Femmes scientifiques : une charte contre le plafond de verre

Cédric Villani, Axel Kahn ou encore Pascal Picq se sont engagés.

 La botaniste Caroline Dean
La botaniste Caroline Dean L’Oréal

    En sciences, le « plafond de verre » qui limite l'accession des femmes aux hautes fonctions académiques est particulièrement résistant. Des chercheurs de premier plan ont décidé de s'engager pour aider à le briser.

    À l'occasion de la 20e édition du prix L'Oréal-Unesco « Pour les femmes et la science », qui se tiendra ce jeudi à Paris, 26 hommes de diverses nationalités ont signé une charte pour aider les femmes dans leur carrière dans leur « sphère d'influence ».

    Parmi ces premiers signataires, on trouve côté français le mathématicien et député Cédric Villani, le spécialiste du cerveau Stanislas Dehaene, le patron du CNRS Antoine Petit, le physicien Etienne Klein, le généticien Axel Kahn, le paléoanthropologue Pascal Picq. Des scientifiques travaillant aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Norvège, en Israël, au Liban, au Qatar notamment ont également apporté leur soutien à cette initiative lancée par la Fondation L'Oréal et l' Unesco.

    « La charte d'engagement vise à faire davantage de place aux femmes à différents niveaux comme l'accès égal aux bourses, au recrutement, à la publication et aux droits d'auteur, ou à la récompense de l'excellence », explique à l'AFP Jean-Paul Agon, PDG de L'Oréal et président de la fondation.

    Seulement 30% de chercheuses

    En vingt ans, la part des femmes scientifiques a certes progressé d'environ 12 % mais elles ne représentent encore qu'environ 30 % des chercheurs dans le monde, selon un rapport de l'Unesco de 2015. Elles n'occupent que 11 % des hautes fonctions académiques en Europe. Et seulement 3 % des prix Nobel scientifiques leur ont été attribués.

    « On touche là du doigt la réalité du plafond de verre dans les sciences. Ce n'est pas une question de compétences », relève Jean-Paul Agon. « Les carrières des femmes en science n'avancent pas au même rythme que celles de leurs homologues masculins ».

    Dans la charte « pour les femmes et la science », les hommes s'engagent à « nominer autant d'hommes que de femmes pour les prix ». Les hommes sont invités à « nommer des femmes à des postes de responsabilité », à « proposer davantage d'interventions publiques aux femmes scientifiques », à « parrainer chaque année au moins une femme pour l'aider à gravir un échelon supplémentaire dans son plan de carrière ».

    La question des publications est « extrêmement sensible »

    Parvenir à se faire publier est indispensable pour bâtir sa carrière scientifique. La charte suggère de « recommander des femmes dans les comités de lecture pour atteindre un meilleur équilibre ».

    La question des publications est un « sujet extrêmement sensible », note Cédric Villani. « Autant il faut se donner des objectifs clairs de représentation équilibrée quand il s'agit de composer un conseil d'administration ou une direction d'institut, autant en matière de publications, il faut, je crois, résister à la tentation du quota et ne retenir que la qualité scientifique », estime le député (LREM) de l'Essonne. « C'est en amont qu'il faut davantage soutenir, accompagner, encourager les femmes. Il faut aussi les inciter à publier régulièrement ».

    Quant à Ernesto Fernandez Polcuch, chef de la section des politiques scientifiques à l'Unesco, il considère que « le combat pour l'égalité des genres en sciences a trois raisons d'être ». « Non seulement, c'est un droit humain mais la société a besoin de davantage de scientifiques donc de plus de femmes. Qui plus est, la science sera de meilleure qualité si les femmes sont pleinement engagées ».