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Pierre Soulages en 2 minutes

En bref

Il est le maître incontesté de la peinture au noir, d’une abstraction radicale au service de la matière et de la lumière. Pierre Soulages (1919–2022) est l’une des dernières grandes figures de l’art moderne. Son œuvre, exposée à travers le monde, est prolifique : plus de 1 550 toiles. Sa carrière est couronnée par l’ouverture d’un musée à Rodez en 2014 suite à une donation d’un ensemble de ses œuvres.

Pierre Soulages
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Pierre Soulages, 1985

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© Thierry Martinot / Bridgeman Images

Il a dit

« Plus les moyens sont limités, plus l’expression est forte. »

Sa vie

Pierre Soulages est né à Rodez juste après la Grande Guerre. Tout jeune, alors qu’il vit seul avec sa mère et sa sœur, il se montre très attentif à la nature, à l’environnement rustique qui l’entoure. Il commence à dessiner alors qu’il n’a pas neuf ans. Féru d’archéologie, il est attiré par le mystère des vieilles pierres et des mythes ancestraux, notamment par les statues-menhirs du musée Fenaille de Rodez.

À 18 ans, Pierre Soulages pose ses bagages à Paris et intègre l’École des beaux-arts. Il visite le Louvre et découvre les grands maîtres anciens et modernes. Mais l’enseignement académique l’ennuie, et Soulages retourne à sa région natale.

L’artiste n’est que brièvement mobilisé pendant la Seconde Guerre mondiale, en 1940 puis en 1944. C’est à cette période qu’il découvre l’art moderne et et la poésie, rencontre aussi Colette Llaurens qu’il épouse en 1942. Les années d’après-guerre sont essentielles : installé en banlieue parisienne, il se lance dans la grande aventure de l’abstraction, notamment après avoir rencontré Sonia Delaunay. Il échange avec Alexander Calder et Francis Picabia.

Adoptant un geste expressionniste, dans la lignée d’Hans Hartung, il utilise des couleurs sombres qui le singularisent au milieu des exposants des Salons parisiens. Dans les années 1950, il expose beaucoup, notamment à New York, plaque tournante des tendances modernes et abstraites. En 1952, il est également présent à la 26e biennale de Venise avec le groupe français. L’année suivante, il commence à s’attaquer à de grands formats.

Le noir est, chez Soulages, une obsession et une quête. Il radicalise l’usage de cette couleur dans son œuvre à la fin des années 1970. La lumière, en se réfléchissant sur la surface, joue une place prédominante dans ce travail où la couleur est profonde, et qu’il qualifie, à partir de 1979, d’outrenoir. Bien souvent, la matière crée des reliefs, des contrastes, à la surface de l’œuvre, qu’elle accidente. C’est pourquoi le peintre préfère parler de peinture « mono-pigmentaire » plutôt que de peinture « monochrome ». Ses œuvres, aux formats imposants, présentent ainsi une présence parfois proche de la sculpture.

L’œuvre de Soulages présente une qualité méditative, et l’artiste a d’ailleurs revendiqué son intérêt pour le zen et les cultures orientales. Ne cherchant pas à représenter le réel, il peint, se laissant guider par sa liberté, renonçant à tout débordement lyrique. Ses œuvres, d’ailleurs, ne portent pas de titre.

En 1987, Soulages se consacre à une grande commande publique : les 104 vitraux de l’abbatiale Sainte-Foy de Conques qui l’avait profondément impressionné lors d’un voyage scolaire en 1931 (ou 1932). Il y travaillera durant sept ans avec le maître-verrier Jean-Dominique Fleury.

L’artiste, qui réside avec sa femme Colette à Sète, connaît une immense notoriété en France grâce à de grandes expositions qui lui sont consacrées (notamment au Centre Pompidou en 2009) et, depuis 2014, avec l’ouverture du musée Soulages dans sa ville natale de Rodez. En 2019, des expositions à Montpellier et au Louvre célèbrent le centenaire du peintre ruthénois.

Le peintre est décédé le 26 octobre 2022 à l’âge de 102 ans.

Ses œuvres clés

Pierre Soulages, Brou de noix sur papier
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Pierre Soulages, Brou de noix sur papier, 1949

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Gouache sur papier • 65,5 × 50,3 cm • Coll. musée Soulages, Rodez / Donation Pierre et Colette Soulages, 2005 / Photo Christian Bousquet

Brou de noix sur papier, 1949

Les brous de noix (réalisé à l’aide d’un pigment naturel extrait de l’écorce de la noix) sont parmi les premières œuvres abstraites de Soulages, commencées au milieu des années 1940. La gestualité du peintre requiert une grande importance dans cette période, elle peut évoquer la calligraphie des maîtres chinois. Un contraste fort s’établit entre la couleur sombre et la blancheur révélée du papier.

Peinture
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Peinture, 30 novembre 1967

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Peinture à l’huile sur toile • 202 × 143 cm • Coll. musée Soulages, Rodez / Donation Pierre et Colette Soulages, 2005 / Photo Vincent Cunillère

Peinture, 30 novembre 1967

Avant d’expérimenter l’outrenoir, Soulages a d’abord travaillé le noir en association avec d’autres couleurs, ici une peinture bleue liquide. Le peintre fonctionne à l’instinct, il n’essaie pas de conditionner le résultat à sa volonté. Les contours formés par la coulure bleue sont retravaillés par Soulages à l’aide de la couleur noir, affectionnée entre toutes.

Pierre Soulages, Peinture
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Pierre Soulages, Peinture, 29 juin 1979

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Huile sur toile • 202 × 453 cm • © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Philippe Migeat

Peinture, 29 juin 1979

Ce grand diptyque témoigne du basculement de Soulages dans l’outrenoir. Paradoxalement, il s’agit d’un jeu de matières entre la couleur profonde et la lumière qui vient se réfléchir dans les sillons, les aspérités de la surface travaillée par le peintre. En ressort la sensation d’une présence, d’une matérialité, parfois proche de la sculpture.

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Musée Soulages

Par • le 26 octobre 2022
Retrouvez dans l’Encyclo : Pierre Soulages

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