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L'histoire ubuesque de cet apatride que les Britanniques veulent expulser

Big Ben et le drapeau britannique à Londres, le 7 juin 2017

Big Ben et le drapeau britannique à Londres, le 7 juin 2017 - Justin Tallis-AFP

Un jeune homme de 36 ans qui réside illégalement au Royaume-Uni s'est vu refuser l'asile au motif que sa vie ne serait pas en danger s'il retournait en Palestine, qu'il a quittée à l'âge de 5 ans. Mais il s'est également vu refuser le statut d'apatride, au motif que son origine palestinienne posait "de sérieux doutes". Une situation inextricable.

Il est apatride depuis plus de trente ans mais les autorités britanniques refuser de lui accorder le droit d'asile. Mohammed Al-Mustafa, qui réside illégalement au Royaume-Uni, ne peut retourner dans sa terre natale qu'il a quittée enfant - la Palestine, faute de pouvoir prouver son identité - alors que Londres justifie son refus d'asile par le fait qu'il ne serait pas en danger en retournant en Palestine. Une situation ubuesque racontée parThe Guardian.

"Pas en danger" s'il retourne en Palestine

Mohammed Al-Mustafa est né en Palestine il y a trente-six ans. À l'âge de 5 ans, lui et ses parents s'en vont après que son frère a été tué. Ils partent sans leurs documents d'identité. Depuis, ses parents sont morts, et il a vécu en Syrie, en Iraq, en Égypte, en Italie et en France, mais toujours illégalement.

Arrivé au Royaume-Uni en 2010, le jeune homme demande l'asile aux autorités. Ces dernières, qui lui reconnaissent la nationalité de "l'autorité palestinienne", lui refusent au prétexte qu'il ne serait pas en danger s'il retournait dans ce pays, qui n'est pourtant pas véritablement un État. 

Les frontière, la capitale et la reconnaissance internationale de la Palestine font l'objet de vives controverses alors que la bande de Gaza est sous contrôle du Hamas, classé par certains comme une organisation terroriste. En 2012, l'Assemblée générale des Nations unies a cependant accepté la Palestine en tant qu'État observateur, mais certains pays ne reconnaissaient qu'un statut d'organisation non-étatique, voire aucun statut.

Pas capable de dessiner le drapeau palestinien

Mohammed Al-Mustafa tente de retourner en Palestine. Mais faute de pouvoir prouver son identité, l'entrée lui est refusé à deux reprises. En juin 2016, il formule une demande de statut d'apatride, qui lui est également refusée. Les services de l'administration n'ont cette fois pas cru qu'il venait de Palestine.

Dans sa lettre de refus, les services du ministère de l'Intérieur estiment que les réponses fournies par Mohammed Al-Mustafa suscitent "de sérieux doutes sur son origine palestinienne". Il n'aurait pas été capable, lors de son entretien, de dessiner le drapeau palestinien, de chanter l'hymne national - adopté en 1996, soit neuf ans après son départ - et d'évoquer des spécialités culinaires.

Pour Michael Ferguson, de l'association caritative Passage, la décision de l'administration est "brutale et illogique", s'indigne-t-il pour le quotidien britannique. "C'est honteux", ajoute-t-il. "Choisir des choses comme les spécialités gastronomiques, ne pas connaître l'hymne national, pour un enfant qui est parti à l'âge de 5 ans...", insuffisant selon lui pour trancher sur le sort de quelqu'un.

"Mohammed n'a jamais eu de statut régulier"

Les services du ministère de l'Intérieur ont considéré que Mohammed Al-Mustafa faisait usage "de la tromperie afin d'essayer d'obtenir une permission". Un mensonge, considère cet humanitaire.

"Pourquoi aurait-il menti depuis le début, formulé de fausses demandes pour retourner à Gaza et pourquoi voudrait-il aller vivre à Gaza s'il n'en venait pas?"

Sa demande est actuellement examinée en appel. Après avoir vécu dans la rue, le jeune homme est à présent hébergé chez une membre d'une association venant en aide aux réfugiés. Il a aujourd'hui perdu espoir et se sent traité "pire qu'un animal".

"Mohammed n'a jamais eu de statut régulier dans aucun pays depuis qu'il a quitté Gaza, poursuit Michael Ferguson. Il a toujours été dans cette terrible situation d'attendre que sa vie commence et coincé dans cette idée selon laquelle il est un être humain illégal."

Céline Hussonnois-Alaya