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GABON

Des grévistes molestés par la police sur un site pétrolier au Gabon

Du gaz lacrymogène a été utilisé par les forces de l'ordre pour faire sortir les grévistes de Maurel & Prom de la salle de contrôle où ils se trouvaient, sur le site d'Onal, le jeudi 23 février.
Du gaz lacrymogène a été utilisé par les forces de l'ordre pour faire sortir les grévistes de Maurel & Prom de la salle de contrôle où ils se trouvaient, sur le site d'Onal, le jeudi 23 février.
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Des policiers cagoulés ont délogé de façon musclée les employés grévistes de la société pétrolière française Maurel & Prom sur le site d’Onal, à 150 km au sud-est de Libreville, jeudi 23 février. Une intervention incompréhensible pour les employés, qui assurent se mobiliser simplement pour défendre leurs droits, alors que la société vient de passer sous le contrôle d’un nouvel actionnaire.

Fondée en 1831, Maurel & Prom est une société française spécialisée dans l’extraction et la production d’hydrocarbures, qui opère notamment en Afrique. À la mi-février, elle est passée sous le contrôle de Pertamina, une société pétrolière publique indonésienne, qui détient désormais 72,65 % de son capital.

Mercredi 22 février, les employés de Maurel & Prom au Gabon sont entrés en grève à l’appel de l’Organisation nationale des employés du pétrole (ONEP), le principal syndicat du secteur. Ils estiment que leurs revendications – liées notamment à l’arrivée de Pertamina – n’ont pas été entendues. Les trois sites de la société – Port-Gentil, Onal et Coucal – sont depuis paralysés.

Les employés grévistes du site de Coucal (stockage). Photo publiée sur la page Facebook Onep Gabon.

"Les policiers ont donné des coups de matraque et utilisé du gaz lacrymogène"

David (pseudonyme) travaille sur le site de production d’Onal, où des policiers sont intervenus, jeudi 23 février, pour déloger les grévistes :

Quand la grève a été déclenchée, nous avons fortement diminué la production de barils sur le site. Nous avons seulement laissé quelques puits fonctionner pour que les installations ne se détériorent pas.

Le lendemain, vers 10 h, une cinquantaine de policiers – pour certains cagoulés – sont arrivés sur place. [Un autre témoin parle d’une "trentaine" de policiers, NDLR.] Ils sont entrés dans la salle de contrôle dans laquelle nous étions réunis, en criant : "Sortez ! Sortez !" Ils se sont comportés de manière brutale tout de suite : ils ont donné des coups de matraque et utilisé du gaz lacrymogène. Du coup, tout le monde a dû quitter la salle. Et en sortant, tous ceux qui portaient une combinaison de Maurel & Prom ont été embarqués à bord de camions par les policiers. Ces camions ont roulé un peu, avant de revenir au même endroit.

Les forces de l'ordre sont intervenues pour faire sortir les grévistes de la salle de contrôle. Vidéo diffusée sur les réseaux sociaux.

Nous n’avons pas compris pourquoi des policiers avaient été envoyés sur le site pour nous brutaliser, alors que nous voulons seulement défendre nos droits. Heureusement, il n’y a pas eu d’autres incidents, même si des policiers sont toujours là.

À l'intérieur de la salle de contrôle, lors de l'intervention des policiers.

Photo prise depuis un camion, où des grévistes avaient dû monter, et publiée sur la page Facebook Onep Gabon.

Photo prise depuis un camion, où des grévistes avaient dû monter, et publiée sur la page Facebook Onep Gabon.

Contacté par France 24, le ministère de l’Intérieur gabonais a indiqué que des policiers avaient été envoyés sur place dans la mesure où la production n’avait pas cessé, certes, mais que son niveau avait été jugé bien trop faible, mettant ainsi en péril les équipements du site. Par ailleurs, il a justifié l’emploi de la force en disant que les grévistes avaient refusé de sortir de la salle de contrôle.

"Cela montre que la société Maurel & Prom n’est pas prête à dialoguer"

Sylvain Mayabi Binet est le secrétaire général adjoint de l’ONEP :

C’est Maurel & Prom qui a exigé que des policiers soient envoyés sur place [ce qu’a confirmé le ministère de l’Intérieur à France 24, NDLR]. Cela montre bien que cette société n’est pas disposée à dialoguer avec nous. Du coup, toute la production est désormais à l’arrêt.

Nous souhaitons avant tout que les travailleurs obtiennent un bonus consécutif à la vente des actifs de Maurel & Prom. Les sociétés ayant fait des bénéfices en vendant leurs parts à Pertamina doivent reverser ce qui nous est dû. [Les salariés soulignent que c’est ce qu’ont obtenu les employés de Shell Gabon en janvier dans un contexte similaire, NDLR.]

Par ailleurs, nous avons d'autres revendications depuis plusieurs années. Certains employés n’ont pas eu tous les jours de repos, dont ils auraient dû bénéficier, au regard des arrêtés ministériels en vigueur. Nous exigeons donc le rachat de ces jours de repos, de façon rétroactive. De plus, il faut faire vérifier la situation des travailleurs étrangers : il semblerait que certains n’aient pas l’autorisation individuelle d’emploi délivrée par le ministère du Travail, qu'ils sont pourtant censés avoir pour travailler au Gabon. Si certains ne l'ont pas, il faut les remplacer par des travailleurs gabonais.

Par ailleurs, comme nous ne savons pas ce qui a été négocié avant la prise de contrôle de Pertamina, nous nous inquiétons. Peut-être que des licenciements vont avoir lieu plus tard...

Samedi 25 février, le tribunal de Port-Gentil – saisi par Maurel & Prom – a finalement ordonné la levée de la grève. Mais l’Onep, qui s’estime flouée par cette décision, a décidé de maintenir la mobilisation. Elle a également indiqué qu’elle envisageait d’étendre la grève à l’ensemble du secteur pétrolier au Gabon.

Contacté par France 24, Maurel & Prom a refusé de s’exprimer sur le sujet.

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