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Législatives : comment la droite pro-Macron veut lâcher LR

Législatives : comment la droite pro-Macron veut lâcher LR

Basculement

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Plusieurs dizaines de candidats LR-UDI aux élections législatives se disent prêts à soutenir la politique d'Emmanuel Macron. Une initiative soigneusement organisée depuis l'élection du nouveau président.

Depuis l’élection d’Emmanuel Macron, c’est peu de dire que la droite est prise entre deux feux. Les Républicains doivent-ils coopérer avec le nouveau président, dont ils partagent peu ou prou le programme économique ? Ou leur place est-elle au contraire dans une opposition frontale ? Parmi les candidats LR-UDI aux élections législatives des 11 et 18 juin, certains ont choisi leur camp et se disent prêts à soutenir le macronisme au pouvoir.

On retrouve dans cette droite Macron-compatible des proches du nouveau ministre de l’Economie Bruno Le Maire, comme les députés sortants Thierry Solère, Franck Riester ou Laure de La Raudière. Mais aussi le député UDI Yves Jégo ou les juppéistes Pierre-Yves Bournazel (candidat à Paris), Gilles Boyer (Hauts-de-Seine) ou Maël de Calan (Finistère). Leur objectif ? Peser dans la future majorité présidentielle... mais aussi sauver leur peau dans le climat de « dégagisme » ambiant !

"On s'organise depuis le premier jour"

Loin d’être spontanée, l’opération est soigneusement calée depuis plusieurs semaines. « On s’organise depuis le premier jour », confie l’un des députés à la manœuvre. Acte un : le 15 mai, jour de la nomination à Matignon d’Edouard Philippe, issu des rangs de la droite, ce sont deux de ses proches, Thierry Solère et le maire LR de Tourcoing Gérald Darmanin, qui font tourner un appel à « répondre à la main tendue » par le président. Plusieurs dizaines d’élus de la droite et du centre signent ce texte, renforçant les tensions entre pro et anti-Macron dans leur famille politique. 48 heures plus tard, Gérald Darmanin et Bruno Le Maire sont nommés au gouvernement.

Acte deux : le 19 mai, en arrêtant la liste définitive des candidats étiquetés Macron aux législatives, La République en marche (LRM) n’investit personne dans les circonscriptions d’une vingtaine de candidats LR-UDI, essentiellement des juppéistes et des lemairistes. Le marché est clair : Emmanuel Macron facilite leur élection mais attend leur soutien une fois installés à l’Assemblée nationale. Une manière de casser un peu plus une droite en lambeaux depuis sa défaite au premier tour de la présidentielle.

Symbole du basculement en cours : lundi 5 juin, Edouard Philippe est allé soutenir son ami Thierry Solère dans sa circonscription de Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine. La veille, c’est un autre ministre de droite, Gérald Darmanin, qui avait rendu visite au candidat. Solère, lui, a ciselé la formule qui résume sa démarche et celle de ses petits camarades « constructifs », comme il les appelle : « Je ne suis pas En Marche, mais je veux que ça marche. » Celui qui avait organisé la primaire de la droite revendique une cinquantaine de candidats aux législatives prêts à soutenir le gouvernement et à « voter tous les textes qui vont dans le bon sens ».

La droite Macron-compatible s'oriente vers la création d'un groupe à l'Assemblée nationale, voire d'un parti politique

L’acte trois attendra le résultat des législatives, puisqu’il s’agit de la création d’un groupe de droite Macron-compatible à l’Assemblée, voire d’un parti politique dans la foulée. « Ça pourrait s’appeler “Les Républicains en marche” ! », rigole l’un des instigateurs. De quoi acter définitivement la fracture de la droite... et faire enrager les députés restés fidèles à LR « canal historique ». « Les ministres de droite servent de chasseurs de voix, mais ils n’ont pas négocié de plateforme programmatique commune, rappelle Daniel Fasquelle, candidat à sa réélection dans le Pas-de-Calais. Ils s’apercevront vite qu’ils n’ont aucune marge de manœuvre et devront simplement appliquer le programme d’Emmanuel Macron. »

Idem pour les futurs députés de la droite macroniste ? Pour l’instant, les sondages donnent une majorité absolue à LRM au Palais Bourbon. Dans un tel cas, Emmanuel Macron n’aurait pas besoin d’un appui venu de la droite pour gouverner à sa guise. Et les « constructifs » se retrouveraient bien désœuvrés...

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne