Revenu universel : Hamon plus près de Jésus que de Blum !

La parabole des ouvriers de la onzième heure dans l'Évangile selon Matthieu éclaire d'une lumière christique la proposition de Benoît Hamon. Explications.

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Faut-il payer le même salaire journalier à l'employé de la première heure et celui de la onzième ? Un dilemme évangélique que peut méditer Benoît Hamon.
Faut-il payer le même salaire journalier à l'employé de la première heure et celui de la onzième ? Un dilemme évangélique que peut méditer Benoît Hamon. © CITIZENSIDE/Samuel Boivin

Temps de lecture : 4 min

Il est assez amusant de se replonger dans la Bible de temps à autre. On y puise matière à réflexion tant le texte est riche de paraboles. Nos débats actuels sur le revenu universel, défendu par le candidat Benoît Hamon (et pas seulement lui), y trouvent un écho étonnant quand on se remémore « la parabole des ouvriers de la onzième heure ». Elle se trouve dans l'Évangile selon Matthieu.

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Selon Benoît Hamon, le revenu universel couvrirait les dépenses de subsistance des hommes et des femmes qui seraient à l'avenir privés de travail du fait d'une révolution technologique qui ne créerait pas assez d'emplois pour tous. Si l'on pousse ses projections (déjà prophétisés par l'économiste américain Jeremy Rifkin), l'humanité à l'avenir serait divisée en deux : une classe de travailleurs surdiplômés capables de concevoir des machines intelligentes et une classe d'individus désœuvrés. Tous bénéficieraient d'un revenu universel de subsistance puisque tous ont le droit à la vie, à boire de l'eau potable et à jouir d'un environnement sain, dépollué. Les travailleurs d'un côté, les allocataires de l'autre. Sans que l'on puisse prédire, à ce stade, quelle sera la proportion exacte des uns et des autres.

La pénibilité non récompensée

La parabole des ouvriers de la onzième heure raconte l'histoire d'un maître de maison qui emploie des ouvriers pour sa vigne. Il convient d'un salaire d'un denier par jour pour chacun. « Il sortit à la troisième heure, et il en vit d'autres qui étaient sur la place sans rien faire. Il leur dit : Allez aussi à ma vigne, et je vous donnerai ce qui sera raisonnable », rapporte l'Évangile. Puis, vers la sixième et la neuvième heure, il sortit et vit d'autres ouvriers désœuvrés. Il les embaucha et les envoya à la vigne. Vers la onzième heure, il en embaucha encore quelques-uns...

Quand la nuit tomba, il demanda à son intendant de réunir les ouvriers pour la paie. Ceux qui avaient pris le travail à la onzième heure se virent offrir un denier. Ceux qui avaient travaillé depuis le matin pensèrent qu'ils seraient donc payés bien plus. Mais ils constatèrent, amers, que le maître s'en tient à ce qui avait été convenu : un denier. Soit autant que ceux qui, embauchés tardivement, n'avaient pas travaillé autant qu'eux, n'avaient pas enduré les fortes chaleurs et n'avaient pas le dos cassé par les courbatures... La pénibilité n'était pas récompensée.

La Bible réécrit le Code du travail...

Le maître répondit à l'un d'eux : « Mon ami, je ne te fais pas tort ; n'es-tu pas convenu avec moi d'un denier ? Prends ce qui te revient, et va-t'en. Je veux donner à ce dernier autant qu'à toi. Ne m'est-il pas permis de faire de mon bien ce que je veux ? Où vois-tu de mauvais œil que je sois bon ? »

À travers le temps, cette parabole a été diversement interprétée, souvent avec des implications spirituelles en référence au royaume des cieux. Aujourd'hui, elle n'est pas sans lien avec les débats sur le revenu universel du candidat socialiste. Au fond, la Bible dit qu'il y a, dans la société, deux logiques qui cohabitent sans s'annuler. La logique contractuelle entre un employeur et un employé qui conviennent d'un niveau de rémunération en échange d'un niveau de travail. C'est le maître qui recrute ses premiers ouvriers à un denier par jour. Puis, il y a une logique de prodigalité qui veut que le salaire ne soit pas donné en fonction d'un volume de travail, mais en fonction du besoin de subsister. C'est le denier offert aux ouvriers de la onzième heure. Évidemment, on sort de toute logique marchande ! Bonjour les dégâts : le Code du travail serait à réécrire intégralement...

L'évangile du revenu universel selon saint Benoît Hamon

Benoît Hamon ne dit pas autre chose : un salaire pour les uns, convenu avec l'employeur ; un revenu universel pour les autres afin d'offrir à chacun une vie décente à qui n'aurait pas assez de travail. Cette interprétation n'est d'ailleurs pas « hamonienne » en soi. Au milieu du XIXe siècle, l'écrivain John Ruskin s'intéressa à l'économie. Dans son essai Unto This Last , il professa que le salaire ne devait pas compenser la tâche, mais correspondre aux besoins des ouvriers pour vivre.

Deux logiques à l'œuvre en même temps et a priori contradictoires... Une conjugaison complexe du contrat et de l'assistance. Si l'on pense que le monde de demain est celui du travail rare, l'Évangile selon Matthieu devient un livre guide pour (saint) Benoît Hamon. Mais si François Fillon est le plus chrétien des candidats, alors on y perd totalement son latin...


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Commentaires (51)

  • Orphée 51

    Ne confondons pas tout. Comme tous les textes sacrés, celui-ci obéit à différents champs de cohérence. Celui-ci n'est pas un "code du travail". Il exprime qu'aux yeux du divin, peu importe l'époque de la naissance de la foi en l'homme. Quand on parle du sacré, on ne se situe pas au niveau du langage des hommes.

  • sergio46

    ... Il a eu beau essayer avec des billets de 500 euros, ça ne marche toujours pas !

    Alors il a eu l'idée fabuleuse du revenu universel, il ne lui reste plus qu'à trouver le financement, sinon, il va ruiner à peu près tous les Français !

  • Don Pablo

    Quand j'entends, je lis Hamon je pense non pas à l'Évangile de St Mathieu mais à mes lectures de jeunesse : de chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins, soit le stade ultime du communisme. On a vu ce que cela donnait !