Partager
Archéo & paléo

Mal aux dents : Neandertal prenait de l'aspirine

L'analyse des dents d'un fossile de néandertalien révèle des traces de l'administration de plantes médicinales pour lutter contre plusieurs pathologies. 

1 réaction
Nos allergies, un héritage de l'homme de Néandertal

L'homme de Neandertal employait plusieurs substances pour se soigner.

© Martin Meissner/AP/SIPA

TARTRE. La plaque dentaire... Les dentistes veulent, avec raison, nous en débarrasser. Mais ils privent ainsi les paléontologues du futur d'une précieuse mine de renseignements ! En effet le tartre, quand il se forme, piège quelques uns des nombreux micro-organismes abrités dans les voies digestives et aériennes supérieures ainsi que des débris alimentaires. Leur analyse permet de déduire le régime alimentaire et l'état de santé de l'individu ainsi examiné. C'est cette méthode qui a été utilisé par une équipe internationale menée par des scientifiques de l'université d'Adélaïde (Australie) sur quatre fossiles d'hommes de Neandertal.

Les dents de la grotte

Retrouvés en Belgique (grotte de Spy) et en Espagne (site d'El Sidron), ils ont entre 42.000 et 50.000 ans. "L'analyse génétique de l'ADN piégé dans la plaque dentaire, représente une fenêtre unique sur le mode de vie Néandertalien. Elles révèlent de nouveaux détails sur ce qu'ils mangeaient, ce qu'était leur état de santé et comment l'environnement affectait leur comportement" explique Laura Weyrich, principale auteure de l'étude publiée dans la revue Nature

La grotte de El Sidron où douze fossiles de néandertal ont été découverts. Crédit : Paleoanthropology Group MNCN-CSIC; Photo by Antonio Rosas.

Un régime varié et le recours à des traitements 

Pour les chercheurs, la "principale surprise" est venue de l'étude du tartre dentaire d'un jeune adulte néandertalien trouvé dans la grotte d'El Sidron (nord-ouest de l'Espagne). Il souffrait d'un abcès dentaire encore visible sur sa mâchoire. L'analyse de son tartre montre qu'il était aussi affecté par un parasite intestinal (Enterocytozoon bieneusi) qui provoque des diarrhées sévères.

Cet homme malade mangeait du peuplier, dont les bourgeons sont "réputés pour contenir des concentrations élevées d'anti-inflammatoires ou antalgiques, comme notamment la salicine", métabolisée en acide salicylique (aspirine) par notre foie, explique à l'AFP Bastien Llamas, co-auteur de l'étude. L'ADN de la moisissure Penicillium, qui produit naturellement l'antibiotique pénicilline, est également présent dans le tartre, ajoute ce chercheur. "Apparemment, les hommes de Neandertal connaissaient bien les plantes médicinales, leurs propriétés anti-inflammatoires et anti-douleur et semblent s'être automédiqués", déclare Alan Cooper, directeur du Centre Australien pour l'ADN ancien (ACAD) de l'Université d'Adélaïde.

Rhinocéros ou pignons de pain 

L'analyse ADN corrobore une étude parue en 2012 dans la revue Naturwissenschaften qui évoquait la possibilité que l'homme de Neandertal se soit servi de plantes médicinales comme la camomille ou la millefeuille pour se soigner. Elle s'appuyait sur l'analyse chimique du tartre de fossiles de Néandertaliens retrouvés là aussi à El Sidron.

Dans l'étude parue mercredi 8 mars 2017, les scientifiques indiquent également être parvenus à réaliser le séquençage presque complet d'une bactérie très similaire au Methanobrevibacter oralis, qui provoque des parodontites (l'infection de la gencive et du tissu osseux). Vieux de 48.000 ans, il s'agit du plus vieux génome microbien à avoir été décrypté.

Mâchoire supérieur du spécimen d'El Sidron. Crédit : Paleoanthropology Group MNCN-CSIC.

L'étude illustre aussi la diversité des régimes alimentaires de l'homme de Neandertal suivant la région où il vivait et le type de nourriture disponible. En Belgique, les néandertaliens de la grotte Spy mangeaient du rhinocéros laineux et des mouflons, accompagnés de champignons, selon les chercheurs. "Ils vivaient dans un environnement de steppes" et "les gros animaux herbivores représentaient pour eux une source majeure d'aliments", déclare à l'AFP Laura Weyrich.

Plus au sud, les hommes de Néandertal du site d'El Sidron "vivaient dans une forêt dense à l'époque". "Leur régime était largement composé de champignons, de pignons de pain et de mousses, plutôt que de gros gibier", ajoute-t-elle. "Il semble donc que la population belge était chasseuse et cueilleuse, alors que la population espagnole était juste cueilleuse", souligne Bastien Llamas, lui aussi chercheur à l'université d'Adelaïde. L'homme de Neandertal, du genre Homo comme l'homme moderne, est apparu il y a environ 300.000 ans en Eurasie et s'est éteint il y a environ 30.000 ans.

1 réaction 1 réaction
à la une cette semaine

Centre de préférence
de vos alertes infos

Vos préférences ont bien été enregistrées.

Si vous souhaitez modifier vos centres d'intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.

Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?

Je souhaite recevoir toutes les alertes infos de la rédaction de Sciences et Avenir

Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

Santé
Nature
Archéo
Espace
Animaux
Je ne souhaite plus recevoir de notifications