Le glyphosate, tout le monde en parle mais personne ne sait si on en respire. C'est justement pour cette raison que l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), l'organisme qui fédère les associations de surveillance de la qualité de l'air ATMO France et l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), ont lancé le lundi 25 juin 2018 une campagne de mesure des résidus de pesticides dans l'air. C'est une première en France.
"Améliorer la surveillance et réduire l'exposition"
Le but de l'opération, annoncée fin 2017, est de mieux connaître l'exposition de la population et de définir, à terme, une stratégie de surveillance des pesticides dans l'air. L'étude s'étalera sur un an et 50 sites de mesure différents en France métropolitaine et dans les collectivités d'outre-mer, pour un total d’environ 1.500 échantillons. "La répartition des sites de prélèvements a été choisie afin de prendre en compte les différents types de zones d’habitation (52% de sites urbains/péri-urbains et 48% de sites ruraux) et de productions agricoles (40% de sites en grandes cultures, 22% de sites viticoles, 22% de sites arboricoles, 14% de sites en maraichage et 6% de sites d’élevage)" déclare l'Anses sur son site.
Nicolas Hulot et Stéphane Travert. © Thomas SAMSON / AFP
"Notre volonté avec cette campagne est de s'appuyer sur les données collectées pour améliorer la surveillance des résidus de pesticides présents dans l'air et réduire l'exposition à ces substances des populations agricoles, des riverains de zones agricoles et de toute la population", a commenté le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot.
80 substances vont être surveillées
Le glyphosate, la star des herbicides de Monsanto, n'est pas le seul produit qui sera surveillé. En tout, 80 substances entrant dans la composition de produits phytopharmaceutiques, de biocides ou de médicaments vont être analysées. D'après le communiqué de l'Anses, "elles ont été priorisées sur la base de leurs caractéristiques de danger et de critères d’utilisation, d’émission et de persistance dans l’air".
Ainsi, certains produits sont déjà considérés comme présents dans l'air et à surveiller à plus long terme. Parmi eux notamment le fipronil, à l'origine à l'été 2017 d'une crise liée à la découverte d'oeufs contaminés par l'insecticide dans plusieurs pays européens, ou encore le lindane, substance "persistante" pourtant interdite pour les usages agricoles en France depuis 1998.
Un agriculteur répand des pesticides sur son champ. (AFP/Archives - DENIS CHARLET)
Mais la présence dans l'air de certains autres n'est en revanche pas aussi certaine, comme le glyphosate. L'herbicide, dont la France a promis la sortie d'ici trois ans, nécessite un matériel spécifique pour son prélèvement dans l'air et seule une petite partie des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA) pourront le mesurer, selon ATMO France, qui fédère ces organismes. Sous surveillance également, le chlordécone, un insecticide cancérogène longtemps utilisé aux Antilles qui provoquerait des pubertés précoces en Martinique.
AASQA. Les AASQA sont chargées de mesurer la qualité de l'air et d'alerter en cas de pollution au dioxyde d'azote ou aux particules fines, mais les données relatives aux pesticides ont jusqu'à présent été collectées par le biais d'initiatives locales et ponctuelles.
Un manque de connaissances
Cette campagne avait été décidée après la publication en octobre d'un rapport de l'Anses soulignant la connaissance "partielle et hétérogène" des contaminations en pesticides dans l'air. "Les expositions alimentaires à ces substances sont "de mieux en mieux connues", mais la contamination de l'air et ainsi les risques d'inhalation ou d'exposition par voie cutanée beaucoup moins", avait noté l'Agence. Résultats en 2019.