Harcèlement sexuel : la comédienne et chanteuse Elisa Tovati accuse à son tour

La comédienne et chanteuse parle, pour la première fois, des agressions dont elle a été victime quand elle était toute jeune actrice.

Elisa Tovati parle pour la première fois du harcèlement sexuel dont elle dit avoir été victime.  
Elisa Tovati parle pour la première fois du harcèlement sexuel dont elle dit avoir été victime.   LP/Frédéric DUGIT

    Elle est surtout chanteuse aujourd'hui. Mais Elisa Tovati a commencé sa carrière en tant que comédienne pour la télévision et le cinéma, notamment dans le triomphal « La vérité si je mens 2 » en 2001. Elle raconte pour la première fois les agressions qu'elle a subies en tant que jeune actrice.


    Quel regard portez-vous sur le hashtag #BalanceTonPorc sur Twitter?
    Elisa Tovati. Je suis solidaire de toutes ces femmes qui prennent la parole et heureuse que l'on puisse en parler. Je ne pensais pas qu'il y avait autant de monde concerné dans ce milieu. Moi aussi j'ai vécu des choses très limite et je n'avais pas le courage de parler de ce droit de cuissage, de cette pression.


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    A quel moment ça vous est arrivé ?
    Quand j'ai commencé les castings entre 15 et 18 ans, trois ou quatre fois. Comme c'est arrivé à presque toutes les jeunes actrices qui sont les proies de gros porcs. Ce sont des castings où l'on vous demande de vous foutre à poil sous prétexte que c'est pour le rôle d'une fille un peu sulfureuse. Moi, je répondais au réalisateur : « Sur le tournage, si le rôle le justifie, on verra. Mais là, dans une salle blanche, devant vous et une petite caméra, ça va pas être possible. » Mais j'étais tétanisée. Dans ces cas-là, vous ne savez pas à quel moment ça va déraper… Ça m'est même arrivé de partir en courant. Je me souviens aussi d'un comédien très connu sur le tournage d'une fiction télé qui a bloqué la porte de ma loge et m'a dit : « Viens, je vais te faire un petit détartrage. » Il était âgé, j'étais jeune. J'ai été très choquée. Vous arrivez à vous en sortir avec une pirouette, un sourire, un coup de coude pour ouvrir la porte. Mais vous êtes en panique.


    Vous en avez parlé ?
    Ça m'a coûté quelques séances de psy. Et j'en ai parlé à mes parents, à l'époque. Je revenais parfois en pleurs chez moi parce que j'avais encore huit ou dix jours de tournage avec lui. Dans ces cas-là, vous vous déconnectez de vous-même. Il faut se couper de ses émotions pour pouvoir faire le vide et continuer. Aujourd'hui, je serais même incapable de donner des détails précis de certains événements tellement je les ai enfouis. Je me rappelle en tout cas que ma mère a fini par me dire : « Si ce métier te rend si malheureuse, il faut arrêter. »


    Vous avez rencontré Harvey Weinstein ?
    Non, Dieu soit loué ! Mais quand j'entends des gens dire que les actrices n'avaient qu'à pas monter dans sa chambre, ça me hérisse ! Si vous ne le faites pas, faut changer de métier ! Les rendez-vous se passent quasiment toujours dans des hôtels. Je me suis retrouvée parfois avec des réalisateurs en caleçon ou au lit quand j'arrivais dans leur chambre. Et un mec qui vous touche les seins ou les fesses, il faut avoir le cran de lui en coller une quand vous êtes toute jeune et que vous n'avez pas les codes.


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    Pourquoi ne pas avoir utilisé le hashtag #BalanceTonPorc ?
    Je n'avais pas envie de balancer des noms et le côté tribune populaire me gênait un peu. En revanche, j'ai fait une chanson sur le sujet il y a six mois qui s'appelait « SOS ». Le texte racontait que, parfois, on en a marre de faire croire que tout va bien. Je ne suis pas seulement le personnage de Chochana Boutboul dans « La vérité si je mens » ou la chanteuse amoureuse. Mais quand j'ai enregistré cette chanson, on m'a dit : « Ce n'est pas toi, pas ton ADN. Tu es quelqu'un de solaire. On n'y croit pas. » Alors, le titre est disponible sur Internet, mais on ne l'a même pas défendu pour qu'il passe à la radio du coup. En tant qu'actrice, on n'a pas le droit de dire qu'on a vécu des choses difficiles. On doit être glamour, souriante.


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