Nutrition

Trop de sucre pendant la grossesse est mauvais pour le cerveau des enfants

Plus une femme enceinte consomme de boissons sucrées, même allégées, plus son enfant risque d’avoir un QI moindre.

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Des bonbons, du chocolat, des sodas, des boissons sucrées, une bonne crème glacée… De petites envies que l’on s’octroie parfois, mais qui peuvent avoir des conséquences délétères, notamment chez la femme enceinte pour le développement de son bébé. Emily Oken, de l’École de médecine de Harvard à Boston, et ses collègues ont en effet montré pour la première fois que la consommation excessive de sucres et d’édulcorants par la mère pendant sa grossesse diminue les aptitudes cognitives et le QI de son enfant.

En moyenne, les Américains consomment 300 calories de sucres par jour, surtout à travers les boissons sucrées et les sodas. Les Français quant à eux mangent environ 35 kilogrammes de sucre par an, soit 10 fois plus qu’il y a un siècle. Ce qui, dans l’ensemble, est au-dessus des recommandations sanitaires : la consommation de sucres ajoutés ne devrait pas représenter plus de 10 % de nos apports caloriques, ou, selon d’autres sources, 150 calories par jour pour un homme et 100 calories par jour pour une femme et un enfant.

Or depuis plusieurs années déjà, on sait que notre alimentation joue un rôle important sur notre santé non seulement physique, mais aussi mentale. La malbouffe, à savoir les produits trop gras ou trop sucrés, est notamment liée à un risque élevé d’obésité, de maladies cardiovasculaires et de diabète de type 2. Et de plus en plus d’études révèlent l’impact de ce genre d’aliments sur le cerveau et le bien-être, notamment en augmentant le stress et l’anxiété. Mais qu’en est-il chez les tout-petits, même encore dans le ventre de leur maman ?

Les chercheurs ont analysé l’alimentation de plus de 1 200 femmes enceintes entre 1999 et 2002, ainsi que celle de leurs enfants, et ils ont fait passer à ces derniers, alors âgés de 3 puis de 7 ans, des tests cognitifs explorant leurs aptitudes langagières, motrices et visuelles ainsi que leur mémoire et leur raisonnement. L’ensemble de ces capacités correspond à une évaluation du quotient intellectuel (QI) des enfants.

Résultat : plus une mère consomme de sucres pendant sa grossesse, notamment sous forme de boissons sucrées et de sodas, plus son enfant obtient de mauvais scores aux tests cognitifs à l’âge de 7 ans, avec en moyenne une diminution de 1,5 point de QI pour 15 grammes de sucres journaliers. Autrement dit, une femme enceinte qui consommerait chaque jour un soda et une barre chocolatée ferait perdre jusqu’à 6 points de QI à son futur enfant… Et c’est encore pire avec les sodas allégés, où des édulcorants, comme l’aspartame, remplacent tout ou partie des sucres : la chute des performances aux exercices cognitifs est même significative dès l’âge de 3 ans. De même, plus un enfant consomme de boissons sucrées pendant son enfance, plus ses résultats aux tests sont faibles à l’âge de 7 ans. En revanche, c’est l’inverse avec la consommation de fruits « naturels » : les aptitudes cognitives des enfants augmentent aux âges de 3 et 7 ans. Et les scientifiques n’ont pas obtenu de résultats probants en ce qui concerne les jus de fruits sans sucres ajoutés.

Comment expliquer ces phénomènes ? Plusieurs études scientifiques ont montré, chez l’animal, que les sucres ajoutés, ainsi que les régimes riches en aliments gras et sucrés, perturbaient le développement de l’hippocampe, un centre cérébral impliqué notamment dans la mémorisation et les apprentissages, et celui du cortex préfrontal, contribuant à la planification et à l’attention. D’où des conséquences délétères sur les aptitudes cognitives.

Quant à l’aspartame, de plus en plus de travaux mettent en évidence ses effets négatifs sur le cerveau : il altère notamment certains neurotransmetteurs, les molécules de communication entre neurones. Il devient donc important d’informer les pouvoirs publics et les familles : selon certains experts, notre consommation de sucres devrait être divisée par 3. Et encore plus chez la femme enceinte et l’enfant ! Pour le plaisir des papilles, mieux vaut manger de vrais fruits, souvent bien assez sucrés.

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Bénédicte Salthun-Lassalle

Bénédicte Salthun-Lassalle est docteure en neurosciences et rédactrice en chef adjointe à Cerveau & Psycho.

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Références

J. F. W. Cohen et al., Associations of prenatal and child sugar intake with child cognition, Am. J. Prev. Med., vol. 54, pp. 727-735, 2018.

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