Le Parlement européen veut inclure l’égalité des genres aux accords de libre-échange

L'équilibre au Parlement européen pourrait être modifié par l'arrivée d'En Marche en 2019. Photo EA

Le Parlement a adopté une résolution visant à mieux prendre en compte l’égalité des genres dans les accords commerciaux. La Commission pourrait suivre cette orientation dans son accord avec le Chili, qui serait le premier à intégrer cette dimension.

Un peu moins d’une semaine après la journée internationale de la femme, l’égalité des genres a fait irruption dans les débats en session plénière au Parlement européen. Mardi 13 mars, les eurodéputés ont validé à 512 voix pour et 107 voix contre une résolution dans laquelle ils se prononcent en faveur d’une meilleure prise en compte de l’égalité des genres dans les accords commerciaux.

Des accords de commerce non neutres sur le genre

« Les politiques commerciales ne sont pas neutres sur l’égalité homme femme » avait déclaré lundi lors des débats Malin Björk, co-rapporteure du projet de résolution avec l’eurodéputée Eleonora Forenza. Les accords de libre-échange auraient des impacts différenciés sur les femmes dans des secteurs tels que l’agriculture ou le textile, marqués par de fortes différences entre les genres et un statut souvent plus précaire des femmes.

Par ailleurs en libéralisant le domaine des services dont certains services publics, les accords de nouvelle génération pourraient d’autant plus impacter les femmes, par exemple en limitant leurs accès aux soins ou en les obligeant à reprendre à leur compte les tâches autrefois réalisées par le secteur public.

Pour les deux eurodéputés, ces écarts justifient d’intégrer la dimension genre aux accords commerciaux, alors qu’actuellement « seulement 20 % avec des partenaires commerciaux non membres de l’Union mentionnent les droits de la femme », comme le souligne la résolution.

Nathalie Loiseau: «j'appelle à des politiques proactives en faveur des talents féminins»

À l’occasion de la journée de la femme 2018, trois Françaises très européennes s’expriment sur la place des femmes en Europe. « On accorde plus de confiance aux personnes grandes dotées d’une voix grave, il faut faire prendre conscience de ce biais» assure Nathalie Loiseau.

Lundi lors des débats, le principe avait rencontré peu d’opposition. « Si nous commençons à indiquer des clauses telles que vous proposez on va se rire de nous. (…) Nous ne pouvons imposer notre vision du genre au monde. C’est simplement colonialiste », avait déclaré Joachim Starbatty, du groupe des Conservateurs et réformistes européens. Le groupe de l’Europe des Nations et Libertés avait quant à lui dénoncé via France Jamet, issue du FN, une mesure anecdotique dans une « Europe qui compte près de 20 millions de chômeurs ».

Dans sa résolution, le Parlement européen invite la Commission et les États membres à « prendre dûment en compte l’égalité des genres dans l’élaboration de nouvelles réglementations et accords, ainsi que dans la mise en oeuvre et la révision des accords existants ». Cela pourrait se faire par « l’inclusion d’un chapitre sur la dimension du genre dans les accords de commerce et d’investissement de l’Union », ainsi que par des références à des textes internationaux tels que la CEDAW (Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’encontre des femmes).

Par ailleurs, le Parlement y soutient une meilleure parité dans les équipes de négociations et souligne que « les services d’intérêt général (…) doivent rester en dehors du champ d’application des négociations commerciales », afin de maintenir la capacité des États à règlementer ces services.

Des dispositions sur le genre dans l’accord sur le Chili

La résolution du Parlement reste déclarative et il revient à la Commission d’y donner suite ou non. Cette dernière a semblé néanmoins déjà aller dans le sens du Parlement, en annonçant lundi via sa commissaire aux affaires sociales Marianne Thyssen l’inclusion de dispositions spécifiques sur le genre dans son accord commercial avec le Chili.

L'UE et le Chili à la recherche de l’accord parfait

L’Union et le Chili souhaitent perfectionner leur accord d’association, qui a permis de doubler les échanges commerciaux en seulement 15 ans.

De telles dispositions ont déjà fait partie d’un accord commercial entre le Chili et le Canada. Selon Marianne Thyssen, elles devraient contenir dans l’accord avec l’Union européenne « la référence à des instruments internationaux » tels que la CEDAW, ainsi que « la mise en place d’un cadre structuré de coopération et d’échange de bonnes pratiques » sur le sujet.

La Commission a également annoncé avoir revu sa stratégie « aide pour le commerce » pour y inclure « une exigence d’analyse homme femme systématique », visant à pallier le manque de données sur la question.

L’eurodéputée Lola Sanchez Caldentey, de la commission développement, a néanmoins demandé des précisions à la Commission sur les mesures concernées par ce chapitre et leur caractère contraignant. « Les traités commerciaux vont-ils obliger à étendre les congés maternité/paternité rémunérés et non transférables ? Vont-ils garantir le retour au travail ? Vont-ils interdire et pénaliser l’écart salarial (…) ? Les millions de femmes qui ont soutenu la grève féministe le 8 mars dernier nous demandent des changements et pas seulement des phrases en l’air », a-t-elle conclu.

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L’écart salarial entre hommes et femmes, la violence de genre et le machisme sont les principaux obstacles à l’égalité des sexes en Europe. Les Espagnoles débraient le 8 mars pour défendre leurs droits . Un article de notre partenaire, Euroefe.

 

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