Au cinéma, quand les hommes “sautent” et “tuent”, les femmes “câlinent” et “sanglotent”

Selon une étude américaine s’appuyant sur plusieurs milliers de films, le sexisme se niche jusque dans les plus petits recoins des scénarios.

Par Romain Capelle

Publié le 01 septembre 2017 à 13h20

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 01h42

Dans un article intitulé « She Giggles, He Gallops » (« Elle glousse, il galope »), Julia Silge et la petite équipe de data-journalistes de Polygraph, qui publie maintenant ses travaux sur le site The Pudding, a poussé encore un peu plus loin son analyse du sexisme dans le cinéma grand public américain. Le site avait déjà passé à la moulinette du test de Bechdel des milliers de films sortis ces dernières années, ou analysé scrupuleusement la part des dialogues réservés aux hommes et aux femmes, pour un résultat à chaque fois accablant.

Cette fois-ci, c’est au tour des didascalies issues du scénario de 2 000 grands films américains (sortis pour plupart après 1990) d’être disséquées afin d’y traquer les stéréotypes genrés. Les didascalies, ce sont toutes ces petites indications qui servent à décrire l’action des personnages ou à donner des indications de mise en scène : « elle descend de la voiture », « il prend un livre », « les personnages sortent dans la rue »… Le résultat de l’analyse de Polygraph, et en particulier celle des verbes décrivant l’action des personnages féminins et masculins, est (hélas) sans surprise.

A l’examen de ce vaste corpus, il apparaît en effet que les personnages féminins « calinent »« gloussent », « crient », « rougissent », « pleurent » ou « sanglotent », bien plus souvent que les personnages masculins, qui de leur côté ont plutôt tendance à « sauter », « tuer », « voler », « tirer », ou « galoper ». Et ce ne sont que des exemples, la quantité de détails fournis par cette étude rigoureuse, illustrée par des graphiques clairs et parlants, la rend encore plus édifiante. Au final, le type d’action et le vocabulaire employé pour décrire l’action des personnages féminins ou masculins est loin d’être... neutre.

Pour finir, Polygraph a aussi essayé de voir si le genre de l’auteur du scénario influait sur les termes employés. Et la réponse est : pas vraiment. Un peu étonnant (même si l’utilisation de stéréotypes genrés n’est évidemment pas réservé aux hommes), jusqu’à ce qu’on constate que seulement 15 % des scénarios étudiés étaient l’œuvre de femmes… Ce qui fait écrire à l’auteure de l’article : « Peut-être que si la parité régnait à Hollywood, nous pourrions espérer moins de personnages féminins qui réagissent, embrassent et pleurent. L’augmentation du nombre de femmes scénaristes pourraient aussi se traduire par des femmes plus susceptibles d’espionner, de trouver des choses, et, peut-être de façon encore plus remarquable, d’écrire pour le cinéma. »

A lire : She Giggles, He Gallops, sur The Pudding

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