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Laurence Haïm : "Emmanuel Macron est un homme qui veut aller vite"

INTERVIEW - L'ex-journaliste Laurence Haïm a quitté La République en Marche mercredi. Elle analyse les raisons de son départ et revient sur cette expérience.

Thomas Liabot , Mis à jour le
Laurence Haïm mi-mai dans la cour de l'Elysée.
Laurence Haïm mi-mai dans la cour de l'Elysée. © Reuters

La politique, c'est terminé. Du moins de ce côté-là du rideau. Après six mois passés dans l'équipe de campagne d'Emmanuel Macron, l'ex-journaliste Laurence Haïm a annoncé mercredi qu'elle quittait La République en marche. L'ancienne correspondante d'iTélé à Washington évoque les raisons de son départ, ses bons et mauvais souvenirs de campagne et ses projets à venir. Elle analyse en outre les débuts du président de la République et sa relation avec Donald Trump , dont elle a aussi suivi la campagne l'an dernier. Côté presse, cette fois.

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Pourquoi quittez-vous En Marche?
Il y a un temps pour la campagne et un temps pour autre chose. J'étais venue pour accompagner Emmanuel Macron dans sa route pour la présidence, maintenant qu'il a été élu, c'est un deuxième acte. A mon sens, j'ai réussi le premier.

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Vous auriez aimé poursuivre l'aventure à l'Elysée?
Cela dépend, ce n'était pas en tout cas dans le pacte de départ. Quand Emmanuel Macron m'a engagé en décembre, on s'est dit que l'aventure se terminerait le 30 mai. Mon contrat a été prolongé et je suis parti aux Etats-Unis y rencontrer des gens pour En Marche. Mais au départ, je voulais simplement l'accompagner jusqu'à l'Elysée.

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Qu'est-ce qui vous aurait plu à l'Elysée?
J'avais plusieurs idées, j'en ai parlé à l'équipe. Mais il a été décidé d'un commun accord qu'il y avait un temps pour la campagne et un temps pour autre chose. Je vais faire attention à la manière dont j'explique les choses car je ne veux pas susciter de polémique dans un univers médiatique que je crois connaître. J'ai cru en Emmanuel Macron, je lui ai dit en décembre : "Vous allez être président, j'ai envie de travailler à vos côtés." Brigitte Macron était là, on a parlé tous les trois de quel serait mon rôle durant la campagne. Il est maintenant temps pour moi de passer à autre chose. Je m'en tiendrai à cette déclaration.

"Je ne veux pas être chef d'un service politique, ce serait inapproprié"

Vous quittez le monde politique sans regrets aujourd'hui?
Le monde politique français.

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C'est-à-dire?
C'est ma réponse : le monde politique français. Sans aucun regret.

Que comptez-vous faire désormais?
J'ai d'abord besoin de m'arrêter un petit peu pour réfléchir. J'ai envie de voir ce qui va se passer. J'ai quatre ou cinq options. Je suis très surprise de voir qu'énormément de gens m'appellent. Je découvre aussi ce que c'est de changer de vie, avec les compromissions, les gens qui d'un seul coup vous rappellent. J'ai besoin de calme. Pas mal de gens me suivent sur Twitter, avec des avis très passionnés, à la fois en bien et en mal sur ma petite personne et j'ai envie de vraiment les respecter, de ne pas les décevoir. C'est un principe de vie désormais, je ne veux pas décevoir les gens qui ont cru en moi.

Quand allez-vous annoncer ce nouveau projet?
Cela va se faire par étape. Je ne vais pas être salariée, je ne pense pas. Il va y avoir un projet qui va être connu ce week-end, qui me plaît énormément, qui participe à mon désir de réflexion. Je crois beaucoup aux petits groupes, aux volontés communes. Je veux me sentir bien dans un groupe.

Vous avez évoqué votre désir de retourner au journalisme. Votre expérience politique ne va-t-elle pas compliquer les choses?
Ce n'est pas à moi de juger. Je suis dans une culture très américaine sur ce sujet. Aux Etats-Unis, les allers-retours sont possibles. Le porte-parole de Bill Clinton, George Stephanopoulos, est aujourd'hui le journaliste vedette de la matinale de ABC News. Même chose pour Nicolle Wallace, qui a été la porte-parole de George Bush, qui travaille chez NBC News. CNN a engagé des gens qui dirigeaient le service de presse de Barack Obama. En France, c'est le tabou absolu. Couvrir la politique à l'Elysée, je ne pourrai jamais le faire. Je ne veux pas être chef d'un service politique, ce serait inapproprié. Mais faire des choses pour montrer l'état du monde, je revendique le droit de le faire. Six mois dans une campagne à aider un candidat ne m'empêcheront pas d'aller montrer ce que je pense être important pour le monde. Je suis pour casser les codes. Si ce n'est pas possible dans le système français, il y a d'autres systèmes qui me permettront de le faire.

