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Les dividendes augmentent-ils au rythme des baisses de charges ?

Existe-t-il un lien de causalité entre baisse des cotisations patronales et augmentation des dividendes, comme le soutient Pierre Laurent, premier secrétaire du Parti communiste ?

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Publié le 18 mars 2014 à 15h20, modifié le 18 mars 2014 à 17h18

Temps de Lecture 3 min.

Pierre Laurent était, mardi 18 mars, l'invité de France Inter. L'occasion pour le premier secrétaire du Parti communiste d'évoquer la manifestation syndicale contre le « pacte de responsabilité » de François Hollande, qui prévoit notamment la suppression des cotisations patronales. Pour M. Laurent, ces diminutions de cotisations servent surtout à augmenter la part versée aux actionnaires : ce qu'on appelle les dividendes.

Ce qu'il a dit :

« Plus on a augmenté les exonérations de cotisations sociales, plus les dividendes distribués aux actionnaires ont continué à grimper. »

Pourquoi c'est plus compliqué que ça :

D'un côté, on a ce que les entreprises ne paient pas, ou plus. La France pratique depuis des années une politique de diminution des cotisations sociales réglées par les entreprises. De l'autre côté, ce qu'elles reversent à leurs actionnaires : les fameux dividendes.

Une corrélation évidente

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Si on tente de comparer ces deux dynamiques, M. Laurent a raison : voici la part des dividendes dans l'excédent brut d'exploitation (la marge bénéficiaire de l'entreprise) des sociétés françaises. On le voit, cette part augmente régulièrement depuis la fin des années 1970 – si l'on excepte les années 2008 et 2009.

Quant aux exonérations de cotisations sociales, elles sont plus complexes à mesurer précisément. On estime qu'elles atteignent aujourd'hui environ 27,6 milliards d'euros de manque à gagner pour l'Etat et pour les caisses de la Sécurité sociale. Voici un graphe qui montre la hausse continue de ces suppressions de cotisations sociales de 1993 à 2009.

Coût des exonérations générales de cotisations sociales, 1993-2009

Corrélation n'est pas causalité

Il y a effectivement corrélation : depuis le début des années 1990, les allègements de cotisations augmentent et la part des bénéfices distribuée aux actionnaires également. Peut-on pour autant, comme le fait M. Laurent, en déduire une causalité ? C'est moins évident.

Il faut en effet prendre en compte d'autres facteurs. Ainsi, on mesure ici la part relative des dividendes dans le bénéfice. Mais cela ne montre pas le montant desdits bénéfices, par exemple. Or, c'est important : une entreprise qui fait moins de bénéfices en distribuera moins. Et les entreprises françaises souffrent ces dernières années d'une diminution de leurs marges, ce qui entraîne une baisse de leur capacité à investir.

De fait, nous fait-on remarquer, on peut établir que le versement de dividendes se fait plutôt au détriment de l'investissement. Et sur le long terme, comme le montre Alternatives Economiques, la part des dividendes prend le pas sur l'investissement, ce depuis plus de dix ans. Mais toutes les entreprises ne versent pas de dividendes, loin de là: cela ne concerne que les plus grandes.

L'idée du « pacte de productivité », c'est de redonner aux entreprises plus de marge pour leur permettre d'investir et de créer des emplois. Elle est tout à fait critiquable à bien des égards, et les effets des baisses de cotisations sociales ne sont pas évidents à démontrer.  Néammoins, on ne peut pas réduire la question à : baisse des cotisations sociales égale hausse des dividendes.

Voici un dernier graphe, qui mesure la répartition de la valeur ajoutée : quelle part des profits réalisés par l'entreprise va aux salariés, aux actionnaires et à l'investissement. C'est finalement la question que pose Pierre Laurent : ces baisses de cotisations sociales vont-elles aller dans les poches des actionnaires ?

On le voit sur ce dernier graphe, le partage de la valeur ajoutée, qui avait connu de vrais bouleversements dans les années 1980, n'a plus vraiment connu d'évolution majeure au cours des dernières années.

Difficile de conclure d'un « vrai » ou « faux » à la phrase de Pierre Laurent. On peut rappeler que la part des dividendes dans la valeur ajoutée est plus élevée que jamais, et que c'est sans doute nuisible à l'investissement. Mais on ne peut pas établir de corrélation entre baisses de cotisations - qui ont des objectifs différents, notamment l'emploi - et hausse des dividendes, ni réduire la question des marges, de la compétitivité ou de l'investissement à un simple arbitrage entre profits des actionnaires et salaires ou cotisations.

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