourd, mais personne ne semble le réaliser) c’est le grand silence de l’indifférence. A quoi bon? De toute façon, les électeurs de Marine Le Pen s’en fichent des affaires de Marine.

Pour un peu, c’est comme si une partie de la sphère médiatique avait fait sienne vis-à-vis du FN la formule de Mitterrand sur le chômage. Il n’y a pas de MarineGate parce que contre le Front national, on a tout essayé. Donc, on ne tente plus rien. A vrai dire, il est aussi possible que l’on n’y pense même plus.  

Le front du deux poids deux mesures

Ainsi Marine Le Pen prospère-t-elle, sur le front du deux poids deux mesures, bénéficiant de l’incroyable bruit médiatique qui accable le candidat Fillon, que l’on présente chaque heure qui passe au bord de l’abdication.

Le paysage médiatique devient politiquement inquiétant. La chute de Fillon à droite. La percée de Hamon par l'extrême gauche. Ce sont les deux sujets de la semaine. Et si on les met en rapport avec l'indifférence dont bénéficie Marine Le Pen, la perception du cours des événements.

Les Républicains sont affublés d’un candidat en chute libre, de fait empêché de prétendre aujourd’hui être élu à l’Elysée. Et quand bien même il serait remplacé, dans les jours ou semaines qui viennent, les chances de tout candidat LR de l'emporter sont aujourd'hui des plus réduites.

Le PS est lesté d’un candidat dont le programme et la personne sont deux machines à faire voter Front national, entre le Revenu universel et la légalisation du cannabis, d’une incarnation régalienne d’une extrême faiblesse et qui ne parle qu’à la gauche de la gauche. Tôt ou tard dans la campagne, le gentil candidat Hamon, nouvel avatar fragile de "président normal", sera rattrapé par Jupiter. C'est inévitable.

Quel serait le vainqueur de mai 2017 si Marine Le Pen se retrouvait face à l’un de ces deux candidats, Fillon ou Hamon, au second tour de l’élection présidentielle? Fillon ou son remplaçant, plombé par le PenelopeGate? Hamon, porté par un programme de gauche de la gauche, poussant des électeurs de la gauche modérée dans l'abstention et détournant de lui les électeurs de la droite qui préféreraient encore Marine Le Pen? A méditer. L'insurrection électorale, ou le "dégagisme", cela peut vite déboucher sur une situation à hauts risques. Faut-il le rappeler ici? La démocratie française, c'est du sérieux.

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