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A l'international, Macron fait un sans-faute absolu. Il a réussi à remettre la France au centre du monde

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Quelles sont les images que vous gardez en tête après ces six mois auprès d'En Marche?
Mon premier entretien en décembre dans le bureau d'Emmanuel Macron, avec Brigitte Macron, qui s'était très bien passé. Mes déplacements avec lui en avion ou en train, où on avait une vraie proximité, des échanges. Je retiens aussi un dîner en tête-à-tête avec Brigitte Macron, qui est une femme importante pour moi, qui veut faire bouger les choses. Je retiens enfin le moment où je montre à Emmanuel Macron la vidéo de Barack Obama.

Et les mauvais moments?
Il y a des instants de cruauté dans le monde politique que je garderai pour moi. J'ai aussi lu ou entendu des choses que je n'avais pas dites ou pas faites.

Vous avez découvert le métier de journaliste d'un autre point de vue?
Les journalistes français travaillent beaucoup. Ils essayent de faire au mieux et ne sont pas tous des pourris. Ils font un métier difficile et je respecte les journalistes qui couvrent la politique.

Qu'avez-vous découvert durant cette aventure en politique?
L'instantanéité des hommes politiques, qui se reconnaissent entre eux. J'ai assisté à l'entretien entre Emmanuel Macron et John Kerry [l'ancien secrétaire d'Etat américain, NDLR] ou Sadiq Khan le maire de Londres. Ils ne s'étaient jamais vus, mais il y avait une proximité dans le langage et l'état d'esprit qui était instantanée. Je ne savais pas que ça existait. Quand j'étais dans la pièce avec Emmanuel Macron et Michael Bloomberg, l'ancien maire de New-York, j'ai assisté à cette reconnaissance instantanée. Comme ils ont peu de temps dans leur agenda, ils vont très vite à l'essentiel. C'était passionnant à observer.

"Emmanuel Macron est beaucoup plus proche de Donald Trump qu'Angela Merkel"

Quel regard portez-vous sur le début de mandat d'Emmanuel Macron?
[Elle réfléchit longuement] A l'international, c'est un sans-faute absolu. Il a réussi à remettre la France au centre du monde. Poutine vient à Paris, les Américains regardent avec envie notre pays, le monde entier nous regarde en se disant : 'Mais qu'est-ce qui se passe en France?' Du point de vue de la politique intérieure, son désir absolu de renouveau me frappe, à tous niveaux. C'est un homme qui veut aller vite, construire quelque chose et montrer que ça va changer. Il y a aussi des côtés que je n'aime pas, mais je les garde pour moi.

C'est aussi à cause de ça que vous avez mis fin à l'aventure?
C'est votre analyse, je ne veux pas faire de polémique.

En parallèle, quel regard portez-vous sur le début de mandat de Donald Trump, qui est arrivé jeudi à Paris?
Tous les jours, une histoire nouvelle sort. La question est de savoir s'il va terminer son mandat ou pas. Je pense qu'il n'a absolument rien à faire des critiques et qu'il a décidé de maintenir son cap, sa vision et ses tweets! Historiquement, c'est passionnant de voir où en est l'Amérique aujourd'hui, ce qui va se passer et comment la société civile peut résister. On assiste actuellement à la démocratie en action aux Etats-Unis. La société résiste, le monde politique aussi, le président a son idée. C'est passionnant à analyser au plus près.

Emmanuel Macron et Donald Trump vont-ils s'entendre?
Oui, très bien. Donald Trump, qui a 71 ans, est impressionné par ce qu'Emmanuel Macron a fait à 39 ans. En tant qu'ancien homme d'affaires, il apprécie que Macron aille vite, lui parle en anglais, son passé dans la finance. Il y a un mécanisme qui fonctionne très bien entre eux. Ils ont tous les deux un grand sens de la responsabilité par rapport à leur pays. Donald Trump est très patriote, il met souvent en avant son pays et je pense qu'Emmanuel Macron veut défendre une certaine idée de la France. Ils se reconnaissent là-dedans et ça va vite entre eux. Il va y avoir des points de convergence. Emmanuel Macron est par exemple beaucoup plus proche de Donald Trump qu'Angela Merkel. Journalistiquement, ce sera intéressant à observer sur la longueur.

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